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DSP maritime 2023-2029 : Pour Gilles Simeoni "la priorité était la sécurisation"


Naël Makhzoum le Vendredi 16 Décembre 2022 à 19:22

Le rapport sur la Délégation de Service Public (DSP) pour le transport maritime entre l'île et le continent concernant la période 2023 -2029, sera présenté les 20 et 21 décembre prochains en session de l’Assemblée de Corse. Gilles Simeoni, qui en est à l'origine, a tenu à en rappeler les enjeux. En martelant que "les objectifs prioritaires ont été atteints."



Flora Mattei et Gilles Simeoni - Photo Michel Luccioni
Flora Mattei et Gilles Simeoni - Photo Michel Luccioni
Dans le camp de la majorité, on ne peut que satisfaire du travail accompli. C'est ce que n'a cessé de répéter le président de l'Exécutif face à la presse, aux côtés de Flora Mattei, présidente de l’Office des Transports de Corse (OTC), dans la matinée du vendredi 16 décembre. Finalisé avec deux mois de retard, le rapport adoubant la DSP maritime relève pourtant plusieurs points de doute. L'idée d'une compagnie maritime territoriale - initialement prévue pour le 1er janvier 2023 - semble s'éloigner un peu plus, avec une DSP qui pourrait être mise en place pour les sept prochaines années en cas d'approbation par l'Assemblée de Corse.

Mais pour Gilles Simeoni, l'essentiel est là. "La plupart des objectifs stratégiques que nous nous étions fixés au début de la discussion, notamment avec l'État et la Commission européenne sont aujourd'hui atteints avec ce contrat, clame-t-il. Nous aurons pour la Corse un service public maritime de qualité pendant les sept prochaines années, avec une desserte maintenue dans les cinq ports de l'île et à un prix du mètre linéaire transporté pour le fret, diminué de moitié par rapport à ce qui était fait avant 2015. En ayant réussi à maintenir l'emploi et à démontrer qu'il y avait besoin de service public, l'essentiel des objectifs est atteint !"

Un contrat "inattaquable"

Après des discussions longtemps compliquées avec la Commission européenne, la Collectivité a finalement obtenu sa confiance, avec l'appui du ministre des Transports, Clément Beaune. "Le contrat est définitivement validé en droit interne, prône fièrement Gilles Simeoni. Nous avons obtenu un accord de principe de la Commission européenne et le soutien explicite de l'État qui considère que ce contrat est juridiquement inattaquable."

En clair, la Collectivité peut se targuer d'avoir écrit noir sur blanc le maintien de toutes les dessertes de service public reliant Marseille aux cinq principaux ports de Corse. Marseille-Aiacciu continuerait d'être assuré quotidiennement par le groupement Corsica Linea/La Méridionale - un soir sur deux pour chaque compagnie -, tout comme Marseille-Bastia par la Corsica Linea. Les trois autres ports conserveraient un trajet trois jours sur sept, assurés par la Corsica Linea pour Lisula et Proprià (récupéré à La Méridionale), et par La Méridionale pour Marseille-Portivechju (récupéré à la Corsica Linea).

Cette nouvelle DSP, pour les sept prochaines années, permettrait donc la continuité des services en place, tout en conservant un coût raisonnable pour le fret, passé d'environ 70 à 80€ il y a sept ans à 40€ aujourd'hui.

Contre-la-montre et dépendance continentale

Reste que si la Collectivité se satisfait des certitudes, le doute plane encore quant à la possibilité de voir, un jour, exister la compagnie maritime territoriale tant réclamée par les nationalistes avant le début de leur mandature. "C'est une course contre-la-montre permanente et en quatre ans, on n'aurait pas eu le temps de monter la compagnie régionale, assure Gilles Simeoni. Il faut d'abord démontrer à l'Europe pendant le vécu de ce contrat que notre analyse "théorique" fonctionne, finir de crédibiliser notre démarche par les faits. Quand on a mis en place la Semop, on a eu une réponse à l'appel d'offres avec deux opérateurs à 140 millions d'euros. On aurait pu avoir la compagnie régionale à ce moment en cas de vote favorable de l'Assemblée, mais c'était inacceptable à ce prix !"

Alors face à la dépendance vis-à-vis du continent, la question d'un changement dans les choix et les modes d'actions actuels se pose. "La situation est structurellement difficile car nous sommes dépendants à 90% des importations, rappelle le président de l'exécutif. Il y a besoin d'évolutions de fond : développer notre autonomie alimentaire, diversifier nos circuits d'approvisionnement, réfléchir à notre schéma portuaire, mais ça prend du temps. Et d'ici-là, le service public doit être assuré dans les meilleures conditions."

Sept ans de questions

Mais au regard de l'importance des enjeux climatiques et écologiques actuels, cette DSP sur la période 2023-2029 pose question. Et malgré les assurances de "pénalités financières" en cas de non-respect de l'environnement, la desserte maritime en Corse semble bien loin du verdissement espéré. "On n'est pas dans une compagnie verte, mais on ne pouvait pas l'être, se défend Gilles Simeoni. La facture allait exploser si c'était le cas." 

Sauf que dans sept ans, l'addition risque d'être encore plus salée, au moment où la compagnie pourrait - ou devrait - enfin voir le jour. Difficile d'imaginer des conditions financières satisfaisantes en adéquation avec les réponses écologiques attendues.

"De toute manière, il faut réfléchir sur l'outil naval, enchaîne Gilles Simeoni. Peut-on faire une société d'investissement nous permettant d'acquérir un outil naval dans des conditions financières plus avantageuses que celles par un délégataire qui nous le met à disposition ? Quelles marges sur la société d'exploitation ? Ces structures sont-elles prêtes à en faire des structures dédiées, plus petites, par rapport à nos attentes et ce qu'on peut raisonnablement faire ? Va-t-on monter en puissance pour diminuer le fret ? Inviter les acteurs à diversifier les approvisionnements ? A-t-on vocation dans quinze ans à encore avoir cinq ports ?"

Autant d'interrogations qui montrent que si l'essentiel serait assuré avec la sécurisation de la desserte pour les sept ans à venir, la question de la compagnie territoriale est loin d'être résolue.