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Proposition de loi contre le narcotrafic : les députés corses à la recherche d’un équilibre


le Mardi 18 Mars 2025 à 18:32

L'Assemblée nationale a entamé ce lundi l'étude de la proposition de loi sur le narcotrafic. Ce texte dont l'objectif est de trouver les voies et moyens pour lutter plus efficacement contre la criminalité organisée avait recueilli l'unanimité au Sénat. Il semble toutefois plus discuté au sein du Palais Bourbon. Dans cette dynamique, s'ils saluent l'objectif de cette proposition de loi, les députés corses oscillent ainsi entre volonté de renforcer l'arsenal judiciaire tout en préservant les libertés individuelles.



(Crédit photo : Assemblée nationale)
(Crédit photo : Assemblée nationale)
« La difficulté de cette proposition de loi est de parvenir à mettre le curseur au bon endroit ». La formule de François-Xavier Ceccoli, le député de la 2nde circonscription de Haute-Corse, résume à elle seule toute la difficulté à laquelle devra faire face l’Assemblée nationale au cours des prochains jours afin de taper fort sur la criminalité organisée, sans pour autant toucher aux libertés individuelles. Depuis ce lundi, l’hémicycle du Palais Bourbon étudie en effet la proposition de loi « pour sortir la France du narcotrafic » adoptée par les Sénateurs le 4 février dernier. 
 
Si ce texte qui vise à renforcer l’arsenal législatif pour lutter contre un mal qui n’a de cesse de progresser en France avait recueilli l’unanimité du côté du Palais du Luxembourg, les députés se montrent en revanche plus frileux sur certaines dispositions. « La France est largement au retard au niveau du droit sur les outils de lutte contre la grande criminalité. Il va falloir être vigilants pour que la loi n’empiète pas sur les libertés, mais d’un autre côté le niveau d’emprise mafieuse et des trafics a une telle importance aujourd’hui qu’il est difficile de ne pas aller vers des outils adaptés », souligne ainsi Paul-André Colombani, le député de la 2nde circonscription de Corse-du-Sud. 
 
Dans cette dynamique, la commission des lois de l’Assemblée nationale s’est déjà montrée favorable à des mesures phares, comme la création d’un parquet national anti-criminalité organisée. Mais elle a dans le même temps écarté certaines dispositions jugées liberticides à l’instar de la possibilité d’activer à distance des objets électroniques au premier rang desquels les téléphones, afin d’écouter et de filmer les personnes surveillées à leur insu, tout comme la création d’un « dossier-coffre » inscrite dans l’article 16 de la proposition de loi qui ouvrait la possibilité de priver les avocats d’éléments sensibles des enquêtes comme les techniques de surveillance, afin que leurs clients ne sachent pas comment ils ont été confondus. 
 
Ces mesures controversées pourront toutefois refaire surface en séance publique à la faveur des quelques 973 amendements déposés pour tenter de trouver un juste équilibre. Parmi eux, une vingtaine seront portés par les députés insulaires, qui se feront notamment la voix des deux collectifs anti-mafia. Ainsi, Xavier Lacombe, le député de la 1ère circonscription de Corse-du-Sud, plaidera pour apporter au statut de collaborateur de justice plus de garanties, afin de le rendre plus sécurisant. Dans le même objectif, Paul-André Colombani défendra aussi deux amendements portant sur l’évolution de ce statut du « repenti ». « C’est l’outil principal pour lutter contre la criminalité organisée à mon sens », affirme-t-il en nuançant toutefois : « On part d’une version très large du Sénat qui donnait une impunité quasi-totale aux repentis, donc cela est très difficile à accepter même moralement. La version de la commission inclut l’élargissement du statut de repenti aux crimes de sang, mais on va quand il y aura tout de même un attrait sur la réduction de peine ».
 
Pour sa part, Michel Castellani, le député de la 1ère circonscription de Haute-Corse, portera un amendement relatif à la confiscation obligatoire des biens supérieurs à 100 000 euros dont l’origine ne peut être justifiée. Une mesure face à laquelle François-Xavier Ceccoli se dit « dubitatif ». « En matière de confiscation, j’estime que la systématisation de certaines procédures enlève aux juges leur pouvoir d’appréciation en la matière », explique-t-il en appuyant : « Je pense que les magistrats ne sont pas forcément connus pour être tendres dans le domaine de la grande criminalité et qu’il faut donc leur laisser la capacité d’analyser au cas par cas. Tout systématiser n’est pas forcément faire preuve de justice et de justesse ». 

Afin de parvenir à trouver un consensus sur l'ensemble de la proposition de loi, les débats se poursuivront dans l'hémicycle jusqu'à vendredi. Avant un vote solennel du texte prévu le 25 mars.