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Jean-Jacques Panunzi : « Le foncier agricole est un enjeu d’envergure pour la France »


Nicole Mari le Mercredi 6 Mars 2019 à 20:49

Le Sénat vient, ce mercredi 6 mars, d’adopter, à l’unanimité, le projet de loi relatif à la protection des activités agricoles et des cultures marines en zone littorale. Le but est d’empêcher les changements de destination ou la vente de biens immobiliers affectés à une activité agricole dans les communes littorales ou les terres de montagne. Un texte voté par le sénateur de Corse-du-Sud, Jean-Jacques Panunzi, qui est intervenu en séance publique pour expliquer et défendre la spécificité corse. Texte et vidéo.



Jean-Jacques Panunzi, sénateur de Corse-du-Sud.
Jean-Jacques Panunzi, sénateur de Corse-du-Sud.

Voici son allocution :
 
« Ce texte de modernisation du droit de préemption des SAFER va dans le bon sens. Il ambitionne d’empêcher les changements de destination ou la vente de biens immobiliers affectés à une activité agricole dans les communes littorales ou les terres de montagne. 
 
Le foncier agricole est un enjeu d’envergure pour la France. Je crois savoir qu’une mission d’information parlementaire commune est actuellement à l’œuvre et qu’un rapport suivi d’un projet de loi devrait prochainement nous être proposés. Ce sera l’occasion de renforcer les missions des SAFER de façon plus globale. Les problématiques de la proposition de loi en cours d’examen concernent surtout les cultures marines. Il existe hélas d’autres difficultés.
 
Je pense notamment à un problème qu’en Corse nous avons essayé de régler par voie d’expérimentation, c’est celui des démembrements de propriété. Pour faire simple, on peut vendre le lundi la nue-propriété d’un bien agricole, et le mardi l’usufruit, pour échapper à la préemption de la SAFER qui ne dispose d’aucun droit dans ce cas et n’est même pas notifiée de ces cessions.
 
La Corse dispose de 1000 kms de linéaire côtier où l’agriculture de plaine est soumise à de fortes pressions foncières. Le retard d’élaboration des documents d’urbanisme, aggravé par les contraintes supplémentaires imposées par le PADDUC, participe à une accentuation de ces mécanismes.
 
Si la SAFER est un outil de régulation de première importance, certaines cessions non notifiables et non préemptables, comme la vente en démembrements ou par montage entre sociétés, échappent à sa vigilance avec les risques que l’on connaît : 
- suppression d’exploitations agricoles économiquement viables par substitution d’un projet non agricole ;
- absence de maitrise foncière ;
- baisse du nombre d’exploitations et d’installations ;
- abandon progressif de certaines exploitations dans l’attente de projets spéculatifs ;
- déstructuration foncière de certaines propriétés agricoles, etc…
 
Inutile de vous rappeler que sans foncier, point d’agriculture ni de développement rural…
 
Il existe une solution qui consisterait à caler le périmètre du droit de préemption de la SAFER sur celui du fermier qui lui, peut préempter – je cite le code rural - en « cas de vente portant sur la nue-propriété ou l’usufruit à moins que l’acquéreur ne soit, selon le cas, nu-propriétaire du bien vendu en usufruit ou usufruitier du bien vendu en nue-propriété ».
 
Une piste de réflexion que je suggère au Gouvernement et que je ne manquerai pas de proposer par voie d’amendement lorsque sera soumise au Parlement la loi sur le foncier agricole, évoquée par le Président de la République au Salon de l’Agriculture, dont les territoires ruraux et le monde agricole ont tant besoin. »
 
En fin de discussion, Didier Guillaume, Ministre de l’Agriculture et de la Pêche, a répondu au Sénateur qu’il avait « bien entendu sa requête » concernant les cessions de parcelles démembrées, et que la loi foncière serait effectivement l’occasion de trouver une issue à cette situation, avant de conclure que la Corse devra dans ce futur texte faire l’objet « d’une prise en compte particulière », conformément aux spécificités qui sont les siennes.