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Le goujon asiatique menace les truites du lac de Calacuccia


Mario Grazi le Lundi 29 Mai 2023 à 18:30

Introduit en Europe par erreur dans les années 60, le goujon asiatique, pseudorasbora parva, est une menace pour les autres poissons. On a pu constater le déclin de diverses populations dans le Danube ou encore en Turquie en raison d’un parasite porté par ce goujon. Présent dans le lac de Calacuccia depuis une dizaine d’années, les truites farios sont aujourd’hui menacées…



Des truites de plus de 50 cm pour plus de deux ou trois kilos
Des truites de plus de 50 cm pour plus de deux ou trois kilos
Tous les pêcheurs insulaires gardent en mémoire ces merveilleux moments passés sur les berges du lac de Calacuccia le jour de l’ouverture de la pêche à la truite. Moments de convivialité et de partage, plus que de pêche. « C’était surtout pour se retrouver entre amis et lancer la saison de pêche autour d’un bon moment festif », se souvient Dédé Flori. Même si l’engouement a diminué ces dernières années, ces fameux moments risques forts de ne rester qu’un lointain souvenir.
En effet, une espèce invasive de poisson a été décelée dans le plan d’eau artificiel du Niolu. Le goujon asiatique, venu de Chine, a proliféré à une vitesse folle depuis des années. Et ce sont aujourd’hui plusieurs millions de ces poissons qui peuplent le lac, au milieu des truites farios qui en ont fait leur nourriture principale.
Introduite en Europe par erreur dans les années 60, cette espèce s’est avérée dangereuse pour les autres poissons. « Effectivement le pseudorasbora parva, plus connu sous le nom de goujon asiatique, est porteur d’un parasite qui, s’il se développe, cause la mort des autres espèces », peste Antoine Battestini, le président de la Fédération interdépartementale de pêche et de pisciculture de la Corse. « Mais diverses études ont également prouvé que ce goujon est arrivé de Chine dans les ballastes des tankers. Ces derniers, en vidangeant dans les ports d’Europe, ont permis à ces poissons de retrouver leur liberté et de se développer dans les divers cours d’eau européens. A la demande de la Fédération nationale de pêche, l’Office National de la Biodiversité a procédé partout en France à des relevés. Ainsi Il y a quelques mois de cela, la police de l’eau a disposé des barrages dérivant sur le lac et le résultat a été pour le moins effarant », a soutenu Nanou Battestini.


Des espèces ont disparu en Europe
Ce poisson a une capacité de reproduction énorme et il a envahi Calacuccia en seulement deux ou trois ans. Le goujon asiatique et son parasite le sphaerothec destrueus peuvent être responsables de la disparition de 80% des populations piscicoles locales. Des faits qui ont été constatés en Europe depuis des années comme sur le Danube et même en Turquie où des espèces endémiques ont disparu de certains cours d’eau.
Si son introduction s’est faite par erreur en Europe, en revanche concernant le plan d’eau de Calacuccia, il se dit que la présence du goujon asiatique serait due uniquement au comportement irresponsable d’un vendeur présent sur le champ de foire du Niolu. Proposant entre autres ces poissons à la vente pour les aquariums des particuliers, le marchand aurait ensuite remis à l’eau ses invendus…
Et à cause de la présence de ce goujon asiatique, les truites farios se sont grandement développées en prenant des proportions telles que nous n’avions pas l’habitude d’en voir en Corse. Il n’est pas rare, en effet, de pêcher des truites de plus de 50 cm pour plus de deux ou trois kilos. De ce fait, la société de pêche du Niolu, soutenue par la Fédération, a souhaité prendre un arrêté limitant le nombre de prises à deux seulement « et d’une taille minimale de 40cm. Il serait en effet indécent de prendre 10 poissons, comme l’autorise la réglementation, de ces proportions », a conclu Nanou Battestini.


De nouvelles techniques de pêche
Mais ici, si les meilleures techniques de pêche étaient traditionnelles, c’est-à-dire avec un plomb coulissant et un vers de terre comme appât, ou la mouche, aujourd’hui la pêche a totalement évoluée. Si la pêche au vif reste interdite dans les rivières et plan d'eau de première catégorie en Corse, pour être certain de prendre une truite, ou une « pescia », comme on l’appelle dans le Niolu, il faut utiliser les techniques que l’on pratique en mer pour traquer le loup. Leurres souples ou encore poissons nageurs de bonne taille garantissent, en effet, de belles prises. Il est vrai que les détenteurs d’une carte de pêche se régalent de sortir ces belles prises et on passe de biens beaux moments de pêche sur les berges du lac de Calacuccia. Des prises qui, cependant, ne régaleront pas vos papilles puisque ces grosses truites n’ont plus aucun goût. C’est pourquoi, ici c’est le No Kill qui est pratiqué par les passionnés.