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Parlons-nous trop de sexe ?


Bianca le Samedi 16 Février 2019 à 12:00

Dans un récent courrier, un lecteur m’a fait remarquer que la sexualité devrait rester de l’ordre du domaine privé et que notre société part à la dérive. Alors je m’interroge : parlons-nous trop de sexe ?


Chaque semaine, je vous parle de ce que j'entends dans les bars, chez le coiffeur, au sport ou sur le port. Je réagis à vos confiances...avec l’espérance folle, mais pas désespérée, de vous faire réagir.
cartabianca@corsenetinfos.corsica



Sans rentrer dans un cours d’histoire exhaustif*, on sait basiquement que les religions font des plaisirs de la chair un tabou, que rois et reines enchainaient les amants, que les Liaisons dangereuses mettent en avant la société débridée du XVIIIe siècle, que choqué par ce passé sulfureux le XIXe a remis un peu de morale dans tout ceci et que, malgré les années folles et mai 1968, on reste quand même sur la pointe des pieds lorsqu’il s’agit de parler de ce qui fait tourner le monde et particulièrement internet : le sexe.
 
On en parle, c’est vrai, mais il ne faut pas confondre deux choses : le fait de parler de sexualité et le fait de présenter des contenus osés, voire sexistes au grand public. Après avoir longtemps été mis sur le banc de touche, le sexe fait maintenant partie des discussions quotidiennes, les grandes radios regorgent d’émissions spécialisés sur le cunnilingus ou la fellation sans parler des forums qui questionnent sans cesse les pratiques des uns et des autres.
 
Et si aujourd’hui le besoin d’introduire le sexe dans nos conversations se fait sentir, c’est qu’il s’agit bel et bien d’un phénomène qui rassemble, qu’on a besoin de libérer et cela passe aussi par la parole. Or, discuter de la sexualité revient à parler de la partie la plus intime qui soit, dont nous ne sommes pas sûr, justement parce qu’elle reste cachée et la mettre en comparaison. Serait-ce celle-ci qui nous mette mal à l’aise ? Les mœurs ayant évolué, aujourd’hui on en parle, on compare et ça fait du bien ! Eliane, 55 ans, m’expliquait qu’elle trouvait génial d’oser tomber les tabous « A mon époque on ne parlait pas de ces choses-là alors que j’aurais bien aimé savoir quand j’étais jeune mariée que mes amies aussi avaient des mycoses ! ». C’est là tout l’avantage de pouvoir s’exprimer sans crainte sur la sexualité. Certes, la comparaison fait peur mais elle rassure aussi toutes celles et ceux qui s’interrogent sur leur normalité. Car c’est bien de cela qu’il s’agit : suis-je pareil ? 
 
Dans ce domaine-là, il semble que les femmes soient plus à l’aise. Là où un homme répondra « c’était bien. » à « c’était bien ? », un groupe d’œstrogènes racontera plus volontiers par le menu ses ébats. Néanmoins, si certains sont plus mutiques au sujet de leur performance, d’autres n’en sont pas moins curieux. Simon, 28 ans explique que c’est une vrai frustration pour lui « Quand ma copine me dit tout ce qu’elle se raconte avec ses amies, je suis envieux. Moi aussi j’aimerais parler de ça avec des potes. Savoir comment ils le vivent, comment ils se sentent… mais c’est assez tabou entre mecs. »
 
Le genre n’a évidemment pas le monopole de la pudeur. Si certaines parlent beaucoup d’autres seront forcément plus pudiques et inversement pour les hommes. Aussi, on attribue à tort la pudeur liée au genre alors qu’il y a aussi et simplement un critère culturel. Dans une récente étude sur « Les régions les plus coquines de France », la Corse apparaît dans le bas du classement. L’enquête, basée sur la répartition de la demande en sextoys par région, n’est peut-être pas représentative du rapport au sexe en Corse, mais cela permet de relativiser la manière d’appréhender sexualité, selon l’époque, le genre et donc le lieu.
 
Au final, parlons-nous trop de sexe ? Il est souvent montré mais je ne suis pas sûre qu’on en parle tant que cela. Il a par exemple fallu attendre 2017 pour voir le clitoris faire son apparition dans les manuels scolaire, aujourd’hui la pornographie peut servir de modèle à ceux qui ne savent pas encore se servir de leur organe et l’on rougit toujours autant au cinéma quand un baiser devient baiser… Alors pourvu qu’on en parle encore !

*Nous rappelons à nos lecteurs que Bianca n’est pas historienne et qu’elle a bien conscience que l’histoire est bien plus complexe… On pense aussi que vous en avez conscience.