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Inseme per Bastia propose un contre-projet pour le Puntettu


Nicole Mari le Lundi 17 Juin 2013 à 00:18

Après le rendez-vous raté avec le ministre de la ville, François Lamy, le 14 juin dernier et avant la venue dans le quartier, le 18 juin, de la Commissaire enquêtrice dans le cadre de l’enquête publique, Inseme per Bastia remonte au créneau pour aider les habitants du Puntettu, dont les logements sont menacés de démolition. L’opposition nationaliste présente un projet alternatif à celui de la Municipalité, projet qui se veut soucieux de préserver le patrimoine historique à moindre coût. Explications, en vidéo, pour Corse Net Infos, de Gilles Simeoni, leader d’Inseme, ainsi que les plaidoyers du député européen, François Alfonsi, et de la présidente de la sauvegarde du patrimoine, Lucie Gandolfi.




Un projet à cinq piliers
 
Face au projet de la municipalité qui prévoit la démolition d’une partie du plus vieux quartier de Bastia pour la remplacer par un parking et des immeubles de standing, l’opposition nationaliste d’Inseme per Bastia, qui a pris fait et cause pour les habitants du Puntettu, propose un projet alternatif basé sur la réhabilitation et la restauration. A moins de dix mois des élections municipales, ce projet s’inscrit dans un programme électoral global, qui sera bientôt dévoilé aux Bastiais. « Au premier regard, le projet du Puntettu ne concerne certes, en superficie ou en nombre d’habitants, qu’une petite partie de Bastia, mais il concerne en fait tous les Bastiais, de par l’importance historique et patrimoniale du quartier et les enjeux que sa réhabilitation véhicule en termes de patrimoine, de vivre-ensemble et de développement économique », déclare en préambule Gilles Simeoni. Pour le leader d’Inseme, le projet pour le Puntettu « illustre, par la méthode et par le contenu ce que sera notre projet pour BASTIA et les méthodes que nous mettrons en œuvre si les Bastiais décident de faire le choix du changement en mars 2014 ».
Ce projet est construit sur cinq piliers.
 
Une question de méthode
Comme toujours chez Inseme per Bastia, quelque soit le projet, le 1er pilier est la méthode qui passe par la démocratie participative et la concertation. « Nous avons fait le choix d’associer le plus largement possible tous les Bastiais à la définition du projet et de la vision du Bastia que nous devons construire ensemble : réunions de quartier, questionnaires, ateliers de travail... Nous nous appuyons également sur les forces vives, recueillons leur avis, et travaillons en concertation avec eux : associations de quartier, commerçants, acteurs économiques ».
Inseme a, donc, demandé au comité de quartier, aux commerçants du Vieux-Port, à la Fédération des guides historiques, aux historiens, aux architectes et aux urbanistes de contribuer à ce contre-projet en respectant l’esprit des lieux.
 
Un patrimoine unique
Le 2ème pilier du projet concerne le patrimoine, l’histoire, la culture et la langue qui « sont l’âme et le ciment de Bastia ». Inseme juge « aberrant et injustifiable » que le projet défendu par l’actuelle majorité municipale prévoit, par exemple, de détruire la Casa Montesoru, dont la structure est en parfait état et qui présente des éléments architecturaux uniques en Corse.
Le 3ème  pilier axe vers la modernité. Pour Inseme, défendre le patrimoine ne peut être considérer comme « passéiste ». Tout en se disant favorable à la destruction des immeubles insalubres et irréversiblement dégradés et à la réhabilitation du Centre ancien, il estime qu’un simple tour des villes de France et d’Europe permet de se rendre compte que le projet de la Mairie pour le Puntettu est « une aberration ».
Le 4ème  pilier privilégie le vivre-ensemble. L’architecture conditionnant aussi la qualité et la nature des relations sociales, Inseme, contrant les allégations de l’équipe municipale sur les mauvaises conditions de vie du quartier, affirme que le Puntettu est « un quartier où l’on vit bien, en parfaite harmonie et mixité sociales ». Cette mixité sociale, l’existence de placettes conviviales et l’âme des lieux sont prises en compte et valorisées dans le projet présenté par Inseme per Bastia.
 
Parmi les plus pauvres
Le 5ème pilier porte sur le développement économique. Inseme fait un constat sans appel. Le revenu fiscal moyen de Bastia est de plus de moitié inférieur au revenu fiscal des villes françaises. Signe, pour les Nationalistes modérés, des difficultés économiques rencontrées par la grande majorité des Bastiais. Si la non-éligibilité de Bastia, cette année, à la DDU (Dotation de développement urbain) suscite l’inquiétude de la majorité municipale, l’opposition y voit la preuve d'un sous-développement. « Nous étions dans les 100 villes de France de plus de 5 000 habitants les plus pauvres ! Devons-nous nous réjouir parce qu’aujourd’hui, grâce à un changement des modalités de calcul, nous sommes 103ème», interroge Gilles Simeoni.
Pour lui, Bastia doit, donc, se développer au plan économique et le centre-ville a besoin de la locomotive du tourisme et d’un commerce qui reparte de l’avant.
 
Appel à la mobilisation
Selon les guides touristiques, le Puntettu est l’un des quartiers les plus appréciés par les visiteurs, « son potentiel est énorme et il s’intègre parfaitement dans le parcours piéton à améliorer et développer au départ de la Place Saint-Nicolas jusqu’à la Citadelle, Place d’Armes et Saint-Joseph ». Le projet d’Inseme pour ce quartier comprend également la réhabilitation du Jardin Romieu et du Quai Sud pour en faire un espace de verdure permettant de renforcer l’articulation architecturale entre le Puntettu et la Citadelle. « La réhabilitation du Puntettu est donc un atout majeur aux plans économique, touristique et commercial ».
Inseme lance un appel à tous les Bastiais, leur demandant de se mobiliser dans le cadre de l’enquête publique en cours jusqu’au 24 juin. « Au-delà de cette enquête publique, il existe un autre moyen de dire ce que vous voulez pour Bastia : les échéances municipales à venir vous permettront de vous prononcer en faveur du changement », conclut Gilles Simeoni. Affaire à suivre.
 
N.M.

Les Bastiais peuvent adresser leurs observations sur le registre du Commissaire enquêteur déposé en Mairie ou directement au Commissaire enquêteur (Mme Josiane Casanova, Hameau de Gustalbiu, 20235 Castellu di Rustinu) et faire une copie au Comité de quartier du Puntettu, 1 Rue des Mulets, 20200 Bastia.

François Alfonsi : « Il n’y a pas une ville européenne où l’on détruit des bâtiments du 16ème siècle ».

François Alfonsi, député européen.
François Alfonsi, député européen.
Le député européen, François Alfonsi, venu soutenir, dimanche matin, le Comité de quartier du Puntettu, place de l'huile, à Bastia, fustige la décision de la majorité municipale de démolir des immeubles datant du 16ème siècle.
« Aujourd’hui, on ne traverse pas une ville européenne, et j’ai du en visiter plusieurs dizaines, où l’on détruit des bâtiments du 16ème siècle. Quand on est député européen, on vous invite et on vous fait visiter la ville. N’importe quel maire de n’importe quelle ville d’Europe, que ce soit en Espagne, en Allemagne, en France ou ailleurs, vous fait visiter un centre-ville dans lequel il a mené une action municipale de valorisation. Aujourd’hui, les endroits où l’on rase des immeubles du 16ème siècle pour y mettre des parkings, ça n’existe plus ! Ça n’existe plus qu’à Bastia ! La dernière ville où, probablement, ça s’est fait, c’est sans doute Ajaccio. Je peux vous dire, en tant qu’Ajaccien, que la destruction des bâtiments qui entouraient la place du Diamant, la caserne Abattucci, l’ancien hôpital militaire, le vieux séminaire, est toujours une blessure pour les Ajacciens, une blessure qu’ils ne supportent pas ! 40 ans après, cette blessure est toujours aussi vive, aussi forte. C’est vraiment un acte d’une violence terrible de détruire un patrimoine du centre-ville comme on veut le faire au Puntettu. C’est pour cela que je soutiens pleinement le Comité du Puntettu et Gilles Simeoni dans sa démarche. Ils ont pleinement raison et j’espère qu’ils réussiront à empêcher un tel désastre. Ce que nous n’avons pas su faire à Ajaccio ».

Lucie Gandolfi : « Il y a sûrement une autre solution que la démolition intégrale ».

Lucie Gandolfi, présidente de l'association de sauvegarde du patrimoine, et Marinette, habitante du Puntettu, propriétaire d'un appartement dans la Casa Montesoro, menacée de démolition.
Lucie Gandolfi, présidente de l'association de sauvegarde du patrimoine, et Marinette, habitante du Puntettu, propriétaire d'un appartement dans la Casa Montesoro, menacée de démolition.
La présidente de l’association pour la sauvegarde du patrimoine est, également, venue apporter son soutien au Comité de quartier du Puntettu. Elle propose sa médiation pour une solution d’apaisement. « Je suis venue à l’appel de mon amie Marinette qui habite la très belle Maison Montesoro, qui est un peu la jumelle de la Maison Castagnola, rue des Terrasses, à part qu’elle ne possède pas de fresques. Je suis venue aussi dire qu’il y a sûrement une autre solution que la démolition intégrale. En tant que présidente de la sauvegarde du patrimoine, je suis prête à faire l’interface entre la Ville et les riverains. Il est évident que la Ville peut passer en force. Elle est maîtresse d’ouvrage, mais est-ce souhaitable ? On ne va pas casser seulement des murs, on va aussi briser des cœurs. C’est une chose qu’il faut considérer, même si politiquement, ce n’est peut-être pas un argument valable. Il faut chercher une solution d’apaisement. Je souhaiterais, de nouveau, faire une concertation, la sauvegarde du patrimoine est là pour cela, et voir s’il existe une alternative possible, pas trop cher aussi ».
Lucie Gandolfi explique qu’elle a déjà travaillé en concertation avec l’équipe municipale lors de l’abattage des arbres de la cité, que les Bastiais ont mal vécu, pour expliquer et prendre en considération les désirs des gens. «  Nous ne sommes ni des propriétaires, ni des syndics, mais nous sommes des vigies, nous signalons les choses. Ce qui me désole, c’est le nombre de maisons dans un état lamentable dans le vieux Bastia. Après tout, la Maison Montesoro n’est pas la pire ! Sur son portail, les gravures de branches de myrte sont le symbole de la profession des Montesoro qui tannaient les peaux, les tanneries étaient au Guadello en dessous. C’est, donc, tout un ensemble patrimonial et historique qui mérite d’être protégé ».