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Agression de Corte : trois hommes condamnés à 18, 12 et 6 mois de prison


Léana Serve le Jeudi 18 Décembre 2025 à 19:41

Le tribunal correctionnel de Bastia a condamné ce jeudi Rayane El Abar, 20 ans, Omar Baka, 18 ans et Florian Bettini, 18 ans à 18, 12 et 6 mois de prison. Ils étaient poursuivis pour l’agression de quatre jeunes adultes à Corte dans la nuit du 31 octobre au 1er novembre.



Agression de Corte : trois hommes condamnés à 18, 12 et 6 mois de prison

Au terme de quatre heures d’audience et d’un peu plus d’une heure de délibération, le tribunal correctionnel de Bastia a condamné ce jeudi Rayane El Abar, 20 ans, Omar Baka, 18 ans et Florian Bettini, 18 ans pour « violences en réunion n’ayant pas entraîné une incapacité de travail de plus de huit jours » et « violences en réunion ayant entraîné une incapacité de travail de plus de huit jours ». Le premier a écopé de 18 mois de prison dont 10 mois avec sursis aménagés sous bracelet électronique, le deuxième de 12 mois de prison dont six mois avec sursis aménagés sous bracelet électronique, et le troisième de six mois de prison avec sursis.

L’affaire remonte à la nuit du 31 octobre au 1er novembre, en plein centre de Corte. Quatre jeunes adultes - deux hommes et deux femmes - ont été attaqués par un groupe d’une dizaine d’individus devant un établissement de nuit. Les victimes, venues participer aux festivités d’Halloween, avaient déposé plainte après avoir subi des violences que les enquêteurs ont qualifiées de « particulièrement brutales ». Les investigations, menées par la gendarmerie, avaient conduit à plusieurs gardes à vue. Trois hommes avaient finalement été retenus par le parquet et placés en détention provisoire dans le cadre d’un procès en comparution immédiate. Le 10 novembre, le procès avait finalement été renvoyé, et les trois hommes restaient en détention à la maison d’arrêt de Borgo.


Des versions divergentes à la barre

Lors de l’audience, le tribunal est longuement revenu sur le déroulé des faits, précisant notamment que Rayane El Abar se trouve en état de récidive légale après une condamnation au mois de février 2024 pour des faits de violence en réunion. Des vidéos montrant une partie de l’agression ont ensuite été diffusées à la salle. À la barre, les trois prévenus ont tour à tour livré leur version des faits. Admettant avoir donné des coups, Rayane El Abar explique que l’altercation a débuté « après qu’Omar se soit fait pousser et quand j’ai voulu les séparer ». Lors de la diffusion de la vidéo, il affirme se reconnaître sur les images, mais ne pas reconnaître les deux autres prévenus à ses côtés.
 

Omar Baka, lui, affirme « avoir bousculé l’une des victimes sans faire exprès » et « ne pas avoir eu le temps de [m]’excuser », quelqu’un arrivant pour le pousser. « L’une des victimes m’a attrapé le pied et j’ai porté un coup de pied par réflexe », a-t-il affirmé en lien avec l’agression. Enfin, Florian Bettini nie son implication dans la rixe, indiquant être resté devant un autre établissement de nuit avec l’un de ses amis « à terre ». « J’ai appelé les pompiers, et quand il est parti à l’hôpital, je suis resté avec les filles pour chercher la personne qui l’avait frappé. » Concernant l’agression, il affirme « avoir vu la scène mais ne pas avoir participé ».
 

Trois des victimes ont ensuite tenu à s’exprimer, la quatrième n’était pas présente lors du procès. Anthony raconte être « traumatisé » et se dit « chanceux d’avoir oublié des parties de la soirée ». « Quand on en a évoqué des moments, j’ai ressenti des palpitations et une légère crise de panique. Le procès fait remonter des souvenirs, j’ai vécu ça comme un acharnement. » Matteo a quant à lui indiqué « ne pas savoir se battre ». « On n’est pas des grands bagarreurs, et on se retrouverait à deux contre cinq ou six à traiter les gens ? C’est nul, et même honteux d’utiliser ça en défense. » Lorsque son avocate lui demande s’il confirme que les trois prévenus les ont bien agressés ce soir-là, il l’affirme formellement.


Enfin, Maya a soulevé « énormément d’incohérences dans le récit des trois prévenus ». Elle aborde « deux moments choquants » : « voir Rayane El Abar me sauter dessus alors que je tirais Matteo de la bagarre » et le fait « de devoir me mettre face à mon ami Anthony en bouclier parce que j’avais peur qu’ils viennent à nouveau ». « Chaque fois qu’on essayait de partir, l'un des trois venait nous traquer et nous violenter. Jamais de ma vie je n’aurais pensé vivre ça, mon avenir est mis en jeu à cause d’eux. Je veux être pilote de ligne, mais je suis obligée d’être suivie par une psychologue parce que des scènes me rappellent la violence que j’ai vécu. Je me disais qu’ils ne s’arrêteraient jamais. »


« Une scène de violence » pour le parquet et les parties civiles

Me Mélanie Junginger-Cristiani, avocate des victimes, s’est dite « étonnée des déclarations des prévenus ». « L’audience était importante pour les victimes que j’assiste et malheureusement elles vont partir de cette audience avec des personnes qui minimisent ce qu’elles avaient déclaré », a-t-elle indiqué, précisant que les trois parties civiles « attendaient que les faits soient reconnus et développés avec un minimum de conscience des choses ». « Les victimes ont vécu quelque chose de traumatisant. Si en face on n’est pas capable de se mettre à la place de l’autre, les trois victimes ont eu peur des coups et de la violence extrêmement importante. On a affaire à un lynchage. »

Dans ses réquisitions, le parquet a évoqué « une scène de violence » sur laquelle le tribunal devait se prononcer. « Du côté du parquet il n’y a pas de doute : les prévenus ont participé à la scène en deux temps », a souligné Anouk Bonnet, avant de requérir six mois de prison avec sursis, une obligation de travailler et une interdiction de détenir une arme pendant cinq ans pour Florian Bettini, 12 mois de prison dont six mois fermes aménagés et six avec sursis, une obligation de travailler et une interdiction de détenir une arme pendant cinq ans pour Omar Baka, et deux ans de prison dont six mois avec sursis, une obligation de soins, de travailler, une interdiction de détenir une arme pendant cinq ans,ainsi qu’une révocation du sursis de quatre mois prononcés à son encontre pour Rayane El Abar.


La défense demande « de recentrer les choses »

Me Sara Lorre, conseil de Florian Bettini, a insisté sur « la rumeur et le bouche-à-oreille » autour de son client. « Je doute qu’il se soit trouvé sur les lieux exacts au moment des faits, personne ne le décrit physiquement. Il faut s’intéresser à sa tenue vestimentaire ce soir-là. Vous devez statuer sur la culpabilité de M. Bettini, mais le doute existe, et le doute profite au prévenu », a-t-elle avancé, plaidant la relaxe de son client, qui, « s’il est déclaré coupable, ne pourra pas faire l’armée ».

Me Djeneba Soumahoro Jochmans, avocate d’Omar Baka, a quant à elle demandé au tribunal « de rendre sa dimension à ce dossier ». « Celui-ci est rythmé par les réseaux sociaux et par les victimes qui font des déclarations assez surprenantes : toutes expliquent, le 1er novembre, ne pas reconnaître leurs agresseurs, et quelques jours plus tard, elles expliquent que la rumeur leur a donné des noms. » Elle a plaidé pour « une peine qui lui donne le droit de continuer à vivre sa vie ».
 

Enfin, Alexandrine Perez, conseil de Rayane El Abar, a insisté sur « l’importance de recentrer les choses ». « La confusion est le maître-mot de ce dossier. À 20 ans, il a vécu sa première incarcération, un mois qui lui a permis de réfléchir aux priorités qui sont les siennes », a-t-elle expliqué, indiquant que son client « a à cœur de rendre fière sa mère » ayant « verbalisé des regrets et des excuses aujourd’hui ». Elle a demandé « un placement sous surveillance électronique si besoin ».
 

Les prévenus ont finalement été condamnés après quatre heures d’audience et plus d’une heure de délibération.