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Bastia : un détenu aux Assises pour l'agression de deux gardiens de Borgo


La rédaction avec AFP le Dimanche 14 Novembre 2021 à 21:47

Un détenu sera jugé à partir de lundi à Bastia pour tentative d'assassinat sur deux gardiens qu'il avait attaqués à l'arme blanche en 2018 à la prison de Borgo, en plein mouvement des agents pénitentiaires pour davantage de sécurité.



Protestation des gardiens du centre pénitentiaire de Borgo à l'arrivée du Garde des Sceaux quelques jours après l'agression de 2 de leurs collègues (Archives CNI)
Protestation des gardiens du centre pénitentiaire de Borgo à l'arrivée du Garde des Sceaux quelques jours après l'agression de 2 de leurs collègues (Archives CNI)
La Garde des Sceaux de l'époque, Nicole Belloubet, s'était rendue sur place et avait été sifflée (notre vidéo) par le personnel qui avait ensuite bloqué l'établissement pendant plusieurs jours. Elle s'était engagée à "apporter des réponses" en matière de sécurité des gardiens et de gestion des détenus radicalisés.
L'agression de Borgo, le 19 janvier 2018, avait eu lieu quelques jours après l'attaque par un détenu jihadiste de trois gardiens à Vendin-le-Vieil (Pas-de-Calais) qui avait déclenché un vaste mouvement national de grève, avec jusqu'à 120 établissements bloqués sur 180.
Mais si à Vendin-le-Vieil, le parquet national antiterroriste a requis le renvoi pour tentative d'assassinat terroriste, il ne s'était pas saisi pour Borgo.


A Borgo, Morad Akaouch, aujourd'hui âgé de 32 ans, s'était "drapé d'un drapeau palestinien" et avait crié "Allah Akbar", selon plusieurs témoins, après avoir agressé à l'arme blanche les deux gardiens.
Mais s'il "faisait l'objet d'une enquête de radicalisation", selon la procureure de Bastia, Caroline Tharot à l'époque, l'enquête a ensuite permis de dresser le portrait d'un homme ayant une "pratique soutenue de la religion musulmane" mais qui n'a "jamais essayé d'entrer en contact avec des groupes terroristes" et a "dénoncé avec un ancien détenu les attentats qui donnaient une mauvaise image de l'islam".

"Accès de colère"

  "Cette suspicion de radicalisation est démentie par notre client", a précisé à l'AFP Me Lola Dubois qui assure la défense de M. Akaouch avec Me Yassine Maharsi. Jugé jusqu'au 19 novembre devant la cour d'assises de la Haute-Corse à Bastia devant laquelle il encourt la réclusion criminelle à perpétuité.
Il est accusé d'avoir "tenté de donner volontairement la mort" avec préméditation à deux gardiens de prison qu'il a blessés à de multiples reprises à la tête, au niveau des cervicales et des clavicules, "des zones vitales" selon l'accusation.
Celle-ci pointe des écoutes téléphoniques montrant qu'il a demandé à sa compagne de l'époque de "lui procurer un couteau en céramique". "Son comportement dans les instants précédant les faits", mis en évidence par les images de vidéosurveillance, "démontre suffisamment le projet qu'il avait", estime l'accusation pour qui les deux gardiens "ne doivent leur survie qu'à l'intervention d'autres détenus".
Sans contester les agressions, l'accusé a affirmé lors de l'instruction que son acte n'était pas prémédité et dément avoir eu "l'intention de tuer", évoquant "un accès de colère" lié au traitement que lui faisait subir les gardiens notamment lors d'une fouille de sa cellule, la veille des faits.
Il accusait notamment les agents agressés d'avoir "marché sur son lit" et assurait s'être vu refuser des soins.

Pour Me Lola Dubois qui rejette "toute préméditation", son acte "peut peut-être se comprendre par une forme de pression qui a été exercée pendant quelques années".
"Notre souhait est qu'il puisse être jugé sereinement, qu'il puisse s'exprimer et enfin être confronté aux parties civiles", a-t-elle ajouté.
"Il est important que les deux gardiens agressés puissent s'exprimer et que la justice juge ces faits à l'aune de leur gravité et de la souffrance endurée par ces fonctionnaires de l'administration pénitentiaire", a quant à lui déclaré à l'AFP, l'avocat de l'un des deux gardiens, Me Jean-Sébastien De Casalta.
Morad Akaouch était détenu au moment de l’agression pour une condamnation en appel en novembre 2015 à huit ans de prison pour violences volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner.