Le débat sur la place de la langue corse à l’école refait surface. Dans un courrier daté du 11 juin 2025, adressé à Élisabeth Borne, ministre de l'Éducation nationale, le président de la FCPE de Corse-du-Sud, Claude Perrin, exprime des inquiétudes sur les « nouvelles orientations académiques » en matière linguistique en Corse. En cause : le développement de l'enseignement bilingue français-corse, qui, selon la fédération de parents d’élèves, remettrait en question la liberté de choix des familles et le principe d’égalité dans le service public. « Nous souhaitons qu’il soit mis fin à cette démarche visant à supprimer les possibilités d’inscrire en Corse les enfants en filière d’enseignement standard », écrit Claude Perrin, estimant que la récente évolution du projet académique baptisé Scola 2030 pourrait conduire à rendre obligatoire l’enseignement bilingue dans tous les établissements. L’axe prioritaire de ce projet — « Faire de la langue corse un savoir fondamental » — est perçu par la FCPE comme une rupture avec la logique de cohabitation entre les deux filières existantes : bilingue et standard.
Le courrier dénonce notamment les transformations d’écoles en sites bilingues exclusifs « sans vote effectif de la commune », et évoque les cas récents de refus d’inscription en filière standard, obligeant certaines familles à chercher un établissement hors secteur. Selon la FCPE 2A, cette généralisation de l’enseignement bilingue pourrait créer des obstacles supplémentaires pour certains élèves, en particulier ceux en difficulté (notamment les élèves DYS) ou ceux dont le français n’est pas la langue parlée à la maison. « Comment accepter que ces enfants soient contraints de poursuivre une scolarité bilingue réduisant davantage leurs chances de réussite ? », interroge la fédération, qui plaide pour le maintien du libre choix et alerte sur une possible « co-officialisation de fait » du corse et du français.
La réponse ferme du rectorat
Le recteur de l’académie de Corse, Remi-François Paolini, n’a pas tardé à réagir. Dans un communiqué publié ce 18 juin, il réfute catégoriquement les accusations portées dans ce courrier qu’il qualifie « d'entaché de nombreuses inexactitudes » et « révélateur d’une méconnaissance surprenante du cadre juridique comme des actions menées depuis plusieurs années par l’académie en faveur du développement de l’enseignement de la langue corse ».
Dans ce texte diffusé en version bilingue, le recteur rappelle que le projet académique Scola 2030 s’inscrit dans une démarche de concertation, dans le respect du droit à l’information et à la participation des parents d’élèves. Il insiste également sur le fait que le développement du bilinguisme se fait « dans le respect des choix des familles et des cadres réglementaires ». S’il ne revient pas dans le détail sur chaque point évoqué, le recteur affirme avoir transmis à la ministre les « observations que lui semblait appeler ce courrier ».
Des réactions politiques
Sans surprise, ce courrier a suscité des réactions. Le Partitu di a Nazione Corsa a été le premier à réagir. Dans un communiqué diffusé mardi soir, le PNC fustige une « attaque ignominieuse et inacceptable contre l’enseignement de la langue et de la culture corses ». Il critique à la fois le contenu et la portée du courrier adressé à Élisabeth Borne, y voyant « des contre-vérités flagrantes à vocation polémique, proprement insultantes pour la langue du peuple corse ».
Le mouvement nationaliste reproche également à la FCPE 2A de méconnaître les règles encadrant le fonctionnement des établissements bilingues : « Dans les écoles dites à double filière, point n’est besoin de réunir le conseil d’école pour devenir un site bilingue, l’avis du Conseil des maîtres suffit », rappelle-t-il. Il dénonce enfin des propos qu’il juge infondés et « dangereux », notamment ceux selon lesquels l’enseignement bilingue pourrait nuire aux élèves présentant des troubles DYS.
Dans un autre communiqué, le Femu a Corsica réagit également de manière très critique. Rédigé en langue corse, le texte qualifie la lettre de la FCPE 2A de « vision rétrograde », opposée aux valeurs de progrès éducatif et de justice linguistique. « Hè inaccettevule ch’è in u 2025, certe persone parlenu di a lingua corsa cum’è un frenu à u sviluppu », écrit le mouvement, qui rappelle que les études scientifiques s’accordent à reconnaître les effets positifs du bilinguisme sur les apprentissages. Femu a Corsica appelle à une mobilisation collective pour accompagner la transition vers une école bilingue en Corse, et adresse un message clair à la FCPE : « A lingua corsa ùn hè un pesu, hè una ricchezza per fà sucetà ».
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