Jacques Delmas (à gauche), président de la Chambre Régionale des Comptes de Corse, est revenu sur le chapitre du rapport public annuel de la Cour des comptes 2020 sur les agences et offices de Corse.
Ces huit agences et offices de Corse ont pour la plupart été institués par la loi du 13 mai 1991 portant statut de la Corse.
Chargés de mettre en œuvre les politiques publiques décidées par la collectivité de Corse, à laquelle ils sont rattachés, ces Etablissements Publics Industriels et Commerciaux (EPIC) ont peiné à trouver leur place dans le cadre institutionnel insulaire.
Les rapports de la chambre régionale des comptes Corse (CRC Corse) ont de manière récurrente critiqué le mode de fonctionnement des agences et offices et souligné, pour plusieurs d’entre eux, l’inadaptation de leur statut. En 2017, soit avant la fusion de la CTC et des départements de la Corse du-Sud et de la Haute-Corse, les effectifs budgétaires des agences et offices constituaient près de la moitié de ceux de la Collectivité de Corse. Avec un total de 664 salariés en 2018, ils représentent 15 % de ceux de la CTC.
Il ressort des travaux récents de la Chambre Régionale des Comptes de Corse que "leur modèle économique s’avère contestable et que leur gestion des ressources humaines est coûteuse . Dès lors, la reconfiguration des agences et offices paraît nécessaire".
« Il s’agit d’un rapport de longue haleine effectué depuis 2018 » explique Jacques Delmas. «On a voulu comprendre comment fonctionnaient ces agences et offices. Pourquoi 8 ? Les plus-values apportées ? Le personnel ?. On a ainsi contrôlé tous les offices sauf l’office hydraulique. Par manque de temps mais aussi parce qu’à nos yeux c’est le seul qui soit un véritable EPIC et on le fera plus tard ».
Ouvrons une parenthèse pour préciser qu’un EPIC est normalement largement régi par le droit privé : son personnel est soumis en principe au Code du travail et s’assimile très largement aux salariés du secteur privé, et les contrats qu’il passe avec ses usagers relèvent du droit privé. Ce qui ne semble pas être le cas selon la Cour des Comptes. «On a constaté que pour la majorité des offices et agences, les règles de fonctionnements s’apparentent plus à celles des fonctionnaires du public. Seuls 2 offices, l’Office Foncier de Corse et l’Office Hydraulique disposent de recettes commerciales comme cela doit être le cas. Les autres reçoivent des subventions importantes de la Collectivité de Corse. En 2018, ces subventions ont atteint 56 millions d’euros, soit 6% de ses dépenses. Ces dotations constituent une part déterminante des recettes réelles de fonctionnement de ces satellites de la collectivité de
Corse, puisqu’elles dépassent 85 % des recettes pour six des huit agences et offices. Deux de ces établissements, ATC et OEC, présentent des coûts élevés de gestion des aides. Pour 1 € d’aide versé aux professionnels du tourisme en 2018 par l’ATC, la collectivité de Corse a dû verser 2,20 € à cette agence, soit des frais de gestion de 1,20 €. À l’OEC, les frais de gestion sont de 50 centimes pour 1 € d’aide versé aux acteurs de l’environnement, en hausse de 25 % entre 2011 et 2018.».
Autre question qui taraude les magistrats de la CRC de Corse : Ces offices et agences ne sont-ils pas redondants ?
«On a remarqué que 3 des 6 offices contrôlés exercent des missions qui recoupent celles des services de la Collectivité de Corse. Une clarification de la répartition des compétences respectives de la collectivité et de ses opérateurs est donc nécessaire. Il s’agit de l’Agence de l’Urbanisme, de l’Office de l’Environnement et de l’Office des transports ». Des activités qui ont forcement un coût. «Entre 2009 et 2019 le poids des charges pour la CTC a augmenté de 60 % pour les charges de personnel, 30 % pour les subventions d’exploitation versées par la tutelle et 20 % pour les effectifs » indique encore le président Delmas qui pointe une carence de pilotage de la Collectivité de corse. «Le contrôle de tutelle n’est pas rigoureux, il n’y a pas de suivi même si ces dernières années on a noté une volonté de cadrage et de maîtrise ».
Selon la CRC de Corse «les directeurs des agences et offices ont bénéficié de conditions particulièrement favorables de recrutement, en contrat à durée indéterminée, et de rémunération, à hauteur de 6 500 € nets mensuels. Six d’entre eux ont fait l’objet de licenciements entre 2010 et 2015, tous dans des conditions irrégulières. Le coût total des indemnités, allocations, des reconstitutions de carrière et des frais de justice s’élève à 1,3 M€. Depuis 2017, un nouveau statut prévoit un alignement de leur gestion sur celle des hauts fonctionnaires territoriaux ».
Et la CRC de Corse de pointer une gestion des ressources humaines très avantageuse pour les salariés des agences et offices avec des salaires supérieurs à ceux de la fonction publique territoriale et des promotions offrant des progressions salariales très avantageuses.
À titre d’exemple, la CRC Corse a constaté qu’au sein de l’OEC, chaque année, un tiers de l’effectif voit sa rémunération augmenter mécaniquement. Le coût de l’avancement s’élève pour la seule année 2015 à 130 000 €. En plus des avancements automatiques à l’ancienneté, les salariés des agences et offices peuvent bénéficier d’une promotion de grade ou de catégorie, que celle-ci résulte de l’application du statut du personnel ou de la volonté de la direction. Le critère de la mobilité fonctionnelle est quasiment toujours imposé par les dits statuts. En revanche, souligne la Cour des Comptes, «le mérite du salarié n’apparaît pas comme un critère déterminant pour bénéficier d’une promotion »…
La CRC pointe aussi la gestion de l’ADEC : «Si on se projette dans l’avenir, le fait de l’augmentation de la masse salariale fait qu’en 2023, la subvention versée par la Collectivité de Corse, qui représente 91% des recettes de l’ADEC, ne suffira pas à payer la masse salariale » souligne J. Delmas.
Chargés de mettre en œuvre les politiques publiques décidées par la collectivité de Corse, à laquelle ils sont rattachés, ces Etablissements Publics Industriels et Commerciaux (EPIC) ont peiné à trouver leur place dans le cadre institutionnel insulaire.
Les rapports de la chambre régionale des comptes Corse (CRC Corse) ont de manière récurrente critiqué le mode de fonctionnement des agences et offices et souligné, pour plusieurs d’entre eux, l’inadaptation de leur statut. En 2017, soit avant la fusion de la CTC et des départements de la Corse du-Sud et de la Haute-Corse, les effectifs budgétaires des agences et offices constituaient près de la moitié de ceux de la Collectivité de Corse. Avec un total de 664 salariés en 2018, ils représentent 15 % de ceux de la CTC.
Il ressort des travaux récents de la Chambre Régionale des Comptes de Corse que "leur modèle économique s’avère contestable et que leur gestion des ressources humaines est coûteuse . Dès lors, la reconfiguration des agences et offices paraît nécessaire".
« Il s’agit d’un rapport de longue haleine effectué depuis 2018 » explique Jacques Delmas. «On a voulu comprendre comment fonctionnaient ces agences et offices. Pourquoi 8 ? Les plus-values apportées ? Le personnel ?. On a ainsi contrôlé tous les offices sauf l’office hydraulique. Par manque de temps mais aussi parce qu’à nos yeux c’est le seul qui soit un véritable EPIC et on le fera plus tard ».
Ouvrons une parenthèse pour préciser qu’un EPIC est normalement largement régi par le droit privé : son personnel est soumis en principe au Code du travail et s’assimile très largement aux salariés du secteur privé, et les contrats qu’il passe avec ses usagers relèvent du droit privé. Ce qui ne semble pas être le cas selon la Cour des Comptes. «On a constaté que pour la majorité des offices et agences, les règles de fonctionnements s’apparentent plus à celles des fonctionnaires du public. Seuls 2 offices, l’Office Foncier de Corse et l’Office Hydraulique disposent de recettes commerciales comme cela doit être le cas. Les autres reçoivent des subventions importantes de la Collectivité de Corse. En 2018, ces subventions ont atteint 56 millions d’euros, soit 6% de ses dépenses. Ces dotations constituent une part déterminante des recettes réelles de fonctionnement de ces satellites de la collectivité de
Corse, puisqu’elles dépassent 85 % des recettes pour six des huit agences et offices. Deux de ces établissements, ATC et OEC, présentent des coûts élevés de gestion des aides. Pour 1 € d’aide versé aux professionnels du tourisme en 2018 par l’ATC, la collectivité de Corse a dû verser 2,20 € à cette agence, soit des frais de gestion de 1,20 €. À l’OEC, les frais de gestion sont de 50 centimes pour 1 € d’aide versé aux acteurs de l’environnement, en hausse de 25 % entre 2011 et 2018.».
Autre question qui taraude les magistrats de la CRC de Corse : Ces offices et agences ne sont-ils pas redondants ?
«On a remarqué que 3 des 6 offices contrôlés exercent des missions qui recoupent celles des services de la Collectivité de Corse. Une clarification de la répartition des compétences respectives de la collectivité et de ses opérateurs est donc nécessaire. Il s’agit de l’Agence de l’Urbanisme, de l’Office de l’Environnement et de l’Office des transports ». Des activités qui ont forcement un coût. «Entre 2009 et 2019 le poids des charges pour la CTC a augmenté de 60 % pour les charges de personnel, 30 % pour les subventions d’exploitation versées par la tutelle et 20 % pour les effectifs » indique encore le président Delmas qui pointe une carence de pilotage de la Collectivité de corse. «Le contrôle de tutelle n’est pas rigoureux, il n’y a pas de suivi même si ces dernières années on a noté une volonté de cadrage et de maîtrise ».
Selon la CRC de Corse «les directeurs des agences et offices ont bénéficié de conditions particulièrement favorables de recrutement, en contrat à durée indéterminée, et de rémunération, à hauteur de 6 500 € nets mensuels. Six d’entre eux ont fait l’objet de licenciements entre 2010 et 2015, tous dans des conditions irrégulières. Le coût total des indemnités, allocations, des reconstitutions de carrière et des frais de justice s’élève à 1,3 M€. Depuis 2017, un nouveau statut prévoit un alignement de leur gestion sur celle des hauts fonctionnaires territoriaux ».
Et la CRC de Corse de pointer une gestion des ressources humaines très avantageuse pour les salariés des agences et offices avec des salaires supérieurs à ceux de la fonction publique territoriale et des promotions offrant des progressions salariales très avantageuses.
À titre d’exemple, la CRC Corse a constaté qu’au sein de l’OEC, chaque année, un tiers de l’effectif voit sa rémunération augmenter mécaniquement. Le coût de l’avancement s’élève pour la seule année 2015 à 130 000 €. En plus des avancements automatiques à l’ancienneté, les salariés des agences et offices peuvent bénéficier d’une promotion de grade ou de catégorie, que celle-ci résulte de l’application du statut du personnel ou de la volonté de la direction. Le critère de la mobilité fonctionnelle est quasiment toujours imposé par les dits statuts. En revanche, souligne la Cour des Comptes, «le mérite du salarié n’apparaît pas comme un critère déterminant pour bénéficier d’une promotion »…
La CRC pointe aussi la gestion de l’ADEC : «Si on se projette dans l’avenir, le fait de l’augmentation de la masse salariale fait qu’en 2023, la subvention versée par la Collectivité de Corse, qui représente 91% des recettes de l’ADEC, ne suffira pas à payer la masse salariale » souligne J. Delmas.
En conclusion, le décalage entre la nature administrative des agences et offices et leur statut d’EPIC, en fait de faux EPIC., est bien réel.
«Cette situation est à la fois irrégulière et génératrice de surcoûts budgétaires » explique Jacques Delmas. « La Cour recommande donc de la faire évoluer en substituant la collectivité à certains opérateurs, en en transformant d’autres en EPA ou en harmonisant les statuts des personnels de deux offices qui resteraient des EPIC ».
Ainsi pour l’OEC (office de l’environnement), l’OTC (Office des Transports) et l’AUE (Agence de l’Urbanisme), l’existence de compétences qui recoupent celles exercées par certaines directions de la collectivité de Corse, milite pour un rattachement de leurs missions respectives à celles de la Collectivité de Corse.
À l’instar de la substitution de la collectivité de Corse à l’OEC, l’OTC et l’AUE, la transformation en EPA (Etablissements Publics Administratifs de certains EPIC serait source d’économies budgétaires; les personnels des EPA seraient soumis aux règles de gestion des ressources humaines applicables aux agents publics : rémunération alignée sur celle des fonctionnaires ; absence d’indemnités de départ à la retraite ; encadrement des règles de recrutement et de promotion.
Pour la CRC de Corse de telles économies pourraient être réalisées en fusionnant l’ATC (Agence du Tourisme) et l’ADEC (Agence de Développement) et en constituant le nouvel ensemble en EPA. Leur fusion favoriserait, à terme, une économie de dépenses de personnel par la mutualisation de leurs fonctions administratives. D’autre part, il est également préconisé de transformer l’ODARC en EPA. Cet opérateur, dont la fonction essentielle porte sur la gestion des aides agricoles au nom de la collectivité de Corse, ne perçoit quasiment aucune ressource propre.
Enfin, Dans les cas de l’OEHC (Office Hydraulique) et de l’OFC (Office Foncier), le maintien du statut d’EPIC peut en revanche être envisagé en raison de l’existence d’importantes ressources autres que les subventions d’exploitation versées par la collectivité.
Si la Cour des Comptes ne préconise ni licenciements ni baisse de salaires, elle souhaite que la collectivité réfléchisse dès aujourd’hui au remplacement ou non des personnels. «Toutes nos propositions s’inscrivent dans le moyen ou le long terme » précise bien le président Delmas. «Ainsi en 2028, 28% des effectifs des offices et agences, soit 664 personnes, auront plus de 60 ans. L’idée est donc de réfléchir à leur remplacement ou non, ou bien si on recrute, de se poser la question d’une embauche avec un système aussi avantageux. Mais il faut le faire dès aujourd’hui ».
Le président a enfin évoqué les prochains contrôles : Les Chambres de Commerce et d’industrie, le chauffage urbain et les déchets ménagers.
Voilà qui risque encore de faire couler beaucoup d’encre dans les prochains mois ! .
«Cette situation est à la fois irrégulière et génératrice de surcoûts budgétaires » explique Jacques Delmas. « La Cour recommande donc de la faire évoluer en substituant la collectivité à certains opérateurs, en en transformant d’autres en EPA ou en harmonisant les statuts des personnels de deux offices qui resteraient des EPIC ».
Ainsi pour l’OEC (office de l’environnement), l’OTC (Office des Transports) et l’AUE (Agence de l’Urbanisme), l’existence de compétences qui recoupent celles exercées par certaines directions de la collectivité de Corse, milite pour un rattachement de leurs missions respectives à celles de la Collectivité de Corse.
À l’instar de la substitution de la collectivité de Corse à l’OEC, l’OTC et l’AUE, la transformation en EPA (Etablissements Publics Administratifs de certains EPIC serait source d’économies budgétaires; les personnels des EPA seraient soumis aux règles de gestion des ressources humaines applicables aux agents publics : rémunération alignée sur celle des fonctionnaires ; absence d’indemnités de départ à la retraite ; encadrement des règles de recrutement et de promotion.
Pour la CRC de Corse de telles économies pourraient être réalisées en fusionnant l’ATC (Agence du Tourisme) et l’ADEC (Agence de Développement) et en constituant le nouvel ensemble en EPA. Leur fusion favoriserait, à terme, une économie de dépenses de personnel par la mutualisation de leurs fonctions administratives. D’autre part, il est également préconisé de transformer l’ODARC en EPA. Cet opérateur, dont la fonction essentielle porte sur la gestion des aides agricoles au nom de la collectivité de Corse, ne perçoit quasiment aucune ressource propre.
Enfin, Dans les cas de l’OEHC (Office Hydraulique) et de l’OFC (Office Foncier), le maintien du statut d’EPIC peut en revanche être envisagé en raison de l’existence d’importantes ressources autres que les subventions d’exploitation versées par la collectivité.
Si la Cour des Comptes ne préconise ni licenciements ni baisse de salaires, elle souhaite que la collectivité réfléchisse dès aujourd’hui au remplacement ou non des personnels. «Toutes nos propositions s’inscrivent dans le moyen ou le long terme » précise bien le président Delmas. «Ainsi en 2028, 28% des effectifs des offices et agences, soit 664 personnes, auront plus de 60 ans. L’idée est donc de réfléchir à leur remplacement ou non, ou bien si on recrute, de se poser la question d’une embauche avec un système aussi avantageux. Mais il faut le faire dès aujourd’hui ».
Le président a enfin évoqué les prochains contrôles : Les Chambres de Commerce et d’industrie, le chauffage urbain et les déchets ménagers.
Voilà qui risque encore de faire couler beaucoup d’encre dans les prochains mois ! .