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Covid-19 en Corse : ce qu'il faut savoir sur la 5ème vague avec la virologue Mylène Ogliastro


Livia Santana le Lundi 20 Décembre 2021 à 11:04

La virologue et chercheuse à l'Inrae de Montpellier, qui fait partie du conseil scientifique de Corse, Mylène Ogliastro, revient sur les questions que les Corses se posent sur cette 5ème vague de Covid-19. Efficacité de la vaccination, nécessité de nouvelles restrictions, nouvelles injections, recommandation pour les fêtes... elle explique tout à CNI.



Image illustration : Michel Luccioni
Image illustration : Michel Luccioni


- L’Organisation mondiale de la Santé alerte sur une potentielle résistance aux vaccins du variant Omicron. Faut-il s’en inquiéter ?
- A ce stade, oui bien sûr. Quand on analyse sa carte génétique on voit que c’est un virus qui a émergé au début de la crise sanitaire, au même moment que le variant Alpha. Mais il est resté indétecté jusqu’à son arrivée en Afrique du Sud, pays où le système de surveillance épidémiologique est excellent. Là-bas, on s’est aperçu qu’il dispose de nouvelles mutations bien moins reconnues par le système immunitaire qu’il soit naturel ou vaccinal, qu’il a aussi une meilleure transmissibilité.
 
- Il remplacera donc le variant Delta à terme ? Avec quelles conséquences ?
- Oui c’est quasi sûr. On sait que ce variant est capable de réinfecter mais ce qu’on ne sait pas c’est sa capacité à déclencher des formes graves. Les premiers résultats sont heureusement, plutôt rassurants. Pour faire en sorte de rebooster nos défenseurs immunitaires, la décision a été prise de faire une troisième dose. Même si la protection est diminuée, ce n’est pas nul et cela protège des formes graves.  

- Le conseil scientifique propose que la dose de rappel du vaccin Moderna qui est actuellement de 50 microgrammes soit augmentée dans les semaines prochaines à 100 mcg pour induire une meilleure réponse immunologique vis-à-vis du variant Omicron…. Mais tous ces changements ne peuvent-ils pas décourager les Français ?
Moderna avait fait une demande pour diminuer la quantité ARN injecté. A présent il y a des questions pour savoir si on augmente à nouveau la dose d’ARN messager pour que le corps fabrique de protéines, donc pour avoir une meilleure réponse immunitaire ou si on continue comme on le fait, de vacciner un maximum de gens. Malheureusement, pour savoir si un vaccin est efficace on ne peut attendre que les résultats de la vraie vie car les études de laboratoires ne restent que des tests. Avec cette crise sanitaire, on a ouvert une boîte de pandore mais il ne faut pas que ça décourage les gens. On a l’expérience d’autres épidémies notamment d’un autre Coronavirus qui circule dans les populations depuis une centaine d’années, celui qui aujourd’hui nous donne un rhume et qui au début du 20ème siècle tuait des centaines de milliers de personnes.
 
- Quels effets secondaires de toutes ces injections ? Faudra-t-il en faire d’autres ?
On comprend en marchant. On n’en sait rien. On ignore s’il faudra injecter d’autres doses. Ce qu’il faut comprendre c’est que la vaccination permet d’activer ce qui se passerait naturellement. C’est-à-dire qu’un virus qui ferait des vagues successives petit à petit déclencherait une immunité de la population mais en prenant du temps et en faisant beaucoup de morts. La vaccination réduit ce temps d’immunisation.
 
- Pourquoi recense-t-on autant de cas malgré une bonne couverture vaccinale ?
- Il y a encore beaucoup de personnes non-vaccinées, le virus a encore beaucoup de clients. Les personnes vaccinées l’attrapent aussi mais avec des formes beaucoup moins graves. Le tout c’est de trouver cet équilibre entre transmission et virulence en espérant arriver à ce que ça devienne un rhume.

- Peut-on donc nous poser la question de la légitimité du vaccin ?
- Non, il limite les formes graves. Notre société occidentale est vieillissante, avec beaucoup de maladies cardio-vasculaires, du diabète, de l’obésité... ce sont des facteurs de comorbidités aggravants qui nécessitent de se faire vacciner. C’est d’ailleurs grâce à la vaccination qu’on a pu reprendre une vie à peu près normale ces derniers mois.  

 - Faut il s’attendre à de nouvelles restrictions ? Vous-y seriez favorable ?
- Nous sommes assez inquiets concernant les hospitalisations. On a du personnel hospitalier épuisé sur lequel on fait peser un risque accru parce que les personnes non-vaccinées représentent encore de l’ordre de 6 millions de personnes ce qui est énorme.
 
- Comment freiner cette 5ème vague ? Avant Noël ?
- C’est un peu toujours la même recette, on a pas trop avancé. La vaccination et les gestes barrières nous protègent,  surtout avec nos anciens. Il faut éviter les gros rassemblement puisqu’on le voit, le seuil de prévalence s’emballe encore. Il faut aussi surveiller les admissions dans les hôpitaux. C’est ce qui va conditionner de nouvelles restrictions.
 
- La Haute autorité de santé (HAS) s'est prononcée en faveur de la vaccination anti-Covid des enfants de 5 à 11 ans, qu’en pensez vous ?
- Comme pour la grippe, les vacciner n’a pas de bénéfices pour les enfants puisque statistiquement ils développent des formes beaucoup moins graves, en dehors des enfants fragiles qui eux sont déjà vaccinés. Mais pour limiter la circulation de ce virus il faut vacciner toute la population. Maintenir des îlots où il pourra se multiplier et se transmettre, ce n’est pas bon. J’y suis donc favorable.