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Véronique Arrighi : « Notre politique de renfort des centres de secours ruraux est exemplaire et unique au niveau national »


Nicole Mari le Mercredi 25 Juin 2025 à 07:30

Le Service d’incendie et de secours du Pumonte (SIS 2A) renforce sa présence et sa réponse opérationnelle dans les territoires ruraux de Corse-du-Sud. Dès l’automne, des sapeurs-pompiers professionnels vont être déployés dans les casernes de Casaglione, Vico, Petretu-Bicchisanu, Levie, Bunifaziu, Santa Lucia di Portivecchju et Pianottoli-Caladarellu. L’objectif est d’assurer un service constant et une couverture optimale des risques dans le rural au plus près des populations. Explications, pour Corse Net Infos, de Véronique Arrighi, présidente du SIS 2A.



Véronique Arrighi, présidente du Service d’incendie et de secours du Pumonte (SIS 2A). Photo SIS 2A.
Véronique Arrighi, présidente du Service d’incendie et de secours du Pumonte (SIS 2A). Photo SIS 2A.
- Pourquoi avez-vous décider de renforcer la présence du SIS dans les territoires ruraux ?
- Dès 2021, dont les différents arbitrages, mais également dans les différentes volontés politiques qui ont pu être énoncées au sein du Conseil d’administration du SIS 2A, nous avons porté ce souhait d’équité au sein des territoires ruraux. Il nous fallait surtout récupérer le retard opérationnel que l’on avait sur le département de Corse-du-Sud. Donc, le renfort des territoires ruraux répond simplement à une équité dans l’accès au secours, dans la défense des biens, des populations et de l’environnement et assure une présence et une disponibilité accrues. Il s’inscrit dans une stratégie en trois étapes, visant à consolider la réponse opérationnelle face aux défis démographiques, climatiques et d’aménagement du territoire. Il s’inscrit aussi dans une démarche globale d'aménagement du territoire et de développement de l’économie locale.
 
- Quelles sont les trois étapes de cette stratégie que vous avez mise en œuvre ?
- Tout d’abord, il a fallu consolider la trajectoire budgétaire de l’établissement. C’est passé par des contre-mesures en interne, également par une réflexion budgétaire en donnant vraiment la priorité à l’opérationnel. Ça a été la première étape. Ensuite, avec le soutien de la Collectivité de Corse, nous avons établi une convention pluriannuelle d’objectifs et de moyens, également un plan pluriannuel d’investissement (PPI) qui nous a permis de nous projeter et d’apporter de nombreuses améliorations au quotidien. Depuis 2022, nous avons investi plus de 900 000 € par an pour la réhabilitation des casernes, 3 millions € pour le renouvellement du matériel roulant, et augmenté de 26% le budget de la formation des sapeurs-pompiers volontaires. Depuis 2024, les centres de secours d’Evisa, de Pastricciola, de Bastelica, d’Ocana et de Zonza ont été activés en permanence pour garantir une réponse constante aux risques de feux de forêts et de feux urbains.
 
- Qu’est-ce qui a motivé le choix des sites ?
- Pour mener à bien ce projet de renfort opérationnel dans les territoires ruraux, nous avons créé un groupe-projet composé de différents opérationnels qui se sont basés sur des réalités opérationnelles, c’est-à-dire qu’ils ont tenu compte tout d’abord, du nombre de sorties, du temps d’intervention des secours, de la distance à parcourir, de la démographie et des dérèglements climatiques, mais aussi des nouveaux risques par bassin de vie. C’est à partir de ce groupe de travail que nous avons déterminé, lors du Conseil d’administration du 13 juin, les choix de professionnalisation des effectifs de sept centres de secours ruraux et périurbains. A savoir, les centres de Casaglione, Vico, Petretu-Bicchisanu, Levie, Bunifaziu, Santa Lucia di Portivecchju et Pianottoli-Caladarellu. Nous allons passer de trois à cinq centres professionnels dans le groupement Nord et de deux à sept dans le groupement Sud.
 
- Vous dites que pour le choix des sites, vous avez pris en compte le temps d'intervention des secours. C'est-à-dire ?
- C’est un élément essentiel dans l’équité au secours. Par exemple, à Vico, la durée d’intervention est de 2h30. Ce qui veut dire que tout le territoire autour de la caserne de Vico, avec les communes en premier appel, reste complètement démuni de tout secours pendant 2h30. On a pris cet élément en compte. Les distances ont été un indicateur pour affiner et surtout affirmer notre décision de professionnalisation. Quand le secours est déclenché, il doit arriver dans les 20 minutes jusqu’au domicile. C’est le délai réglementaire. Après on sait tous que, suivant les territoires et surtout dans les territoires ruraux, le délai varie beaucoup. La réduction du temps d’intervention est l’aboutissement de ce beau projet qui est vraiment un projet collectif basé sur du vécu. C’est pour cela que je parle d’équité dans l’accès au secours, surtout dans les territoires ruraux.

Caserne de Casglione. Photo SIS 2A.
Caserne de Casglione. Photo SIS 2A.
- Allez-vous déplacer des sapeurs-pompiers professionnels ou faire des embauches ?
- Les centres vont être professionnalisés, suite à des réussites de concours professionnels. Il va donc y avoir des embauches, mais aussi une mobilité interne au sein des sous-officiers sur la base du volontariat. La mobilité est ouverte puisque les premiers centres seront professionnalisés au mois de septembre. C’est vraiment un projet qui a été élaboré en commun, avec les élus des différents bassins de vie et les différentes communes. Il a surtout été élaboré avec les agents et les organisations syndicales de l’établissement. Il n’est que la première étape de renforcement et de consolidation opérationnelle dans les territoires du Pumonte. L’effectif professionnel du SIS Pumonte passera de 162 pompiers actuellement à 178, auxquels s’ajoutent les 1200 pompiers volontaires.
 
- Allez-vous occuper des bâtiments qui existent déjà ou en créer de nouveaux ?
- Dans les centres qui vont être professionnalisés, les casernes existent déjà. En parallèle, nous avons mis en œuvre un vrai plan de réaménagement de casernes puisque nous avons réaménagé trois casernes du rural : Vico, Bucugnanu et Livia. Nous avons inauguré la caserne de Vico, le 4 juin. Il y a aussi un projet de création de casernes à Pietrosella, Pianottoli et Piana, en lien avec notre plan pluriannuel. L’investissement est financé à 80 % par la Collectivité de Corse. Sur l’année 2025, nous allons livrer Pianottoli. Fin 2026 - début 2027, nous inaugurerons Pietrosella. Et dans l’année 2027, Piana. Cette nouvelle répartition territoriale garantit qu’à tout moment de la journée, chaque caserne a le personnel et l’équipement nécessaires pour assurer les interventions.
 
- En quoi ce projet est-il une démarche d'aménagement du territoire ?
- Nous avons, non seulement la volonté de consolider et d’améliorer notre réponse opérationnelle, mais aussi d’asseoir réellement ce service public dans les différents territoires et dans les territoires ruraux. Le service d’incendie et de secours est un acteur, mais également un partenaire au sein des différentes communes dans l’élaboration de leurs différents documents structurants d’urbanisme ou autres documents en lien avec les différents risques. C’est là où l’établissement se positionne réellement comme un acteur-clé du développement territorial, un aménageur au sein de toutes ces politiques publiques.
 
- En quoi participe-t-il au développement de l'économie locale ?
- Ce projet participe au développement de l’économie locale parce qu’au-delà de tout le travail qui a été fourni dans l’établissement sur le volontariat, nous avons mis en place une vraie politique, une vraie doctrine du volontariat au niveau du Pumonte. Aujourd’hui, quand on recrute un pompier professionnel qui est du territoire et qui a sa famille, son projet familial et son projet de vie dans le territoire, qu’on l’installe, qu’on lui permet de rester chez lui, on participe également à l'économie. Tout simplement, on va peut-être aider à garder une école ouverte, à dynamiser la vie d’une micro région. Je tiens à souligner parce que c’est essentiel que cette politique de renfort des centres ruraux, en injectant de la ressource professionnelle, est exemplaire et unique au niveau national. La tendance nationale est plutôt de fermer des casernes, de rationaliser et de recentrer la ressource, tandis que nous, vraiment, grâce à l’accompagnement financier de la Collectivité de Corse, nous menons cette politique d’équité de service public dans les territoires ruraux.
 
Propos recueillis par Nicole MARI.