La question corse s’est brutalement invitée le 2 mars dans une campagne présidentielle d’où elle était particulièrement absente. La crise, qui secoue l’île depuis l’agression et l’assassinat d’Yvan Colonna à la centrale d’Arles par un détenu islamiste, a touché en rebond le continent focalisé sur la guerre en Ukraine, et chacun des douze candidats à la magistrature suprême s’en est emparé avec un temps de retard, à brûle-pourpoint, sans recul et sans véritable connaissance ou analyse de la situation. Les premières réactions au bruissement médiatique et les positions plus tranchées au fil du durcissement des évènements ont globalement traduit le malaise et la sidération de la classe politique française, son incompréhension chronique d’une Corse nouvelle qu’elle n’a pas vu changé, d’un scénario de rupture qui fait voler en éclat les vieux schémas sclérosés. Il est bien difficile, aujourd’hui, comme hier, pour la plupart des candidats à la magistrature suprême, de remettre en question des préjugés tenaces, des certitudes rassurantes, et de regarder en face une île qui ne les intéresse que le temps d’une élection, un peuple dont ils nient farouchement l’existence, une culture et une langue qu’ils rejettent comme si elles portaient en elles le fléau pathogène de la désintégration. C’est dire l’état de la démocratie française ! Comment le pays, chantre de la liberté dans son principe, peut-il avoir si peur de la demande de liberté de ses territoires ? Voilà un grand sujet de réflexion pour une élection présidentielle ! Mais l’opportunité de la poser n’a guère été saisie. Ceci dit, tous ne sont pas aussi autistes, et ce n’est pas une mince gageure des deputés nationalistes que d’avoir réussi à inverser la dynamique de l’équation et à imposer la question corse à l’agenda politique national. La personnalité du président de l’Exécutif corse, Gilles Simeoni, y a joué pour beaucoup dans la course d’obstacles qu’il a fallu surmonter. Cette stratégie de billard à trois bandes a trouvé son point d’orgue le 2 mars dernier, et la colère profonde, qui s’est violemment exprimée dans l’île, a permis de mesurer l’intensité de la fracture avec le continent. Plus que jamais, la Corse est une peau de banane sur laquelle les politiques français ont très peur de déraper.
Le silence de Macron
La question corse, Emmanuel Macron s’en serait bien passé ! Surtout en pleine campagne présidentielle ! Le chef de l’Etat, qui a superbement ignoré la Corse et ses dirigeants nationalistes pendant la totalité de son quinquennat, à l’exception de rares et brèves incursions aussi malheureuses qu’inutiles, aurait bien voulu finir son mandat comme il l’a commencé, mais c’était compter sans l’affaire Colonna. Il est vrai que c’est autant par prudence que par conviction que le président sortant a boudé l’épineuse question pendant cinq ans. Le nouveau pacte girondin, qu’il avait promis lors de la campagne de 2017 et qui, déjà, à l’époque, du peu qu’il en avait dévoilé, ne brillait ni par son originalité, ni par son progressisme, ni par sa précision, a rétrogradé dans les faits à un jacobinisme radical que l’on croyait révolu. La recentralisation, initiée par François Hollande, a pris une vigueur exceptionnelle sous son mandat. Ce n’est pas pour rien que Régions de France, dans son livre blanc, plaide « pour une étape nouvelle de décentralisation et la restauration de la confiance et de la démocratie entre l’Etat et les collectivités locales ». Pourtant à bien y regarder, tout était déjà dans ses allocutions de Vescovato et de Furiani en mars 2017, c’est-à-dire une fin de non-recevoir à toutes les revendications nationalistes avec un double langage assumé qui lui fait dire en simultané : « La réussite de la Corse ne se décrètera pas dans un ministère parisien » et « Je veux plus d’Etat en Corse ».
Copie conforme !
En cinq ans, rien n’a changé, à part que cette fois-ci, le président sortant n’a même pas daigné mettre un pied dans l’île et n’aurait même pas prononcé le moindre mot sur la Corse si des évènements tragiques ne l’y avaient forcé, et encore ne le fait-il qu’en derniers recours, du bout des lèvres, pressé par les médias, avant de replonger dans un silence mutique. Il a fallu que la colère de la jeunesse corse atteigne un point paroxystique pour qu’il envoie son ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, brandir le mot magique et totalement tabou : « l’autonomie ». Une incantation ministérielle psalmodiée pendant trois jours pour conjurer l’écueil à moins d’un mois du 1er tour de l’élection et une annonce à priori sans ambiguïté : « Un projet global d’autonomie finalisé avant la fin de l’année 2022 ». Aussitôt promis, aussitôt balayé d’un revers de main médiatique, le 4 avril, par Emmanuel Macron qui continue de refuser obstinément de reconnaître un fait démocratique : « L’autonomie n’est pas un objectif en soi ! ». Le 7 avril, Gérard Darmanin réaffirme avec le même aplomb : « La porte du gouvernement est toujours ouverte sur la question de l'autonomie ». Le fameux « en même temps » macronien, du tout et son contraire, qui brouille les pistes et les messages ! Et une seule certitude : le candidat de 2022 est copie conforme du candidat de 2017 !
La question corse, Emmanuel Macron s’en serait bien passé ! Surtout en pleine campagne présidentielle ! Le chef de l’Etat, qui a superbement ignoré la Corse et ses dirigeants nationalistes pendant la totalité de son quinquennat, à l’exception de rares et brèves incursions aussi malheureuses qu’inutiles, aurait bien voulu finir son mandat comme il l’a commencé, mais c’était compter sans l’affaire Colonna. Il est vrai que c’est autant par prudence que par conviction que le président sortant a boudé l’épineuse question pendant cinq ans. Le nouveau pacte girondin, qu’il avait promis lors de la campagne de 2017 et qui, déjà, à l’époque, du peu qu’il en avait dévoilé, ne brillait ni par son originalité, ni par son progressisme, ni par sa précision, a rétrogradé dans les faits à un jacobinisme radical que l’on croyait révolu. La recentralisation, initiée par François Hollande, a pris une vigueur exceptionnelle sous son mandat. Ce n’est pas pour rien que Régions de France, dans son livre blanc, plaide « pour une étape nouvelle de décentralisation et la restauration de la confiance et de la démocratie entre l’Etat et les collectivités locales ». Pourtant à bien y regarder, tout était déjà dans ses allocutions de Vescovato et de Furiani en mars 2017, c’est-à-dire une fin de non-recevoir à toutes les revendications nationalistes avec un double langage assumé qui lui fait dire en simultané : « La réussite de la Corse ne se décrètera pas dans un ministère parisien » et « Je veux plus d’Etat en Corse ».
Copie conforme !
En cinq ans, rien n’a changé, à part que cette fois-ci, le président sortant n’a même pas daigné mettre un pied dans l’île et n’aurait même pas prononcé le moindre mot sur la Corse si des évènements tragiques ne l’y avaient forcé, et encore ne le fait-il qu’en derniers recours, du bout des lèvres, pressé par les médias, avant de replonger dans un silence mutique. Il a fallu que la colère de la jeunesse corse atteigne un point paroxystique pour qu’il envoie son ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, brandir le mot magique et totalement tabou : « l’autonomie ». Une incantation ministérielle psalmodiée pendant trois jours pour conjurer l’écueil à moins d’un mois du 1er tour de l’élection et une annonce à priori sans ambiguïté : « Un projet global d’autonomie finalisé avant la fin de l’année 2022 ». Aussitôt promis, aussitôt balayé d’un revers de main médiatique, le 4 avril, par Emmanuel Macron qui continue de refuser obstinément de reconnaître un fait démocratique : « L’autonomie n’est pas un objectif en soi ! ». Le 7 avril, Gérard Darmanin réaffirme avec le même aplomb : « La porte du gouvernement est toujours ouverte sur la question de l'autonomie ». Le fameux « en même temps » macronien, du tout et son contraire, qui brouille les pistes et les messages ! Et une seule certitude : le candidat de 2022 est copie conforme du candidat de 2017 !
Le donnant-donnant de la droite
La question corse n’intéressait guère plus, à quelques exceptions près, au-delà de l’étape insulaire obligée et surtout de la course aux parrainages, la plupart des autres candidats à l’élection présidentielle dans une campagne électorale assez détestable que beaucoup jugent jouée d’avance. La droite, en son centre comme en ses extrêmes, s’en est saisie la première, surfant sur la vague sans pour autant dévier de ses postures. La candidate des Républicains, Valérie Pécresse, qui se dit théoriquement « favorable à l’autonomie de la Corse, mais dans le cadre de la République », a été la seule présidente d’une région de France à émettre des réserves sur la dévolution d’un pouvoir législatif. Sa position pêche dans le même flou macroniste : « l’autonomie ne doit pas conduire au démantèlement de la République et c'est ce qui est inquiétant dans le processus corse ». Il faut « un donnant donnant de la part de la Corse : l'autonomie contre des résultats ». On ne comprend pas trop ce que cela signifie ! Avant d’espérer des résultats, encore faudrait-il donner à la Corse la possibilité d’essayer et le temps de réussir ! Elle préfère lui opposer « un pouvoir réglementaire conféré aux régions dans le cadre des grandes lois de décentralisation », ce qui est très loin de la demande corse. Si la présidente de la Région Ile de France est favorable à l’enseignement des langues régionales, elle pose son veto à la coofficialité et au statut de résident. L’affaire Colonna lui a permis de fustiger « un président aux abois », qui a « joué la montre sur le retour des prisonniers sur le sol corse » avant de « céder à la violence » et qui « paie cash son mépris des territoires ».
Le credo républicain
Même son de cloche chez Marine Le Pen qui accuse le président sortant de « clientélisme cynique qui brise l'intégrité du territoire français : la Corse doit rester française ». Pour la candidate RN, qui s’était prononcée pour le rapprochement des détenus, la question corse n’en est pas une : « Comme d'habitude, le gouvernement d'Emmanuel Macron crée la crise, jette de l'huile sur le feu, et se plaint d'être obligé de la gérer ». Quand à l’autonomie, c’est « un leurre » et « une technique traditionnelle du gouvernement. Quand il y a un problème sur le territoire, il parle d’autonomie. Macron, en 2018, s’était prononcé contre l’autonomie ». Tout aussi fermement opposé à ce qu’il nomme « une préoccupation de salon », Eric Zemmour dénonce, lui aussi, une « basse manœuvre électoraliste ». Le candidat de Reconquête propose « une relation nouvelle entre la Corse et Paris. Une partie des maux qui accable l’île se régleront par la restauration de la puissance française ». S’il comprend que la question est, d’abord, identitaire : « Les Corses veulent défendre l'identité corse et ils ont raison », son prisme reste uniquement national : « Les Corses aiment la France quand la France est grande… Notre victoire est la dernière chance d’éviter votre disparition. L’urgence est de sauver l’identité corse, non de créer un énième statut institutionnel ». Le refus est, encore plus virulent chez Nicolas Dupont-Aignant, qui raille l’autonomie : « Ce mot valise veut tout et rien dire à la fois ». Le candidat souverainiste de « Debout La France » n’y voit que des « manœuvres politicardes et préélectorales », mais aussi « l'amateurisme » d’un gouvernement « qui n'a rien fait pendant cinq ans et jette, aujourd’hui, en pâture, le mot d’autonomie qui peut être dangereux pour les Corses, comme pour les Français ». Il tranche : « Voilà le potentiel 2ème mandat Macron : le démembrement de la France ». Pour lui aussi, la Corse n’est qu’une région française comme une autre.
La question corse n’intéressait guère plus, à quelques exceptions près, au-delà de l’étape insulaire obligée et surtout de la course aux parrainages, la plupart des autres candidats à l’élection présidentielle dans une campagne électorale assez détestable que beaucoup jugent jouée d’avance. La droite, en son centre comme en ses extrêmes, s’en est saisie la première, surfant sur la vague sans pour autant dévier de ses postures. La candidate des Républicains, Valérie Pécresse, qui se dit théoriquement « favorable à l’autonomie de la Corse, mais dans le cadre de la République », a été la seule présidente d’une région de France à émettre des réserves sur la dévolution d’un pouvoir législatif. Sa position pêche dans le même flou macroniste : « l’autonomie ne doit pas conduire au démantèlement de la République et c'est ce qui est inquiétant dans le processus corse ». Il faut « un donnant donnant de la part de la Corse : l'autonomie contre des résultats ». On ne comprend pas trop ce que cela signifie ! Avant d’espérer des résultats, encore faudrait-il donner à la Corse la possibilité d’essayer et le temps de réussir ! Elle préfère lui opposer « un pouvoir réglementaire conféré aux régions dans le cadre des grandes lois de décentralisation », ce qui est très loin de la demande corse. Si la présidente de la Région Ile de France est favorable à l’enseignement des langues régionales, elle pose son veto à la coofficialité et au statut de résident. L’affaire Colonna lui a permis de fustiger « un président aux abois », qui a « joué la montre sur le retour des prisonniers sur le sol corse » avant de « céder à la violence » et qui « paie cash son mépris des territoires ».
Le credo républicain
Même son de cloche chez Marine Le Pen qui accuse le président sortant de « clientélisme cynique qui brise l'intégrité du territoire français : la Corse doit rester française ». Pour la candidate RN, qui s’était prononcée pour le rapprochement des détenus, la question corse n’en est pas une : « Comme d'habitude, le gouvernement d'Emmanuel Macron crée la crise, jette de l'huile sur le feu, et se plaint d'être obligé de la gérer ». Quand à l’autonomie, c’est « un leurre » et « une technique traditionnelle du gouvernement. Quand il y a un problème sur le territoire, il parle d’autonomie. Macron, en 2018, s’était prononcé contre l’autonomie ». Tout aussi fermement opposé à ce qu’il nomme « une préoccupation de salon », Eric Zemmour dénonce, lui aussi, une « basse manœuvre électoraliste ». Le candidat de Reconquête propose « une relation nouvelle entre la Corse et Paris. Une partie des maux qui accable l’île se régleront par la restauration de la puissance française ». S’il comprend que la question est, d’abord, identitaire : « Les Corses veulent défendre l'identité corse et ils ont raison », son prisme reste uniquement national : « Les Corses aiment la France quand la France est grande… Notre victoire est la dernière chance d’éviter votre disparition. L’urgence est de sauver l’identité corse, non de créer un énième statut institutionnel ». Le refus est, encore plus virulent chez Nicolas Dupont-Aignant, qui raille l’autonomie : « Ce mot valise veut tout et rien dire à la fois ». Le candidat souverainiste de « Debout La France » n’y voit que des « manœuvres politicardes et préélectorales », mais aussi « l'amateurisme » d’un gouvernement « qui n'a rien fait pendant cinq ans et jette, aujourd’hui, en pâture, le mot d’autonomie qui peut être dangereux pour les Corses, comme pour les Français ». Il tranche : « Voilà le potentiel 2ème mandat Macron : le démembrement de la France ». Pour lui aussi, la Corse n’est qu’une région française comme une autre.
Le progressisme de la gauche
A l’inverse, à gauche, les positions sont bien plus ouvertes. Le principe d’autonomie ne semble pas effaroucher les candidats, dont certains ont réalisé une surprenante mue. Côté socialiste, Anne Hidalgo se déclare, à priori, favorable à « une autonomie législative », estimant « nécessaire de donner des pouvoirs à des collectivités qui ont des statuts particuliers comme la Corse », sans donner plus de précisions sur un sujet qui, visiblement, ne la passionne guère. Néanmoins, elle juge le timing « fracassant » sur une question qui n’est pas nouvelle et « une volonté d’enjamber l’élection présidentielle » qui prouve que « Le gouvernement est incapable de gérer ». C’est l’élection de trois députés nationalistes en 2017, les rapports qu’il noue avec eux, et les leçons de la crise catalane qui ont fait réfléchir le jacobin convaincu qu’est Jean-Luc Mélenchon. Le candidat de La France insoumise a fait « le pari de croire à une autonomie institutionnelle de la Corse » bien avant le 2 mars. Il est « d'accord pour que l'article 74 de la Constitution, qui est déjà le statut de la Polynésie française, soit appliqué à la Corse si elle le demande ». Le déclenchement de ledit article, en consacrant le principe de spécialité législative et d'autonomie des collectivités d'Outre-mer aux territoires insulaires et éloignés, ouvre la voie à un statut spécifique pour l’île. Une évolution politique qui lui a valu une volée de parrainages d’élus de Femu a Corsica.
L'autonomie assumée
« Les écologistes sont des régionalistes » affirme Yannick Jadot, sans bouger de sa ligne. « Cela fait des mois que nous défendons l'idée d'une autonomie de plein droit et de plein exercice en Corse. Ce qui est terrible, c'est qu'il faut un drame, comme d'habitude avec ce quinquennat, pour commencer à entrevoir des solutions ». Le candidat d’Europe Ecologie-Les Verts, qui compte des amitiés dans les rangs autonomistes, entend « sortir d'une relation de défiance entre la Corse et l'Etat français » pour construire « une relation forte, apaisée » et « redonner des compétences à des territoires qui en ont besoin ». La question corse, Philippe Poutou s’en est emparé avec une grande délectation. S’affichant sans complexe « solidaire de la colère du peuple corse », il pousse très loin le processus d’autonomisation de l’île. « Nous sommes pour le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes », rappelle le candidat du Nouveau parti anticapitaliste (NPA) qui revendique le droit à l’autonomie partout où les peuples le demandent et « la reconnaissance d’un statut, d'une langue, d'une culture et du droit pour ces populations de pratiquer leur culture au quotidien et de s'organiser comme elles le souhaitent ». Pour lui, la Corse est même « un exemple à suivre ».
A l’inverse, à gauche, les positions sont bien plus ouvertes. Le principe d’autonomie ne semble pas effaroucher les candidats, dont certains ont réalisé une surprenante mue. Côté socialiste, Anne Hidalgo se déclare, à priori, favorable à « une autonomie législative », estimant « nécessaire de donner des pouvoirs à des collectivités qui ont des statuts particuliers comme la Corse », sans donner plus de précisions sur un sujet qui, visiblement, ne la passionne guère. Néanmoins, elle juge le timing « fracassant » sur une question qui n’est pas nouvelle et « une volonté d’enjamber l’élection présidentielle » qui prouve que « Le gouvernement est incapable de gérer ». C’est l’élection de trois députés nationalistes en 2017, les rapports qu’il noue avec eux, et les leçons de la crise catalane qui ont fait réfléchir le jacobin convaincu qu’est Jean-Luc Mélenchon. Le candidat de La France insoumise a fait « le pari de croire à une autonomie institutionnelle de la Corse » bien avant le 2 mars. Il est « d'accord pour que l'article 74 de la Constitution, qui est déjà le statut de la Polynésie française, soit appliqué à la Corse si elle le demande ». Le déclenchement de ledit article, en consacrant le principe de spécialité législative et d'autonomie des collectivités d'Outre-mer aux territoires insulaires et éloignés, ouvre la voie à un statut spécifique pour l’île. Une évolution politique qui lui a valu une volée de parrainages d’élus de Femu a Corsica.
L'autonomie assumée
« Les écologistes sont des régionalistes » affirme Yannick Jadot, sans bouger de sa ligne. « Cela fait des mois que nous défendons l'idée d'une autonomie de plein droit et de plein exercice en Corse. Ce qui est terrible, c'est qu'il faut un drame, comme d'habitude avec ce quinquennat, pour commencer à entrevoir des solutions ». Le candidat d’Europe Ecologie-Les Verts, qui compte des amitiés dans les rangs autonomistes, entend « sortir d'une relation de défiance entre la Corse et l'Etat français » pour construire « une relation forte, apaisée » et « redonner des compétences à des territoires qui en ont besoin ». La question corse, Philippe Poutou s’en est emparé avec une grande délectation. S’affichant sans complexe « solidaire de la colère du peuple corse », il pousse très loin le processus d’autonomisation de l’île. « Nous sommes pour le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes », rappelle le candidat du Nouveau parti anticapitaliste (NPA) qui revendique le droit à l’autonomie partout où les peuples le demandent et « la reconnaissance d’un statut, d'une langue, d'une culture et du droit pour ces populations de pratiquer leur culture au quotidien et de s'organiser comme elles le souhaitent ». Pour lui, la Corse est même « un exemple à suivre ».
Une question de vie chère
Dans ce concert gauchiste, deux candidats jouent sur un tempo discordant. L’autonomie, le communiste Fabien Roussel, comme il avait déclaré en février dernier dans l’île, y est totalement opposé : « L’autonomie, ce n’est pas ce qui va remplir le frigo des Corses. Ce dont souffre la Corse, c'est d'une vie chère, encore plus chère qu'en métropole. Je suis pour qu'il y ait, en Corse, des hausses de salaires conséquentes et un recul de la pauvreté ». Pour lui, la proposition de Darmanin n’est qu’un pare-feu : « Pour masquer sa défaillance, le gouvernement est prêt à brader la République ». Et, la question corse, juste une question de pouvoir d’achat. Dans la même veine, Nathalie Arthaud résume le débat à la lutte contre la pauvreté : « La Corse est un département qui est pauvre. Quand on est pauvre, sans boulot, mal payé, l’autonomie administrative ne suffit pas pour gagner sa vie. Il faut autre chose. Je suis convaincue que la Corse, c'est le combat de tous les travailleurs ». La candidate de Lutte ouvrière impute les tensions à un État et à un gouvernement « qui méprise la Corse » et qui « ne respecte pas les sentiments que peuvent éprouver les Corses ».
Des combats communs
Des douze candidats, le Béarnais Jean Lassalle est certainement le plus populaire dans l’île. Arrivé en tête des parrainages, il n’a pas hésité à faire le déplacement dans un contexte tendu. « Entre une situation insulaire telle que celle de l’île et une situation de vallée de montagne profonde comme nous avons dans les Pyrénées, il y a beaucoup de points de convergence. Ce même sentiment d’abandon, que l’on ressent si souvent, qui est si dur à supporter, ce même sentiment d’être toujours montrés du doigt parce que l’on aspire à parler une langue, qui est la nôtre, parce que l’on aspire à la différence, qui pourtant apporte à notre pays ». L’autonomie ne lui pose aucun problème : « Les Açores ont un statut d’autonomie très large, avec un pouvoir régalien qui reste au Portugal. Je crois que cela pourrait convenir à la Corse ». Pas plus que la coofficialité de la langue corse : « Il faut apprendre les langues régionales partout où elles ont été abandonnées. Il faut s’appuyer sur la notion de province, et non de régions, car c’est ce qui a apporté à notre pays une couleur, une culture, des productions. C’est notre patrimoine commun ».
A trois jours du 1er tour du scrutin, la situation reste tendue en Corse où la campagne présidentielle se déroule dans l’indifférence générale. Les partis indépendantistes ont appelé au boycott d’une élection à laquelle ils ne participent traditionnellement pas. Les Corses ont jusqu’à dimanche pour décider de voter et pour qui voter. Le taux de participation et le score de l’Extrême-droite seront les premières variables à analyser.
N.M.
Dans ce concert gauchiste, deux candidats jouent sur un tempo discordant. L’autonomie, le communiste Fabien Roussel, comme il avait déclaré en février dernier dans l’île, y est totalement opposé : « L’autonomie, ce n’est pas ce qui va remplir le frigo des Corses. Ce dont souffre la Corse, c'est d'une vie chère, encore plus chère qu'en métropole. Je suis pour qu'il y ait, en Corse, des hausses de salaires conséquentes et un recul de la pauvreté ». Pour lui, la proposition de Darmanin n’est qu’un pare-feu : « Pour masquer sa défaillance, le gouvernement est prêt à brader la République ». Et, la question corse, juste une question de pouvoir d’achat. Dans la même veine, Nathalie Arthaud résume le débat à la lutte contre la pauvreté : « La Corse est un département qui est pauvre. Quand on est pauvre, sans boulot, mal payé, l’autonomie administrative ne suffit pas pour gagner sa vie. Il faut autre chose. Je suis convaincue que la Corse, c'est le combat de tous les travailleurs ». La candidate de Lutte ouvrière impute les tensions à un État et à un gouvernement « qui méprise la Corse » et qui « ne respecte pas les sentiments que peuvent éprouver les Corses ».
Des combats communs
Des douze candidats, le Béarnais Jean Lassalle est certainement le plus populaire dans l’île. Arrivé en tête des parrainages, il n’a pas hésité à faire le déplacement dans un contexte tendu. « Entre une situation insulaire telle que celle de l’île et une situation de vallée de montagne profonde comme nous avons dans les Pyrénées, il y a beaucoup de points de convergence. Ce même sentiment d’abandon, que l’on ressent si souvent, qui est si dur à supporter, ce même sentiment d’être toujours montrés du doigt parce que l’on aspire à parler une langue, qui est la nôtre, parce que l’on aspire à la différence, qui pourtant apporte à notre pays ». L’autonomie ne lui pose aucun problème : « Les Açores ont un statut d’autonomie très large, avec un pouvoir régalien qui reste au Portugal. Je crois que cela pourrait convenir à la Corse ». Pas plus que la coofficialité de la langue corse : « Il faut apprendre les langues régionales partout où elles ont été abandonnées. Il faut s’appuyer sur la notion de province, et non de régions, car c’est ce qui a apporté à notre pays une couleur, une culture, des productions. C’est notre patrimoine commun ».
A trois jours du 1er tour du scrutin, la situation reste tendue en Corse où la campagne présidentielle se déroule dans l’indifférence générale. Les partis indépendantistes ont appelé au boycott d’une élection à laquelle ils ne participent traditionnellement pas. Les Corses ont jusqu’à dimanche pour décider de voter et pour qui voter. Le taux de participation et le score de l’Extrême-droite seront les premières variables à analyser.
N.M.