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«La Belle de mai», le nouveau roman de Jean-Louis Rinieri


Philippe Jammes le Mardi 4 Mai 2021 à 13:13

Jean-Louis Rinieri, fils d’une famille de notables ruraux corses, est revenu dans son île pour y exercer la profession d’avocat. Aujourd’hui à la retraite, il partage sa vie entre un village de montagne et Paris, où sa famille est présente depuis plus de cent ans.
Il a connu très jeune le grand banditisme (Toto), l’engagement politique (Radio Prague) et toujours la violence, à travers son expérience professionnelle (La vie judiciaire en Corse) et autour de lui : plus de vingt de ses proches, dont deux de ses confrères, sont morts assassinés.
CNI a rencontré ce passionnant personnage.




 - Jean-Louis Rinieri, vos racines corses ?
Mes origines sont 100% corses. Mon père n'a quitté l'île que pour le temps de ses études, la campagne de 40, puis après la libération de la Corse, deux ans en Algérie dans une unité administrative. Ma mère n'a quitté la Corse que pour des vacances et loisirs. Mes quatre grands-parents étaient Corses, nés en Corse et y ayant toujours vécu, sauf, pour les hommes, pendant la guerre de 14. Ils étaient issus, tous les quatre, de vieilles familles de propriétaires ruraux. Mon grand-père paternel, Hilaire Rinieri a vécu à Venaco, l'été, et Aleria l'hiver, jusqu'à sa défaite aux élections communales d'Aleria dont il était Maire depuis 25 ans. C'était au milieu des années 30. Par dépit, il s'est installé à Bastia comme avoué à la Cour, on y voit sa photo sur la couverture du livre. Mon père a prêté le serment d'avocat à Bastia en 1939, juste avant sa mobilisation. Refusant de plaider devant des juges qui avaient prêté serment à Pétain, il n'a exercé sa profession qu'à partir de 1945, lorsqu'il a été libéré de ses obligations militaires. Au total, quand la maladie l'a contraint à la retraite, il était avocat depuis 55 ans. Mes racines ont été cultivées pleinement puisque, si j'ai fait toute ma scolarité à Bastia, je passais mes week-ends et mes vacances d'hiver à Aleria, dans le hameau de Vaccaghja dont tous les habitants descendaient de  l'ancêtre commun, Charles Marie Rinieri.  A 12 ans, je conduisais déjà un tracteur. L'été, je le passais à Bastelica, village de ma grand-mère paternelle, dans l'immense Palazzu di l'Ambrosini, aujourd'hui partagé entre deux de mes cousines, mon frère et moi. Je connais le massif du Renoso comme ma poche, mais ma femme ne veut plus que j'y monte ! En revanche, deux oncles de ma mère s'étaient installés à Paris avant 1914 et y étaient pharmaciens, l'un rue de Seine, l'autre avenue Kleber. Un oncle de mon père, un Ambrosini de Bastelica est également "monté" à Paris avant la grande guerre. Il y a fait rapidement fortune puisqu'en 1924 il achetait en totalité l'immeuble du 15ème  dans lequel je possède un appartement. Depuis mon départ volontaire à la retraite que j’évoque dans un mon livre  -La vie judiciaire en Corse-, je passe une partie de l'hiver à Paris, mais j'ai ici un potager à l'ancienne, des arbres fruitiers et une jolie forêt que je nettoie et entretiens.

L’idée de ce livre La Belle de Mai ?
La BDM** est la suite logique de Radio Prague, l'histoire de mon adolescence sous la forme d'un roman. Radio Prague finissait en 1968. La BDM se déroule sur quelques semaines de l'été 1970. Tout ici est adapté de faits réels, vécus par moi, mes proches ou des connaissances. C'est un témoignage sur la société corse de ma jeunesse, la diaspora corse, la violence que nous cultivions chez nous comme ailleurs. J'ai connu la maman suicidée, la consulette et son coup de foudre pour un jeune marin, une grande famille corse qui faisait dans le jeu et, dit-on, dans la drogue, aucun procès, jamais, dont le chef a été assassiné. Des gens avec qui j'ai vécu, mangé, étudié, joué, vingt ont été assassinés, mon oncle et parrain a été enlevé à Paris, mais on l'a libéré et ses ravisseurs, selon ses mots ont été retrouvés morts dans le caniveau ! On peut le lire dans mon livre TOTO, si vous le trouvez ! Le seul exemplaire encore en vente est sur Amazon à 1111 euros et des poussières !


- Votre profession d’avocat, vous a forcement aidé et fait côtoyer cette violence décrite ?
- Effectivement, ma profession d'avocat, que j'ai exercée 43 ans pied au plancher ; pour info, le lendemain de mon installation, la salle d'attente était déjà pleine, n'a fait que me rapprocher de la violence. J'ai plaidé souvent, en partie civile, contre des personnes réputées dangereuses et ai été menacé de mort à plusieurs reprises. Deux de mes confrères et amis ont été assassinés, trois autres blessés par balles. J'ai acquis une grande connaissance de la violence. Vous l'ignorez sans doute, d'après mes propres chiffres le nombre d'homicides est passé depuis ma prestation de serment, de 40 à 10 par an, en moyenne et en Corse. Une seule fois, j'ai plaidé aux Assises en défense. Mon client a été condamné à 5 ans pour coups mortels, mais il a purgé sa peine jusqu'au dernier jour, cas unique,  car la famille de la victime avait fait savoir que, s'il sortait plus tôt, il serait abattu !

Vos projets ?
- Je mène trois projets de front : la réédition de Toto, avec des éléments nouveaux, la chronique de mes deux ans de bâtonnat de combat, à une époque où la Corse était au bord de la guerre civile et où une partie du mouvement nationaliste me classait comme un "antinationaliste notoire " jusqu'en première page du Ribombu. De ce côté là, les choses se sont calmées après que Charles Pieri, mon ami d’enfance m'a cité comme témoin de moralité au célèbre procès de Bordeaux. Ensuite il y a la rédaction de mon "Journal d'un idiot, selon Dostoïevski, réservé pour l'instant à douze amis très proches et lecteurs aguerris : deux profs des facs de droit, un ancien ambassadeur d’Afghanistan, ami de fac et presque frère, une prof de psycho de l'université de Milan, un cousin ingénieur atomistes, pour ne citer qu’eux…




Synopsis :
«
Baptiste, blessé dans l’enfance par le suicide de sa mère, promis à sa cousine par le clan familial, fait à vingt ans des rencontres qui vont, un temps, infléchir le cours d’une vie dessiné pour lui par Charles-François, le chef de famille. Il connaît Grazia, une belle italienne qui veut tout quitter pour lui, puis, en fuyant cette femme, le grand banditisme corse de Marseille. Mais la loi du sang et l’amour le ramèneront à Marie et à leur vallée ».

 
*Éditions Maïa
** JL Rinieri sera en dédicaces le samedi 29 mai à partir de 10 heures à la Mairie de Campile, à l’occasion lors de la journée CAMPILIBRI.