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Xylella : La liste des espèces végétales interdites sera fixée par le président de l’Exécutif corse


Nicole Mari le Jeudi 24 Janvier 2019 à 17:02

Victoire à l’arraché pour les trois députés nationalistes qui ont réussi, jeudi matin, à faire voter un amendement stipulant que la liste des espèces végétales et animales interdites en Corse soit désormais fixée par le président du Conseil exécutif de la Collectivité de Corse (CdC), et non plus comme c’est le cas aujourd’hui par le Préfet. L’amendement a été voté en première lecture lors de l’examen à l’Assemblée nationale du projet de loi créant un Office de la biodiversité et grâce au soutien des députés ultramarins et des députés LR issus des territoires ruraux de montagne.



Les trois députés nationalistes corses, Jean-Félix Acquaviva, Paul-André Colombani et Michel Castellani.
Les trois députés nationalistes corses, Jean-Félix Acquaviva, Paul-André Colombani et Michel Castellani.
« Lutte contre Xylella : Vittoria ! ». C’est par ce cri du cœur que les trois députés nationalistes corses, Jean-Félix Acquaviva, Paul-André Colombani et Michel Castellani, ont informé sur Twitter et Facebook du vote d’un amendement très attendu. « Nous avons fait adopter un amendement ce matin en séance à l'Assemblée nationale pour que la liste des espèces végétales et animales interdites en Corse soit arrêtée, non plus par l'Etat, mais par le Président du Conseil exécutif ! Une avancée à suivre... Cette proposition vise à traduire concrètement le lien entre notre demande de transfert de compétences à la Collectivité de Corse et la solution d'un problème environnemental, sanitaire, économique concret et urgent qui se pose à la société corse », commente Jean-Félix Acquaviva qui a présenté l’amendement en séance. « La pratique en la matière démontre que la préfecture n’a pas la même politique que la CdC et que les acteurs du secteur. Le meilleur gage de préserver les intérêts du territoire et des acteurs, c’est d’avoir une politique décentralisée de proximité qui, à la fois, augmente les plans par une politique d’investissements, et qui, de l’autre, a le levier d’interdiction de l’importation des plans. Donner un plein pouvoir aux territoires est plus utile que de donner une compétence d’interdiction à l’Etat et une compétence de développement à la Collectivité ».
 
Le dur combat contre la xylella
C’est, en effet, une victoire dans la lutte contre la xylella fastidiosa et contre toutes sortes de parasites qui déciment le couvert végétal corse. Une victoire notamment pour le Collectif anti-xylella, les oléiculteurs et les élus insulaires qui ont engagé depuis quatre ans un bras de fer contre l’Etat pour imposer l’interdiction d’entrée dans l'île de tous les plants de végétaux. La bactérie, qui a ravagé des dizaines de milliers d’hectares d’oliviers dans les Pouilles italiennes, menace, par la recombinaison de ses différentes sous-espèces, lourdement les filières agricoles insulaires : oléiculture, agrumes, plantes aromatiques, vigne, amandiers… et la biodiversité : espèces endémiques, espèces rares, zones protégées... Le risque est accru par la spécificité de la biodiversité de l’île qui offre un nombre exceptionnel de plantes sensibles à la Xylella (200 à 300 espèces) sur près de 600 000 hectares de maquis. Contrairement à d’autres parasites comme le cynips, il n’y a aucun moyen d’éradiquer la bactérie et de guérir les végétaux infectés. 
Suite à la mobilisation insulaire, la Préfecture avait pris, en mai 2015, un arrêté interdisant les introductions de plantes hôtes, sauf dérogation expresse au cas par cas. Mais très vite, les agriculteurs, l’Office de l’environnement, l’ODARC et l’Exécutif nationaliste accusent l’Etat « de multiplier les dérogations sur les importations de plants à risque et de zones à risque et ne pas assurer la sécurité sanitaire de l’île ». Outre la xylella, la Corse a, aussi, été douloureusement attaquée par le cynips qui a détruit la châtaigneraie, le charançon du palmier, de nombreux parasites destructeurs (varroa, metcalfa pruinosa, cochenille du pin, etc), la fièvre catarrhale...
 
Un transfert de compétence
Face à ces risques récurrents, le 27 avril 2017, l’Assemblée de Corse vote une délibération demandant le transfert de cette compétence sanitaire à la CdC afin de «  contenir les effets néfastes sur l’environnement, la biodiversité et l’économie insulaire de l’importation et l’introduction d’espèces végétales et animales nuisibles ou porteuses de parasites et maladies ». Profitant de l’examen du projet de loi qui fusionne l’Agence française de la biodiversité avec l’Office de la chasse pour créer un Office de la Biodiversité, les trois députés nationalistes ont relayé cette demande à travers un amendement qui stipule que « la liste de tout spécimen interdit d’espèces végétales à la fois non indigènes au territoire de la Corse et non cultivées est fixée par le président du Conseil exécutif, après avis du Conseil scientifique régional du patrimoine naturel ». Et justifient : « Dans le cadre général du renforcement du processus de transfert des compétences de l’État vers la collectivité de Corse ou les collectivités à statut particulier, il est important que ce type de décision, découlant de problématiques très territorialisées et spécifiques, soit pris par les autorités publiques territoriales, au près des problématiques ayant trait à la sauvegarde de la biodiversité ».

Des arguments convaincants
Les députés corses ont, également, fait jouer « le besoin de développer et de privilégier une production locale de plants, faite de variétés endémiques corses notamment. Il s’agit ici d’une nécessité aussi bien sanitaire qu’économique. A long terme, la Collectivité de Corse a pour ambition de poursuivre les efforts en faveur de la production agricole et horticole en ce sens. D’ores et déjà, avec l’Office de l’Environnement de la Corse et le Conservatoire botanique, a  été créée une marque « Corsica grana » destinée à certifier les plantes et semences produites en Corse à partir de matériel végétal issu de populations insulaires sauvages et à assurer leur traçabilité. Ainsi, toute mesure visant à préserver la biodiversité locale et à lutter contre les invasions biologiques et les phénomènes de pollution génétique est à encourager ». Ces arguments ont convaincu une majorité de députés présents dans l’hémicycle, ceux des territoires d’Outre-mer, les élus LR issus du rural et de la montagne, mais aussi deux députés LREM… Ce qui a permis à l’amendement d’être adopté malgré l’opposition du gouvernement. Il sera, donc, examiné au Sénat, avant de revenir en 2ème lecture devant l’Assemblée nationale. Les députés corses ont bien l’intention de suivre de près la navette.

N.M.