L'art de vivre insulaire enseigné aux enfants du groupe scolaire de Ventiseri

Très belle initiative que celle prise par les enseignants du groupe scolaire de Travu en cette période particulière di A Festa di a Nazione.  En effet, répartis en plusieurs ateliers et groupes, les enfants de primaire de la commune de Ventiseri ont pu replonger le temps d'une matinée dans l'art de vivre insulaire sous toutes ses formes.  Qui d'entre nous ne se rappelle pas, il y a quelques dizaines d'années déjà, avant que la télévision et  l'internet ne viennent  individualiser les comportements, les veillées familiales au coin du feu. Celles où toute la famille, oncles et tantes se regroupaient le soir venu pour discuter d'une journée de labeur souvent consacrée à la tonte de la laine ou encore aux vendanges.  A l'issue, devant un verre d'eau de vie, les cartons de china sortaient du tiroir des commodes ainsi que les haricots secs et les heures défilaient ainsi tranquillement jusqu'à ce que le patriarche décide de sonner la fin de la soirée. 
Dans les classes du groupe scolaire de Ventiseri, ce vent nostalgique de pratiques ancestrales, parfois oubliées, souffle entre les bancs et les chaises.  Matteu Rossi attablé en compagnie de trois de ses camarades de classe joue à la scopa.   D'une main assurée, il tient les cartes de jeu. De l'autre, scrutant le tableau noir sur lequel la maîtresse Saveria Valentini a noté la valeur des cartes, il inscrit à chaque passe les points récoltés. " Je suis content.  On mène 15 à 6 contre les filles. Cela me fait plaisir d'apprendre à jouer à ce jeu.  Et puis on fait des calculs et des additions, par exemple le carreau c'est plus un point " annonce non sans une certaine fierté le petit garçon. 

Plus loin, une fois quelques marches descendues, on se retrouve très vite dans les cuisines de l'établissement d'où montent les exclamations motivées d'apprentis cuisiniers. Affairés sous la surveillance de Ronan à pétrir la farine de châtaigne, y mélanger oeufs et autres ingrédients, les enfants confectionnent un moelleux qu'ils dégusteront lors du goûter.  Pendant ce temps, le chef de cuisine prépare pour le repas de midi du sauté de veau aux olives, des filets mignons de sanglier agrémentés de tome corse aux blettes et autres omelettes au brocciu.
De brocciu, il en est également question dans la cour de l'école où une représentante de la fromagerie Ottavi explique aux enfants attentifs le processus de cuisson du petit lait qui par la suite deviendra un succulent brocciu à déguster sans modération.
Dans d'autres salles de l'école, ce sont le jeu de mora, mais également des films projetés sur les animaux corses qui suscitent l'intérêt enfantin.  " On leur fait ainsi découvrir notre faune, en tout cas celle qu'ils ne connaissent pas déjà comme par exemple cette espèce de truite que l'on ne trouve qu'en Corse et dans les hauts plateaux de l'Atlas" précise l'instituteur Ange François Luzi.  La truite Macrostigma noire à points rouges qui ne peut survivre que dans l'eau pure et oxygénée de nos montagnes n'aura bientôt plus de secret pour les élèves.
Bien belle matinée donc que celle consacrée à la culture culinaire, ludique et patrimoniale insulaire, une façon adaptée et pédagogique d'inculquer aux enfants l'amour de leur terre, un sentiment d'appartenance parfois dissous dans le magma insipide des téléréalités et autres mangas.