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Infrastructures en eau et dispositif général d’aides aux communes : L’inquiétude des maires


Nicole Mari le Dimanche 1 Avril 2018 à 22:47

Lors de la dernière session de l’Assemblée de Corse, à l’occasion des questions orales, Marie-Thérèse Mariotti, conseillère territoriale du groupe « Per l’Avvene », a interpellé l’Exécutif sur le financement des infrastructures en eau et plus globalement sur le dispositif général d’aides aux communes. L’élue de droite et maire de Taglio-Isolaccio s’est faite le relais de l’inquiétude des maires devant les retards engendrés par la mise en place de la collectivité unique. Le président du Conseil exécutif, Gilles Simeoni, a rassuré, tout en expliquant que les budgets étaient contraints. Explications, pour Corse Net Infos, de Marie-Thérèse Mariotti.



Marie-Thérèse Mariotti, conseillère territoriale du groupe « Per l’Avvene », et maire de Taglio-Isolaccio.
Marie-Thérèse Mariotti, conseillère territoriale du groupe « Per l’Avvene », et maire de Taglio-Isolaccio.
- Quel est le problème au niveau du financement des infrastructures en eau ?
- Les dernières précipitations ne doivent pas occulter le fait que les changements climatiques avec des périodes de sécheresse intense ont des répercussions sur notre rapport à la ressource en eau. Nos habitudes de consommation sont à revoir. La ressource en eau doit être gérée avec une extrême rigueur. Paradoxalement, dans ce contexte préoccupant, 1/4 en moyenne de la production d’eau potable sur le continent s’égare dans la nature à cause des fuites et incidents sur le réseau. En Corse, ce niveau de pertes peut atteindre 50%, compte tenu de la vétusté et des mauvais rendements de nos réseaux. C’est le cas sur une partie de la commune que j’administre. Le constat est édifiant ! Il est urgent de s’attaquer à ce fléau !
 
- Comment remédier à ce problème ?
- En investissant dans la réhabilitation des captages, des ouvrages de stockage (réservoirs..), mais également dans les réseaux d’alimentation et de distribution qui peuvent être de vraies passoires. Aujourd’hui, ça se joue à l’échelle des communes. Bon nombre d’entre-elles ont élaboré un diagnostic et un schéma directeur, véritable audit de leur territoire en matière d’infrastructures d’eau potable. Le but est  d’identifier les travaux structurants, d’estimer le montant de ces travaux et de ficeler le montage financier. Ces investissements, dépassant souvent le million d’euros, sont très lourds pour les petites communes, mais ils ont toujours été très bien financés par l’Agence de l’eau, les départements et la région. La commune n’a à sa charge qu’entre 10 et 20% du montant global.
 

- Alors, pourquoi les élus sont-ils inquiets ?
- Des communes, qui n’ont jamais eu de problème de ressources en eau par le passé, vivent des situations très difficiles. Certains maires coupent personnellement l’eau, le soir, et la rétablissent le lendemain matin pour éviter la déperdition pendant la nuit. Ce qui permet de rétablir les stocks et d’assurer l’approvisionnement en eau de leurs administrés. Alors que des projets d’urgence ont été présentés lors des réunions en amont aux différents partenaires, qu’ils font souvent l’objet d’accords de principe, il reste à obtenir les accords de financement qui permettraient aux élus locaux de passer à la phase travaux et, par la même occasion, de relancer la commande publique. Outre les délais d’instruction et l’incertitude sur les niveaux de financement, des informations contradictoires ont circulé  selon lesquelles l’Agence de l’Eau réserverait ses aides aux seuls EPCI (Intercommunalités) et syndicats compatibles avec le loi NOTRe. Ce qui exclut, de facto, les communes qui auraient conservé ces compétences ou qui anticiperaient les travaux avant transfert de la compétence. Il semblerait que la Corse puisse bénéficier de dérogations.

- Qu’avez-vous demandé à l’Exécutif ?
- Que la nouvelle collectivité de Corse joue ce rôle de pilote, qu’elle soit en mesure de fournir une feuille de route et de rassurer. Comment va-t-elle se positionner sur les financements relatifs aux infrastructures d’eau potable ? Les communes vont-elles conserver le niveau d’aides cumulées de l’ex-CTC et des départements ? Quelle est la position finale de l’Agence de l’eau ? Nous demandons que soient clarifiés ces points et que soient expliquées les raisons des retards d’instruction des dossiers. J’ai voulu, avec pragmatisme et sans polémique, sensibiliser l’Assemblée sur le fait que le programme AQUA NOSTRA 2050 était, certes, très louable mais qu’il y avait des mesures urgentes à prendre pour lutter contre le gaspillage lié aux fuites et aux réseaux défectueux.
 
- Que vous a répondu l’Exécutif ?
- Il évoque le désengagement de l’Agence de l’eau et la programmation alors que semblent se profiler des restrictions budgétaires. Le Président Simeoni a confirmé que les individualisations se feraient à compter du 2ème trimestre 2018 dans le cadre du PEI (Plan exceptionnel d’investissements), tout en laissant entendre que le niveau d’intervention pourrait être moindre.

- Plus globalement, vous avez soulevé le problème des aides aux communes. Qu’est-ce qui vous préoccupe ?
- C’est, là encore, l’absence de visibilité .... Avec la suppression des départements, la collectivité de Corse est désormais le seul partenaire local des communes. Il faut donc qu’elle soit très rapidement en ordre de marche. Il faut faire ce travail d’harmonisation entre les règlements des ex-collectivités fusionnées.
 
- Que demandez-vous exactement à l’Exécutif sur ce point ?
Sous la précédente mandature nationaliste, à l’occasion des travaux de la Commission de contrôle, il avait été acté une révision du dispositif d’aides aux communes. Des précisions sur le nouveau règlement et sur le  calendrier de mise en place sont nécessaires. Nous proposons que soit également intégrée, dans le futur règlement, pour éviter les errements du passé, une notification, aux porteurs de dossiers, de la date ou de la période d’individualisation en Conseil Exécutif.
 
- Que pensez-vous de la réponse de l’Exécutif ?
- Il a confirmé que le dispositif et le montant global des aides aux communes seraient revus dans le cadre d’un exercice budgétaire qui s’annonce contraint … Le président Simeoni a assuré - et c’est la moindre des choses ! - que les arrêtés attributifs d’avant le 31 décembre 2017 seraient honorés et que les dossiers envoyés avant cette date seraient instruits selon les règlements des collectivités avant fusion. Il a confirmé qu’un règlement provisoire verrait le jour d’ici à mai/juin, ce qui paraît difficile à tenir en termes de calendrier. Si tant est que ce délai est respecté ! Quid des demandes adressées à la CDC depuis le 1er janvier 2018, ce qui va l’être avant la mise en place de ce règlement provisoire, sans parler du devenir de la dotation quinquennale par commune ? Il faut définir un cadre pérenne et vite ! Notre groupe est disposé à prendre toute sa part de responsabilité dans cette réflexion. Sans règlement, c’est une année blanche en termes d’investissement public qu’il faut craindre, Pire, c’est un examen au cas par cas avec le risque de subjectivité politique dans leur traitement.
 
Propos recueillis par Nicole MARI.