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Héloïse d'Ormesson : "Marche ou Rêve de Ferdinand Laignier-Colonna-Cesari, c'est le livre d'un homme debout"


GAP le Vendredi 20 Janvier 2023 à 18:52

La fin d'année 2022 et l'entame de 2023 ont été chargées pour Ferdinand Laignier - Colonna- Cesari. Après la sortie au mois de décembre du jeu Mazzeri dont il est co-auteur ce 18 janvier il a présenté à Porto-Vecchio son premier ouvrage "Marche ou Rêve". Un roman édité par Héloïse d'Ormesson qui était, d'ailleurs, aux côtés du jeune écrivain pour cette présentation.



Il y avait foule à la Médiathèque L'Animu à Porto-Vecchio où Ferdinand Laignier – Colonna-Cesari dédicaçait un premier ouvrage décapant aux Editions Héloïse D’Ormesson.
Il y avait foule à la Médiathèque L'Animu à Porto-Vecchio où Ferdinand Laignier – Colonna-Cesari dédicaçait un premier ouvrage décapant aux Editions Héloïse D’Ormesson.
Docteur en langue et littérature française, Ferdinand Laignier Colonna-Cesari est l’auteur d’un ouvrage incisif, et tout commence même avec le titre,  au fil d’une écriture ciselée sur le thème du handicap. Un sujet qu’il connaît fort bien dans la mesure où l’auteur, depuis son plus jeune âge, est atteint de myopathie.

Un ouvrage sans concession, un moment de partage avec beaucoup d’humour,  même si celui-ci est souvent plus que corrosif mais c’est un livre  qui interpelle et pose un regard sans fioriture sur le rapport que nous entretenons à l’autre surtout quand celui-ci est différent. Dans une société du beau, de l’apparence, du fast-food culturel ou autre, le handicap apprend le temps long et l’acceptation de ce corps souvent trahi en raison du diktat de la maladie. Ce handicap engendre une vie trop souvent à la marge.

Comment trouver sa place dans cette société ?
Pour évoquer cela, l'auteur choisit ses mots. Ce sont, parfois, autant de coups de scalpels sur nos belles certitudes, sur notre capacité à faire preuve d'une empathie de bon aloi et surtout au bon moment. Marche ou Rêve porte aussi un regard sans concession sur la société insulaire en en pointant ses travers.  Un livre où tout est abordé sans tabou, même les sujets les plus intimes.

"Ce livre est un vrai roman sur un sujet qui n'est pas facile et qui ne se prête pas nécessairement au romanesque. explique Héloïse d'Ormesson qui confie ses impressions sur ce premier ouvrage. Ferdinand a réussi à construire une histoire très inattendue, très surprenante. C'est un ouvrage qui a été inspiré par sa propre expérience qu'il transcende et qui est une vraie leçon de vie époustouflante. C'est un livre qui m'a impressionnée, totalement séduite. Un roman très drôle, incisif, corrosif, parfois féroce mais très profond, et très réussi. Ferdinand parle du possible et de l'impossible, des limites, c'est une question universelle. Ses limites à lui sont peut-être plus visibles, plus immédiates, mais elles nous en disent beaucoup, aussi, sur les nôtres et le regard que la société porte sur les malades ou les handicapés est quand même un miroir sur notre société. La force de ce livre c'est qu'à aucun moment il n'y a d'apitoiement, ni de pathos. C'est un livre qui surprend, qui secoue, qui pousse à se poser des questions. C'est un livre qui élève, écrit par un homme debout".

En cela peut-être un ouvrage qui nous dérange, autant qu’il nous interroge face à une vie sans faux-semblant. Mais que l'on ne s'y trompe pas, Marche ou Rêve n'est pas un règlement de compte, un livre qui revendique, il dit juste ce qui est et surtout qui nous sommes. Sans doute le monde des valides dans toute sa complaisance se reconnaîtra dans ce miroir. Un corps torturé, une vie en pointillé ou par procuration, pas évident à lire quand même.

Un livre à l'évidente fluidité mais pour lecteur charpenté en capacité d'encaisser les accélérations allant crescendo nous menant dans les hautes strates d'un humour acéré. Etre debout est une véritable  obsession tout comme la quête d’amour. Une double quête de l'impossible qui va conduire le héros dans une fuite en avant à l'issue plus qu'incertaine. La dernière phrase, à elle seule, résume tout le livre.

On est toujours l'handicapé de quelqu'un

- Un premier livre publié chez Héloïse D'Ormesson est déjà une référence. Ferdinand Laignier- Colonna Cesari est revenu sur la Genèse de son livre 
Quand on est étudiant en lettres on est tenté, à un moment ou à un autre d'écrire. J'avais déjà commencé à écrire quelque chose mais lors du premier confinement j'ai tout repris. On sait bien que dans un premier roman  il y a beaucoup de soi sans pour autant que cela soit autobiographique. Donc cela m'a permis de ciseler un peu plus le texte et de travailler sur le tranchant des phrases.

- Quel a été le fil rouge de votre livre qui s'ancre dans une temporalité récente ?  
- Je voulais mettre en lumière cette hypocrite compassion qui s'incarne dans cette phrase qui résume tout : "ah le pauvre". L'épidémie de Covid 19 a rebattu les cartes dans l'approche de la maladie et là finalement on s'est aperçu que l'on était tous mortels".

- Vous mettez en avant le handicap dans toute sa complexité ?  
- La frontière entre le monde des valides et celui des invalides est à la fois très lointaine et très proche. On peut être victime d'un accident ou d'un problème de santé et tout bascule dans un autre monde. C'est ce monde-là qui inquiète et qui fait peur et généralement on a toujours peur de ce que l'on ne connaît pas.

- Il y a aussi une véritable quête ?  
- Effectivement, c'est un livre sur la quête qu'elle soit de l'amour ou de l'espoir, une quête pour soi ou pour les autres, mais c'est aussi une quête sur la possibilité mentale et l'impossibilité physique qui se complètent mais, également, qui s'inversent".

- Il y a quand même beaucoup d'interrogations dans Marche ou Rêve ?  
- Comme tous les romans, il répond à des questions et la principale interrogation pourrait être: " et si j'étais différent", mais dans le même temps  en pose d'autres. Cela met en avant nos préjugés et nos interrogations. C’est un livre qui « challenge » un peu les gens".

- Pour autant l'ouvrage n'est ni un plaidoyer, ni un livre où l'on règle ses comptes ? 
- Je n'ai pas voulu écrire un livre règlement de compte ni tomber dans le pathos. C'est un ouvrage qui dit qui nous sommes dans la globalité sans pointer du doigt les uns ou les autres. Nous sommes dans un monde de matérialité, mais l'essentiel n'est évidemment pas là mais dans la qualité des relations humaines. C'est un miroir qui vise tout le monde et puis dans la vie d'une manière générale on est toujours l’handicapé de quelqu'un.


Son premier roman à peine publié Ferdinand s'est déjà remis à l'ouvrage avec d'autres horizons littéraires.