Corse Net Infos - Pure player corse

De 2016 à 2025, Pierre Poggioli chronique la lutte pour l'autonomie de la Corse


le Jeudi 4 Septembre 2025 à 16:46

Docteur en science politique, figure nationaliste de la première heure et ancien élu à l’Assemblée de Corse de 1984 à 1998, Pierre Poggioli poursuit son travail de mémoire avec la parution du troisième volume d’Images et Écrits d’une lutte. Après avoir retracé les décennies précédentes, il se penche cette fois sur la période récente, de 2016 à 2025. L’auteur sera tout le week-end et lundi à la Santa di U Niolu pour présenter et dédicacer son ouvrage.



- Dans la continuité des tomes 1 et 2 sortis en 2023 et 2024, en ce mois de septembre vous publiez le troisième volume d’Images et écrits d’une lutte. Qu’est-ce qui vous a poussé à prolonger ce travail jusqu’à l’année 2025 ? 
- J’ai voulu retracer toute l’histoire. J’ai été assez synthétique jusqu’aux années 1960, puis un peu plus détaillé, presque mois par mois, jusqu’à en arriver à narrer les évènements pratiquement au jour le jour, jusqu’à juin de cette année. J’ai réalisé ce troisième volume avec toujours le même procédé. J’ai rassemblé près de 1900 photos, documents, articles de journaux, et des textes qui expliquent un peu tout cela. À travers cette trilogie, j’ai voulu retracer ce passé d’une lutte à travers des écrits et des images.
 
- Ce tome 3 couvre finalement des bouleversements très récents. Comment avez-vous abordé cette partie de l’histoire ? 
- Avec ce troisième volume, j'évoque la crise du Covid, évidemment, mais aussi l’assassinat d’Yvan Colonna, et les premières discussions sur l’autonomie, sans savoir à l’époque de quelle autonomie on parle. Et puis, j'écris ce qu’il se passe depuis, le processus de Beauvau, les échanges avec l’État, mais sans savoir jusqu’où ira tout cela, puisque nous sommes aussi tributaires des évènements à Paris, de la crise politique nationale. J’essaye de poser le problème. Bien entendu, il est évident que je n’ai pas à faire de procès d’intention à quiconque en amont, on verra effectivement si ce processus d’autonomie arrive au bout, c’est-à-dire au vote du Congrès. On ne peut émettre que des hypothèses, échafauder des scénarios, mais pour l’instant, il n’y a rien, on est plutôt en stand-by.
 
- Le tome précédent d’Images et écrits d’une lutte se terminait par la victoire des nationalistes de 2015. Comment racontez-vous la suite dans ce volet, entre espoirs que cette victoire a suscités et désillusions ? 
- Je commence en 2016. Je retrace la gestion des nationalistes à l’Assemblée de Corse, notamment avec les premières victoires électorales, et puis la victoire écrasante de Gilles Simeoni en 2021. On peut voir effectivement par rapport à ce qui avait été programmé, ce qu’on espérait à travers cette élection, ce qu’il s’est passé réellement, le confronter aux faits et à la situation actuelle, qui n’est pas très plaisante pour la Corse et le peuple corse. 
 
- Comme pour les tomes précédents, vous vous appuyez sur des articles de presse et des documents d’archives. Vos sources ont-elles toutefois évolué pour cette période très récente avec notamment l’avènement des réseaux sociaux ? 
- Pour le tome 1, je me suis surtout concentré sur des sources qui étaient pour beaucoup oubliées, occultées ou mises de côté. Mais au fur et à mesure qu’on se rapproche de 2025, il est évident que les souvenirs sont plus récents, et qu’il y a plus d’articles qui sont parus dans différents médias à disposition. Je me suis aussi servi de certains contenus récupérés sur les réseaux sociaux, en essayant de mettre en exergue ce qui me semble le plus intéressant pour éclairer une situation ou un évènement.
 
- Comment avez-vous réussi à concilier la proximité avec ces évènements récents et la distance nécessaire à l’analyse ?
- J’essaye autant que possible de garder une certaine distance, mais il est évident que je demeure un acteur de ces évènements, et donc que l’auteur de cet écrit souvent se confond avec l’acteur. Et puis je me considère toujours comme un militant, et donc je ne vais pas rédiger n’importe quoi pour faire plaisir à n’importe qui.
 
- Justement, comment décrirez-vous votre rôle à travers cet ouvrage : témoin, observateur, militant, historien ? 
- Je suis un peu tout cela à la fois, mais surtout un chroniqueur à travers mes trois livres.
 
- Est-ce que vous avez ressenti davantage de difficulté à écrire ce tome ?
- Non, pas du tout. Je pense — et c’est la conclusion de mon ouvrage — que la nation Corse, qui est le pivot central de toute ma réflexion et mon engagement depuis le début, existait bien avant la République française. Elle était reconnue en Méditerranée et ailleurs. Elle existera toujours, quel que soit l’évolution institutionnelle ou le statut dans lequel elle sera insérée, tôt ou tard. Après, l’histoire future ce sont les nouvelles générations qui l’écriront. Nous, nous avons correspondu à une période de l’histoire contemporaine de la Corse, avec des choses positives, mais négatives. Aujourd’hui la Corse est confrontée à d’autres réalités que celles que nous avons connues dans les années 1970-80, quand nous avons initié cette lutte.
 
- Vous l’avez dit, ce tome 3 clôt définitivement ce cycle d’ouvrages. Est-ce que vous envisagez déjà de reprendre la plume pour continuer à travailler sur l’histoire de la Corse ?
- Non, j’écris au feeling. Pour l’instant, je suis en stand-by. On verra après, selon ce qui se passe à Paris et en Corse, s’il y a matière à rédiger un autre livre. Quoi qu’il en soit, cette année, nous fêtons le 50e anniversaire d’Aleria. J’espère que cela servira de référence pour que les gens s’attellent à un renouveau, à une résilience au niveau du peuple corse et de la Corse.