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Nadine Nivaggioni : « Nous demandons le départ du DRAAF »


Nicole Mari le Mercredi 13 Novembre 2013 à 22:52

Lors du débat sur le plan d’action et de développement agricole, adopté à une large majorité, vendredi dernier, par l’Assemblée de Corse, le groupe Femu a Corsica a demandé la démission du DRAAF (Directeur régional de l’alimentation, de l'agriculture et de la forêt). Rejoints par Corsica Libera et U Rinnovu, les Nationalistes dénoncent la gestion calamiteuse de la fièvre catarrhale par l'Etat et l'indemnisation partielle des éleveurs. Explications, pour Corse Net Infos, de Nadine Nivaggioni, conseillère territoriale de Femu a Corsica et administrateur de l’ODARC. Elle revient également sur le rapport voté et sur la polémique avec les Chambres d’agriculture.



Nadine Nivaggioni, conseillère territoriale de Femu a Corsica et administrateur de l’ODARC.
Nadine Nivaggioni, conseillère territoriale de Femu a Corsica et administrateur de l’ODARC.
- Pourquoi demandez-vous la démission du DRAAF ?
- A cause de la gestion de la fièvre catarrhale. Ce directeur n’est pas le bon relais pour discuter avec le gouvernement. Donc, le groupe Femu a Corsica demande son départ. L’Etat a été défaillant. Il doit assumer sa responsabilité. Aujourd’hui, ce n’est pas le cas. Il n’a que mépris face à une profession agonisante. On ne peut pas l’admettre.
 
- Que reprochez-vous à l’Etat ?
- La veille sanitaire est une responsabilité pleine et entière de l’Etat. Aujourd’hui, 130 exploitations sont touchées. Une négociation a été entamée avec le gouvernement qui propose de prendre en compte 70% des mortalités. Il ne tient pas du tout compte de la morbidité, c’est-à-dire des avortements, et des brebis qui ne produisent plus de lait. Ces brebis sont, quand même, nourries. Les éleveurs achètent, pour elles, du fourrage. Tout cet énorme manque à gagner n’est pas pris en compte. Nous disons : à responsabilité pleine et entière de l’Etat, doit correspondre 100% des indemnisations au niveau de la mortalité et de la morbidité.
 
- D’autres élus, comme Antoine Orsini du groupe Social Démocrate, ont annoncé qu’ils n’accepteraient pas une indemnisation au rabais. La fronde est-elle générale ?
- Quelle est la personne responsable, quel est l’élu politique responsable qui peut admettre ce genre de situation ! Antoine Orsini est, comme moi, administrateur de l’ODARC. Nous voyons passer des sommes très importantes pour financer les exploitations et faire en sorte que la qualité de la production soit la meilleure possible. On investit, on modernise pour que ces bêtes produisent, dans les meilleures conditions, des produits de qualité. Aujourd’hui, ce n’est plus possible ! En tant que responsables politiques, nous mettons en accusation l’Etat et nous disons qu’il doit assumer ses responsabilités.
 
- La CTC vient de voter le plan pour l’agriculture corse. Vous satisfait-il ?
- Ce plan est le résultat d’une démarche probante et très participative qui a retenu les idées innovantes. Chaque groupe a pu y retrouver un certain nombre de propositions qui lui appartenaient. Les idées que nous, Nationalistes, portant depuis plusieurs années et qui n’avaient pas été entendues sous la mandature précédente, l’ont été, cette fois-ci. Nous en sommes très satisfaits.
 
- Que retenez-vous particulièrement de ce plan ?
- D’abord, la volonté de responsabilisation. La CTC demande, aujourd’hui, le transfert de toutes les compétences agricoles. Quand nous assumerons toutes ces responsabilités, nous n’aurons plus d’excuses dans la définition de nos politiques. Ensuite, le rapport avec l’Etat est défini de façon nouvelle. On veut s’en affranchir et c’est fondamental. Enfin, le pouvoir politique se réapproprie la politique agricole. Sous la précédente mandature, souvent l’ODARC (Office du développement agricole et rural de Corse) déléguait aux corporations ou aux Chambres d’agriculture. Aujourd’hui, l’Office reprend la main. Pour nous, c’est très positif.
 
- Que pensez-vous de la stratégie agricole proposée ?
- Ce plan positionne l’agriculture sur le bon niveau stratégique et sur un format qui lui est adapté. Il ne calque plus la politique agricole insulaire sur le productivisme français ou sur les grandes cultures spécialisées avec l'organisation verticale des filières, inadaptée à une région comme la nôtre. En Corse, l’agriculteur a un rôle mutifonctionnel, l’agriculture doit être très diversifiée, le système de fonctionnement avec filières et têtes de file ne marche pas.
 
- Quels points vous dérangent ?
- Il manque le but ! Nous aurions souhaité pouvoir identifier l’objectif final. Par exemple, afficher, à 2050, une souveraineté alimentaire. Cet objectif est réalisable à travers une politique par étapes et des objectifs annuels. Il a été réalisé ailleurs, il peut l’être en Corse sous la dimension d’une agriculture paysanne raisonnée.
 
- Quel est l’objet de la polémique avec les Chambres d’agriculture ?
- Depuis le Conseil d’administration de l’ODARC, les Chambres d’agriculture sont mécontentes et ne retrouvent pas leur compte dans ce plan. Nous comprenons leur frustration puisqu’elles n’ont pas collaboré à son élaboration, mais ce n’est pas l’objet. Ce plan est celui de l’Exécutif territorial et nous ne pouvons admettre, ni une ingérence à ce niveau, ni les pressions énormes qui pèsent notamment sur le personnel. L’Assemblée de Corse est une entité politique qui doit mettre en place des stratégies sans être sous l’influence de qui que ce soit. D’autant que les Chambres et les mécontents ont eu largement la possibilité de s’exprimer et de déposer des contributions. Ils ne l’ont pas fait. Tant pis pour eux !
Propos recueillis par Nicole MARI