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Elle était en cavale à Porto-Vecchio en 1990 : « Katy », ex braqueuse du Gang des Amazones, revient pour du cinéma


le Dimanche 21 Septembre 2025 à 08:59

Entre janvier 1989 et juillet 1990, cinq jeunes femmes ont commis sept braquages de banque dans le Vaucluse. La presse les avait surnommées « Le Gang des Amazones ». C’est le titre du film de Mélissa Drigeard, qui a été projeté en avant-première ce samedi après-midi au Portivechju film festival, en présence de la réalisatrice. Laquelle est venue accompagnée de Fatija Maamar Djellali, qui n’est pas une actrice, mais l’une des membres du gang, interprétée dans le film par Lyna Khoudri. Il faut savoir que « Katy », comme elle se faisait appeler, a terminé sa cavale… à Porto-Vecchio. Où nous l’avons rencontrée, trente-cinq ans plus tard, à la sortie de la projection du « Gang des Amazones ».



Il y a trente-cinq ans, Fatija Maamar Djellali, alias "Katy", a fait partie du Gang des Amazones. C'est son histoire, ainsi que celle des autres braqueuses, que la cinéaste Mélissa Drigeard (à droite) a porté à l'écran.
Il y a trente-cinq ans, Fatija Maamar Djellali, alias "Katy", a fait partie du Gang des Amazones. C'est son histoire, ainsi que celle des autres braqueuses, que la cinéaste Mélissa Drigeard (à droite) a porté à l'écran.
- Vous avez fait partie du gang des Amazones. Qu’avez-vous ressenti la première fois que vous avez découvert ce film (projeté au Portivechju Film Festival) ?

Ca fait trois fois que je le vois et je suis toujours aussi émue. Je me revois encore dans plein de scènes et c’est toujours aussi éprouvant pour moi, ça me prend aux tripes malgré les années. D’ailleurs je n’ai pas pu regarder la fin aujourd’hui (samedi). Je suis sortie avant, parce que je me suis effondrée, en larmes.

- Pourquoi avez-vous accueilli favorablement l’idée que l’on fasse un film sur cette période difficile de votre vie ?

J’ai eu confiance en Mélissa (Drigeard). Elle me semblait tellement sincère… J’étais sûre qu’elle ferait quelque chose de bien, et c’est le cas, puisque je suis toujours autant émue, trente-cinq ans après.

- Justement, trente-cinq ans ont passé depuis ces braquages. Comment expliquez-vous ce moment de basculement ?

Très jeune, j’ai vécu de l’injustice. Mineure, j’avais fait déjà les quatre cents coups. Du coup, j’avais une étiquette dans ma ville, L'Isle-sur-la-Sorgue. On ne m’a pas donné la chance de me réinsérer. Ce n’est pas parce qu’on a fait une connerie une fois qu’on va faire ça toute notre vie. 

- A quel moment avez-vous été informée que Mélissa Drigeard travaillait sur votre histoire ?

Elle nous a contactées, tout simplement. Et moi, j’ai tout de suite dit oui. Ma copine Hélène – ma complice de l’époque - était un peu réticente… Mais ça s’est super bien passé. Avec Mélissa, il y a un truc qui est passé direct. Elle nous laisse nous exprimer, sans jamais nous couper. Ce qui fait que j’ai accepté tout de suite.

- A l’époque, vous sachant recherchée par la police, vous êtes partie en cavale… en Corse.

« Oui, exactement. Les gendarmes d’Avignon sont venus me chercher ici, à Porto-Vecchio. J’allais me cacher à la plage. A l’époque, j’étais jeune, belle et bronzée. Du coup, j’allais au milieu des touristes. Je me disais que les gendarmes ne viendraient pas me chercher là. Mais je voyais que les gens qui m’entouraient finissaient par se faire arrêter. Je me suis dit : il se passe un truc. Et je me suis faite balancée. Quand ils m’ont arrêtée, c’était deux ans après les événements du gang des Amazones.

- Pourquoi aviez-vous choisi la Corse pour vous faire oublier ?

« J’étais venue au mariage d’une amie et ça m’avait plu. Je me suis dit : tiens, là-bas, j’aurai du boulot. J’étais pas cataloguée. J’ai aimé cette ville de Porto-Vecchio et j’ai voulu y revenir pour y vivre, tout simplement. J’ai été serveuse, j’ai fait plein de boulots différents. J’avais posé les armes et j’avais remis les talons.

- A ce moment de votre vie, avez-vous commencé à regretter ce que vous aviez fait ?

Non. On n’a tué personne, on n’a blessé personne. Dans le film, c’est vrai que c’est un peu violent quand elles (les actrices) rentrent dans les banques. Mais ça, c’est de la fiction. Nous, on parlait aux gens en douceur. On leur disait qu’on voulait juste l’argent et qu’on n’allait pas leur faire de mal. Donc je n’ai rien à regretter. Mais oui, j’ai dû traumatiser des gens. Ca me fait de la peine et je m’en excuse. 

- Etes-vous restée en contact avec vos anciennes complices ?

Non. Juste Carole et Hélène.

- Et votre sœur Malika (reconnue coupable, également, NDLR) ?

Je n’ai pas trop de contacts. Il faut dire que je ne me suis jamais très bien entendue avec elle. Et puis surtout, elle m’en veut parce qu’elle a morflé pour rien. 

- Ce film, est-ce un moyen pour vous de tourner définitivement la page de cette période de votre vie ?

Il y a longtemps que j’ai tourné la page. J’étais jeune et inconsciente. J’ai grandi au milieu de l’argent facile.

- Que faites-vous aujourd’hui ?

Je suis à la recherche d’un emploi. Toujours... Mais je garde espoir.

- Vous n’avez jamais récidivé ?

Non, mais j’aurais pu. Pas mal de personnes du grand banditisme sont venues me contacter pour que je fasse des trucs avec eux. Mais à partir du moment où j’ai eu deux enfants, j’ai dit non. Stop.

« Katy » et les quatre autres accusées soupçonnées de faire partie du Gang des Amazones ont été condamnées en septembre 1996 par la cour d’assises de Carpentras à des peines de prison courtes, assorties de sursis. Le butin de leurs braquages s’était élevé à 300 000 francs (environ 80 000 euros).





 

Le film "Le Gang des Amazones" a été présenté par Fatija Maamar Djellali et Mélissa Drigeard, samedi, lors du Portivechju Film Festival.
Le film "Le Gang des Amazones" a été présenté par Fatija Maamar Djellali et Mélissa Drigeard, samedi, lors du Portivechju Film Festival.
Mélissa Drigeard évoque sa collaboration avec les ex-braqueuses

Dans l’idée de faire un film inspiré de ce fait divers, la cinéaste se dit qu’elle doit rencontrer les ex membres du Gang des Amazones : « J’ai réussi à contacter Hélène Trinidad par Facebook et je suis descendue à L’Isle-sur-la-Sorgue deux jours plus tard et j’ai rencontré Katy, Hélène, Malika. Puis Laurence un peu plus tard. Et là, j’ai compris que c’était plus qu’un fait divers : un très beau sujet de société. J’ai dû les convaincre, et elles sont devenues des amies. Dans notre rencontre, ça a été immédiat. Je ne suis pas proche de la réalité, mais j’ai essayé d’être au plus proche de la vérité. » Mélissa Drigeard tient à ce que ces ex braqueuses l’accompagnent pour la promotion du film : « Là, j’étais avec Katy. Et avec Hélène, je vais aller à Cinemed à Montpellier. Je les emmène avec moi, parce que c’est leur histoire. »