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Coupe du monde : en Corse, les paris sportifs explosent, surtout chez les jeunes


Naël Makhzoum le Jeudi 8 Décembre 2022 à 20:01

Comme lors de chaque grande compétition de football, le nombre de paris sportifs augmente fortement. Mais cette année, la tendance est encore plus marquée que d'habitude. La Corse n'échappe pas à la règle et les jeunes non plus, malgré l'interdiction pour les mineurs de parier.



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C'est souvent la même chanson. Euro, Mondial, chaque année de grande compétition internationale de football apporte avec elle son lot de parieurs supplémentaires. "Parier, c'est comme regarder, compare José Oliva. Des gens qui ne sont pas très foot regardent quand même les matchs pendant la Coupe du monde. Pour les paris, c'est pareil : on a plus de gens qui jouent."  Le président de la fédération des 215 buralistes de Corse le voit aussi dans son magasin : "par rapport aux championnats classiques qui ont lieu toute l'année, il y a une nette augmentation."

Rien de surprenant, de prime abord. Sauf si on s'attarde sur l'évolution précise du phénomène. Pour se faire un ordre d'idée, la première rencontre des Bleus contre l'Australie (4-1) a totalisé 15 millions d’euros de mises en ligne contre 7,7 millions d’euros pour leur entrée dans la compétition, il y a quatre ans. "Ça va encore jouer un peu plus maintenant qu'on rentre dans les phases finales, suppose même José Oliva. Les cotes sont plus importantes et je pense que ça attirera encore plus les gens."

Mais comme pour la cigarette classique ou la puff - jetable et parfumée -, les jeux d'argent ont leur quota de parieurs mineurs. Pas besoin d'aller bien loin pour s'en rendre compte. "Franchement, avec le Mondial, tout le monde parie !" Ce n'est pas CNI qui le dit mais Gilbert, croisé à la sortie de son lycée ajaccien.

"Tout le monde va dans les bureaux de tabac"

Lui ne mise pas, à l'inverse de Théo, son ami qui l'accompagne vers... le bureau de tabac le plus proche - mais pas pour parier, bien sûr. "Je parie de temps en temps, assume-t-il toutefois. Pendant la Coupe du monde, on voit vraiment la différence ici : il y a plus d'audience, plus d'enjeux, plus de gains aussi."

Dans la cour du lycée, le nombre de jeunes qui liquident leur argent de poche en misant sur un doublé de Mbappé se multiplie. "On voit de tout : certains parient gros, d'autres ne misent pas grand chose", explique Gilbert. Mais concernant les pratiques habituelles des lycéens, les deux jeunes sont fermes : "personne ne parie en ligne, tout le monde va dans les bureaux de tabac pas loin."

On se demande bien où. Car en faisant le tour des buralistes les plus proches, tous sont unanimes : "on ne voit pas de changement sur ce Mondial par rapport au reste de l'année", "ce ne sont que des habitués qui viennent", nous assure-t-on selon les points de vente. Difficile de percer le tabou, mais à en croire les quelques lycéens croisés, pas besoin de s'embêter avec les formalités administratives : la carte d'identité pour jouer, ce n'est pas partout.

"On a une éthique, insiste pourtant José Oliva, au nom de sa profession. Les buralistes sont souvent pointés du doigt parce que certains ne jouent pas le jeu et en vendent aux mineurs. Mais je pense qu'aujourd'hui, avec les sanctions qu'il peut y avoir, il y a vraiment une prise de conscience des risques engendrés."

Prévention, engrenage et addiction

Le président de la fédération des buralistes de Corse en a marre de souffrir de la stigmatisation généralisée. "Évidemment, il y a toujours des buralistes qui, par rapport à ce que ça peut leur apporter en chiffre d'affaire, encaissent les paris même s'il s'agit de mineurs. Mais vis-à-vis de notre profession, c'est une mauvaise image qui est renvoyée. Je le répète, nous avons une éthique."

Dans son bureau de tabac situé à Borgo, José Oliva ne voit pas forcément de lycéens mais des plus jeunes encore, qu'il s'attache à prévenir. "Il y a des jeunes qui viennent, mais souvent avec leurs parents, raconte-t-il. Généralement, c'est le petit qui fait le pari et le papa ou la maman qui le valide. Mais nous, notre rôle en tant que buraliste, c'est de montrer aux jeunes que c'est un danger. Aujourd'hui, ça va très vite : on pense en gagnant un petit peu d'argent que c'est facile, mais quand vous tombez dans cet engrenage, c'est vraiment délicat pour en sortir."

Voire impossible. Le passage à l'addiction est vite arrivé et avec, l'accumulation de dettes alors même que les mineurs n'ont pas encore de source de revenus. Dans les cours de lycées - voire de collèges - les élèves ont tendance à régulièrement perdre les pièces ou billets misés au bureau de tabac. C'est une règle à laquelle très peu échappent. En France, 97% des parieurs perdent de l'argent.


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