Corse Net Infos - Pure player corse

Salles d’attentes désertées, consultations annulées : le Covid-19 vide les cabinets médicaux de Corse


Livia Santana le Mercredi 15 Avril 2020 à 20:06

Le confinement a vidé les salles d'attentes des médecins généralistes en Corse. Par peur d'attraper le virus, les patients atteints de maladies chroniques ont déserté les cabinets médicaux. Le docteur Antoine Grisoni, président de l’URPS Médecins Libéraux de Corse et médecin généraliste à Solenzara alerte sur la situation.



Salles d’attentes désertées, consultations annulées : le Covid-19 vide les cabinets médicaux de Corse
- Depuis le confinement avez-vous remarqué une baisse de votre activité ? 
- Oui très nette, dans les deux à trois jours après le début du confinement les cabinets médicaux ont été désertés. Pour ma part j'ai constaté une baisse entre 70 et 80% de mon activité. 

- Pourquoi les personnes ne viennent-elles plus ?
-  Les raisons sont diverses. Le confinement a poussé les gens à ne plus sortir et à en oublier leurs rendez-vous médicaux car le message "restez chez vous" était assez injonctionnel si je puis dire. Ensuite il y a les personnes qui prennent le confinement très au sérieux et qui pensent que même les visites chez les médecins sont interdites. La grande majorité des gens a peur de venir et d'attraper le virus ou alors les gens craignent de nous y exposer. Ce qui arrive bien souvent c'est que les gens reportent leurs visites. 

- Le manque de matériel peut-il en être la cause ? 
- C'est un facteur qui peut rentrer en compte oui. C'est sûr que voir un médecin avec un sac poubelle comme sur blouse ça peut vous refroidir. De même, voir un médecin sans masque ça ne met pas en confiance. Le manque de matériel est généralisé et nous n'avons pas été épargnés. 

- Quelles sont les dangers de ne plus consulter ? 
- Pour les patients atteints de pathologies chroniques il est nécessaire d'avoir un suivi régulier de leur maladie, d'effectuer des ajustements aux traitements. De nombreuses personnes ne continuent pas les soins et ne consultent plus ce qui est dangereux. Ce n'est pas parce que nous sommes confinés que les autres maladies s'arrêtent. Par exemple, l'appendicite arrive même pendant le confinement mais les évènements un peu aigus sont négligés par peur de se rendre chez le médecin ou à l'hôpital. On va dire que les gens s'auto-censurent sur ce qui n’est pas urgent sans demander d'avis médical. Ce n'est pas à eux de décider s’ils doivent venir ou pas mais aux médecins. Beaucoup de pathologies nous auront échappé et tout l'enjeu du déconfinement sera de soigner nos patients. 

 - La télé-consultation peut-elle être la solution ? 
- Au début de la crise, mon secrétariat a reçu énormément d'appels. Souvent les personnes nous contactaient pour des questions principalement sur le Coronavirus. La télé-consultation quant à elle a augmenté, je n'ai pas les chiffres mais je dirais qu'elles ont été multipliées par 10 ou 15. Cependant je ne pense pas que cela soit une solution, c'est mieux que de ne pas venir du tout mais en visio ou au téléphone on ne peut pas régler tous les problèmes. Prenons l'exemple d'un ventre douloureux, en télé-consultation il manquera la partie examen clinique qui est parfois indispensable. Nous devons proposer ce service mais il ne compensera pas l’activité normale. 

- Quelles conséquences aura la crise sanitaire sur la profession ? 
- Beaucoup de spécialistes n'ont plus de patients. On vit une situation de pénurie absolue pour les médecins mais aussi les paramédicaux. Prenez les diététiciennes, podologues, kinésithérapeutes... eux n'ont pratiquement plus de travail. Nous craignons qu'après le Coronavirus beaucoup de praticiens anticipent leur départ à la retraite mais aussi que de jeunes médecins diffèrent leur installation. Il va falloir faire face à l'après-crise.