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Femu a Corsica rejette tout compromis sur le processus d’autonomie et fixe le cap pour les municipales


Nicole Mari le Dimanche 20 Juillet 2025 à 20:56

« Pas de compromis sur le compromis ! ». C’est le mot d’ordre ferme lancé dimanche après-midi, à Corte, par Femu a Corsica lors de son cunsigliu naziunale, concernant le processus d’autonomie. Un Comité stratégique se tiendra à Paris mardi prochain avec le ministre Rebsamen pour discuter de l’avis consultatif, mais très attendu du Conseil d’Etat, qui aurait bien édulcoré le texte. A l’ordre du jour également, les 50 ans des évènements d’Aleria et la stratégie pour les élections municipales de 2026. Explications pour Corse Net Infos de François Martinetti, secrétaire national de Femu a Corsica.



Un cunsigliu naziunale de Femu a Corsica s'est tenu, dimanche 20 juillet, à Corti.
Un cunsigliu naziunale de Femu a Corsica s'est tenu, dimanche 20 juillet, à Corti.
- Qu’est-ce qui a motivé la tenue de ce cunsigliu ?
- Le cunsigliu naziunale est le Parlement de Femu a Corsica. Il réunit, à la fois, des militants, des représentants des régions et aussi des élus de l’assemblée de Corse. Nous nous sommes réunis pour discuter à l’aune des échéances décisives sur trois principaux points. Le premier : les 50 ans d’Aleria que nous allons soutenir avec l’association Aleria 75 qui fait un travail de mémoire important. C’est l’occasion de rappeler que c’est un évènement fondateur qui fait partie de notre fil historique. Femu prendra des initiatives en marge de ces commémorations en termes de transmission. Par exemple, en quoi le message d’Aleria est-il moderne ? Les deux points, qui ont provoqué des débats riches, concernent le processus de révision constitutionnelle, qui est en cours avec l’État, sur lequel nous avons pris une position très claire, et la question des enjeux municipaux à venir. Finalement, un cunsigliu exceptionnel qui a permis de tracer un cap, à la fois, pour des échéances de très court terme comme la délégation qui va monter mardi à Paris avec une position à défendre, qui a été validée par l’ensemble des militants, et des échéances de moyen terme comme les élections municipales qui sont la continuité de notre rapport de force démocratique. On souhaite être présent partout dans une démarche démocratique, respirante, et, en même temps, exigeante.
 
- Quelle position avez-vous prise concernant l’avis du Conseil d’État sur la réforme constitutionnelle ?
- Le Conseil d’Etat va s’exprimer. La République française est organisée ainsi. Pour notre part, le mandat, que nous avons donné au président de l’Exécutif, Gilles Simeoni, est très clair : Pas de compromis sur le compromis ! Pour nous, le compromis, ce sont les écritures constitutionnelles sur lesquelles nous ne voulons rien changer. Ces écritures constitutionnelles doivent arriver, telles qu’elles, sans changer une virgule, à l’Assemblée nationale et au Sénat où elles seront débattues, validés ou invalidées. Il est hors de question qu’elles soient édulcorées ! Notre projet politique, c’est la délibération du 5 juillet 2023 avec des compétences données dans tous les domaines, hors du régalien. Nous avons fait un compromis politique avec l’État. C’est le sens de l’histoire. Le président Macron l’a validé, le ministre Darmanin, l’a validé, il a été validé par une large majorité de Corses à parfois plus de 99 % pour certains points, plus de 80 % pour d’autres. Le pouvoir législatif, le lien à la terre, le lien à la langue, l’existence du peuple Corse en tant que communauté historique et linguistique, c’est notre boussole. Nous avons donné mandat au président de l’Exécutif sur cette position-là, et rien que cette position.
 
- Si le Conseil d’État édulcore ces écritures constitutionnelles et que le gouvernement suit, quelle sera votre réaction ?
- L’accord a été signé avec le président Macron. Il a décidé que ce projet devait aller devant les chambres parlementaires. On ne peut pas réécrire l’histoire. Lors de la réunion du Comité stratégique, nous serons là pour rappeler que l’avis du Conseil d’État est une chose, mais que nous avons l’avis de la démocratie corse qui s’est exprimée de manière massive dans les urnes depuis de nombreuses années et à l’assemblée de Corse avec un accord et un vote qui vont au-delà de la famille nationaliste. On espère qu’il y aura un engagement ferme de la part de Monsieur Rebsamen et du gouvernement pour déposer ce texte au Conseil des ministres afin qu’il soit débattu dans les champs parlementaires. Après, il y aura un exercice de conviction à faire auprès de toutes les forces politiques de l’Assemblée nationale et du Sénat. Il y aussi l’opportunité que le Congrès se réunisse pour la Kanaky et de l’utiliser en même temps sur la question Corse.
 
- Si mardi, le ministre ne prend pas cet engagement, est-ce la fin du processus ?
- Il y a compromis et compromission ! Chaque mot, chaque virgule du projet d’écritures constitutionnelles a été le fruit d’un effort entre les représentants légitimes de l’État français et les représentants légitimes du peuple corse. C’est notre compromis, c’est notre accord politique qui a été validé. Il est hors de question d’aller en dessous ! Après les Chambres parlementaires feront leur exercice. Nous ne préjugeons pas des avis des différents partis politiques, mais ce qui est clair, c’est que le projet constitutionnel doit arriver tel quel devant les Chambres parlementaires. C’est la position que nous défendrons dans les jours à venir.
 

François Martinetti.
François Martinetti.
- Second sujet : les élections municipales de 2026. Quelle stratégie avez-vous définie ?
- Nous avons décidé de tracer un cap à l’échelle de la Corse, une stratégie autour de trois piliers, une sorte de charte qui sera développée dans nos accords de projets avec d’autres forces politiques. Le premier pilier concerne la vision générale et la recherche de partenaires. Les élections municipales ne sont pas des élections forcément partitaires, donc simplement liées à Femu. Nous allons construire des démarches, comme nous l’avons fait sur Bastia. Nous discuterons en priorité avec les forces nationalistes, c’est notre famille politique. C’est naturel. Nous discuterons aussi avec les forces de progrès, à identifier, de gauche comme de droite, qui sont favorables au processus d’autonomie de la Corse. L’accord, qui a été signé, doit bien évidemment faire partie de la démarche des municipales. Le deuxième pilier est l’application très concrète, à l’échelle municipale, des fondamentaux nationalistes. Cela ne consiste pas simplement à dire : « a terra, à lingua, u populu », mais a acté des principes clairs qui vont dans ce sens. Par exemple, nous avons une vision particulière, exigeante, en matière d’urbanisme avec le PADDUC qui va être révisé, les cartes communales et les PLU qui y sont liés, mais aussi les programmes d’accession à la propriété. Des maires ont bien travaillé pour donner à des Corses des terrains à des prix abordables. Je pense au maire de Moncale qui a fait un programme d’accession à la propriété pour les jeunes Corses de son village à 44 €/m2, ce qui est raisonnable. Appliquer donc les fondamentaux à l’urbanisme, à l’accès à la terre, à la lutte contre la spéculation et les dérives mafieuses, à l’adaptation au changement climatique. Evidemment la défense de la langue corse avec du concret : des écoles immersives et des maires qui s’engageront pour les écoles bilingues, qui développeront des projets permettant de faire, de la langue corse, le ciment de nos communes. Enfin, le troisième pilier, c’est l’adaptation aux réalités locales, propres à chaque commune.
 
- Qu’avez-vous acté au niveau des candidatures ?
- Femu a Corsica sera présent partout avec des candidats qui seront issus du parti, d’autres de la société civile et d’autres de la famille nationaliste. On va proposer cette charte à tous nos futurs alliés. On espère qu’elle sera acceptée et qu’on construira ensemble des démarches positives, dynamiques, nationalistes, et, en même temps, ouvertes à l’échelle de la Corse.
 
-Concernant Bastia, beaucoup de rumeurs circulent sur d’autres candidats que Pierre Savelli. Qu’est-ce qui a été décidé ?
- Aujourd’hui ce qui a été décidé, c’est le projet, le cap et la stratégie pour les municipales. On a validé ensemble, à la fois, la démarche vers laquelle nous tendons, avec qui nous voulons aller, et les piliers des futures équipes municipales. La question des candidatures arrivera en son temps. Nous sommes un parti démocratique. Nous allons faire le bilan de ce qui a été fait sur Bastia et ailleurs, peser les arguments positifs et négatifs dans un sens ou dans un autre. Ne voyez pas ça comme un aveu de faiblesse, mais comme une exigence pour faire mieux pour la Corse ! Pierre Savelli est maire de Bastia, il a un bon bilan. Il existera peut-être par ailleurs des velléités, nous allons les considérer dans le respect démocratique, dans l’esprit aussi de faire réussir Bastia, la CAB et, de manière plus large, la Corse. Pour nous, Bastia est important, c’est un peu l’ADN de Femu, à la fois un nationalisme fort sur ses fondamentaux et des efforts d’ouverture qui peuvent se rejoindre sur un projet municipal : la défense de Bastia et des intérêts de la Corse.
 
- Donc, vous lancez un appel aux autres partis nationalistes ?
- Pas seulement ! Nous voulons discuter en priorité avec les nationalistes, mais pas en exclusivité. Sur Bastia par exemple, il a une majorité municipale bastiaise principalement lié à Femu a Corsica, mais aussi à des forces de droite et de gauche qu’on ne peut pas écarter d’un revers de mains. Aujourd’hui, nous avons décliné une vision générale : nationalistes/forces de progrès. Si on est d’accord sur cette vision générale, on ira ensemble et on discutera avec tout le monde. En tout cas, c’est notre volonté. Aucune exclusivité, mais il faut que les futurs partenaires partagent notre vision.
 
Propos recueillis par Nicole MARI.