Maxime Merlandi, Jean-Philippe Guissani, Placido Domingo, Jean Pierre Marchetti et André Dominici.
- Comment est née cette collaboration inattendue ?
- Par Internet. En février dernier, nous recevons un e-mail de Brooklyn d’un certain Robert Sadin. Il nous explique qu’il a entendu une de nos chansons sur Internet et qu’il aimerait la reprendre dans un album qu’il produit. Il nous donne ses coordonnées et nous demande de prendre contact avec lui. Cela suffit pour piquer notre curiosité à vif ! Nous essayons, alors, de voir qui est cette personne.
- Qui est-il justement ?
- Robert Sadin est compositeur, chef d’orchestre, arrangeur, producteur… C’est un homme très complexe et très complet, ami de Herbie Hancock dont il a produit et arrangé l’album Gershwin’s World. Il a travaillé sur cet album avec, notamment, Stevie Wonder et obtenu deux Grammy Award. Il a produit un album de Sting… Il fréquente les gens les plus connus de la planète au niveau de la musique.
- En apprenant cela, êtes-vous surpris de son mail ? Y croyez-vous ?
- Plus que surpris ! Nous croyons, d’abord, à une blague ! Nous nous demandons si le mail est réel, mais le ton de la lettre semble assez sérieux. Dès le lendemain, nous prenons contact avec lui. Il est, d’abord, assez avare de détails. Il nous dit qu’il produit le prochain album de Placido Domingo, Encanto del Mar, un album sur la Méditerranée. Avec Placido, ils ont un coup de cœur sur une chanson de Barbara Furtuna, que nous avons entièrement composée et qui s’appelle : Anghjulina. Robert Sadin aimerait que Placido la chante dans son prochain album. Très vite, il nous demande des précisions sur la chanson, la phonétique, la prononciation…
- Qu’est-ce qui les séduit dans cette chanson ? Vous donnent-ils une explication ?
- Non ! Ils l’ont entendue sur Internet, comme de nombreuses autres chansons qui pouvaient les rapprocher de cette Méditerranée qu’ils veulent exalter. Ils pensaient que ce voyage en Méditerranée devait passer par la Corse. Si vu d’ici, nous trouvons cela logique, ça ne l’est pas toujours, vu d’ailleurs ! Le fait qu’ils choisissent notre chanson, Anghjulina, était, pour nous, tellement surréaliste et inattendu ! C’était, déjà, énorme ! Et, en plus, Placido chante en corse ! C’est encore plus inespéré ! Tellement fantastique par rapport à notre culture et à notre langue, à tout ce que nous défendons depuis des années ! C’est une consécration collective !
- Aucune allusion à un duo ! Comment en arrivez-vous à chanter ensemble ?
- Nous raccrochons sans en savoir plus. Assez frustrés, nous le rappelons aussitôt pour lui poser des questions plus directes. Il reste, encore, évasif. Il répond que cet album est son projet et qu’il le dirige. Il nous dit dans un italien presque parfait : « Je suis le capitaine du bateau ». Nous lui demandons, alors, comment il voit les choses : est-ce une simple reprise de la chanson ou un duo ? Là, il répond qu’il aimerait bien nous inviter sur l’album pour chanter avec Placido Domingo. Nous franchissons un pas de plus dans l’incroyable !
- Que ressentez-vous tous les quatre en entendant cette proposition ?
- Une certaine incrédulité ! Placido Domingo est le plus grand chanteur d’opéra actuel. Il fait partie du trio des meilleurs ténors avec Luciano Pavarotti et José Carreras. Il est, aussi, chef d’orchestre, directeur de l’opéra de Los Angeles, il a dirigé des orchestres partout dans le monde, il a enregistré plus de 100 opéras complets. Il représente le summum de ce qui peut se faire en musique : c’est le Saint des saints ! Presque Dieu le père ! On ne pouvait pas rêver mieux ! A l’incrédulité succède une grande fierté ! Une fierté collective de voir que notre chant corse, la polyphonie qui a, parfois, été si méprisée, peut tutoyer ou approcher ce sommet-là !
- Le prenez-vous comme une reconnaissance du combat que vous menez pour défendre la langue et la culture corses ?
- Oui ! A l’heure où l’on doute encore de la légitimité d’une culture, des gens, bien loin de nous et bien hauts, comprennent que ce que nous chantons est bien autre chose que de la musique, mais que c’est une âme et une identité ! Qu’ils apprécient et ressentent ce que nous sommes, d’où nous venons, tout ce que nous défendons depuis longtemps, c’est, pour nous qui chantons notre terre et notre culture, une vraie reconnaissance !
- Qu’arrive-t-il ensuite ?
- Nous voilà donc embarqués dans le projet ! On nous propose de venir, pendant trois jours, enregistrer la chanson à Valencia en Espagne. Nous y allons sans programme établi. Robert Sadin a une façon très personnelle de travailler, assez incroyable aussi ! Il écrit les partitions en studio au fur et à mesure de l’enregistrement. Il est très intuitif, écrit ce qu’il ressent, ne prépare rien, improvise tout face à Placido Domingo qui, lui, au contraire, a l’habitude de tout cadrer. Nous arrivons au milieu de ces deux très fortes personnalités qui nous demandent d’être simplement ce que nous sommes ! Ils ne nous demandent pas d’être autre chose que ce que nous avons toujours été. Ça nous touche !
- Comment se passe la rencontre avec Placido Domingo ?
- Placido est un homme très simple et très humain. Pourtant, on sent bien autour de lui cette aura qui entoure les grands maîtres. Quand il parle, le silence se fait encore plus profond que le silence habituel. Il nous demande de chanter et nous dit qu’il aimerait seulement compléter avec sa voix le quatuor de Barbara Furtuna. On ne sait pas encore, à ce moment-là, s’il y aura des arrangements sur l’album, si le projet sera mené à terme. Nous avons vraiment l’impression d’être sur une autre planète ! Nous nous retrouvons au milieu de musiciens exceptionnels, de renommée internationale, qui ont l’habitude d’accompagner des chanteurs comme Sting ou Prince !
- Dans quel état d’esprit êtes-vous ?
- Curieusement, assez sereins ! Parce qu’on nous demande d’être nous-mêmes. Nous aurions eu plus de trac si on nous avait demandé d’être autre chose. Ce qui les intéresse, c’est notre identité, cette façon particulière de chanter en Corse. Cela, nous savons le faire ! Nous le faisons depuis que nous sommes adolescents. C’est même ce que nous faisons de mieux !
- Par Internet. En février dernier, nous recevons un e-mail de Brooklyn d’un certain Robert Sadin. Il nous explique qu’il a entendu une de nos chansons sur Internet et qu’il aimerait la reprendre dans un album qu’il produit. Il nous donne ses coordonnées et nous demande de prendre contact avec lui. Cela suffit pour piquer notre curiosité à vif ! Nous essayons, alors, de voir qui est cette personne.
- Qui est-il justement ?
- Robert Sadin est compositeur, chef d’orchestre, arrangeur, producteur… C’est un homme très complexe et très complet, ami de Herbie Hancock dont il a produit et arrangé l’album Gershwin’s World. Il a travaillé sur cet album avec, notamment, Stevie Wonder et obtenu deux Grammy Award. Il a produit un album de Sting… Il fréquente les gens les plus connus de la planète au niveau de la musique.
- En apprenant cela, êtes-vous surpris de son mail ? Y croyez-vous ?
- Plus que surpris ! Nous croyons, d’abord, à une blague ! Nous nous demandons si le mail est réel, mais le ton de la lettre semble assez sérieux. Dès le lendemain, nous prenons contact avec lui. Il est, d’abord, assez avare de détails. Il nous dit qu’il produit le prochain album de Placido Domingo, Encanto del Mar, un album sur la Méditerranée. Avec Placido, ils ont un coup de cœur sur une chanson de Barbara Furtuna, que nous avons entièrement composée et qui s’appelle : Anghjulina. Robert Sadin aimerait que Placido la chante dans son prochain album. Très vite, il nous demande des précisions sur la chanson, la phonétique, la prononciation…
- Qu’est-ce qui les séduit dans cette chanson ? Vous donnent-ils une explication ?
- Non ! Ils l’ont entendue sur Internet, comme de nombreuses autres chansons qui pouvaient les rapprocher de cette Méditerranée qu’ils veulent exalter. Ils pensaient que ce voyage en Méditerranée devait passer par la Corse. Si vu d’ici, nous trouvons cela logique, ça ne l’est pas toujours, vu d’ailleurs ! Le fait qu’ils choisissent notre chanson, Anghjulina, était, pour nous, tellement surréaliste et inattendu ! C’était, déjà, énorme ! Et, en plus, Placido chante en corse ! C’est encore plus inespéré ! Tellement fantastique par rapport à notre culture et à notre langue, à tout ce que nous défendons depuis des années ! C’est une consécration collective !
- Aucune allusion à un duo ! Comment en arrivez-vous à chanter ensemble ?
- Nous raccrochons sans en savoir plus. Assez frustrés, nous le rappelons aussitôt pour lui poser des questions plus directes. Il reste, encore, évasif. Il répond que cet album est son projet et qu’il le dirige. Il nous dit dans un italien presque parfait : « Je suis le capitaine du bateau ». Nous lui demandons, alors, comment il voit les choses : est-ce une simple reprise de la chanson ou un duo ? Là, il répond qu’il aimerait bien nous inviter sur l’album pour chanter avec Placido Domingo. Nous franchissons un pas de plus dans l’incroyable !
- Que ressentez-vous tous les quatre en entendant cette proposition ?
- Une certaine incrédulité ! Placido Domingo est le plus grand chanteur d’opéra actuel. Il fait partie du trio des meilleurs ténors avec Luciano Pavarotti et José Carreras. Il est, aussi, chef d’orchestre, directeur de l’opéra de Los Angeles, il a dirigé des orchestres partout dans le monde, il a enregistré plus de 100 opéras complets. Il représente le summum de ce qui peut se faire en musique : c’est le Saint des saints ! Presque Dieu le père ! On ne pouvait pas rêver mieux ! A l’incrédulité succède une grande fierté ! Une fierté collective de voir que notre chant corse, la polyphonie qui a, parfois, été si méprisée, peut tutoyer ou approcher ce sommet-là !
- Le prenez-vous comme une reconnaissance du combat que vous menez pour défendre la langue et la culture corses ?
- Oui ! A l’heure où l’on doute encore de la légitimité d’une culture, des gens, bien loin de nous et bien hauts, comprennent que ce que nous chantons est bien autre chose que de la musique, mais que c’est une âme et une identité ! Qu’ils apprécient et ressentent ce que nous sommes, d’où nous venons, tout ce que nous défendons depuis longtemps, c’est, pour nous qui chantons notre terre et notre culture, une vraie reconnaissance !
- Qu’arrive-t-il ensuite ?
- Nous voilà donc embarqués dans le projet ! On nous propose de venir, pendant trois jours, enregistrer la chanson à Valencia en Espagne. Nous y allons sans programme établi. Robert Sadin a une façon très personnelle de travailler, assez incroyable aussi ! Il écrit les partitions en studio au fur et à mesure de l’enregistrement. Il est très intuitif, écrit ce qu’il ressent, ne prépare rien, improvise tout face à Placido Domingo qui, lui, au contraire, a l’habitude de tout cadrer. Nous arrivons au milieu de ces deux très fortes personnalités qui nous demandent d’être simplement ce que nous sommes ! Ils ne nous demandent pas d’être autre chose que ce que nous avons toujours été. Ça nous touche !
- Comment se passe la rencontre avec Placido Domingo ?
- Placido est un homme très simple et très humain. Pourtant, on sent bien autour de lui cette aura qui entoure les grands maîtres. Quand il parle, le silence se fait encore plus profond que le silence habituel. Il nous demande de chanter et nous dit qu’il aimerait seulement compléter avec sa voix le quatuor de Barbara Furtuna. On ne sait pas encore, à ce moment-là, s’il y aura des arrangements sur l’album, si le projet sera mené à terme. Nous avons vraiment l’impression d’être sur une autre planète ! Nous nous retrouvons au milieu de musiciens exceptionnels, de renommée internationale, qui ont l’habitude d’accompagner des chanteurs comme Sting ou Prince !
- Dans quel état d’esprit êtes-vous ?
- Curieusement, assez sereins ! Parce qu’on nous demande d’être nous-mêmes. Nous aurions eu plus de trac si on nous avait demandé d’être autre chose. Ce qui les intéresse, c’est notre identité, cette façon particulière de chanter en Corse. Cela, nous savons le faire ! Nous le faisons depuis que nous sommes adolescents. C’est même ce que nous faisons de mieux !
Le groupe Barbara Furtuna en studio à Valencia avec Placido Domingo et, de dos, Robert Sadin.
- Comment se déroule l’enregistrement de la chanson ?
- Placido Domingo est à côté de nous. Robert Sadin est dans la cabine et écoute. Dès les premières prises, on sent bien qu’ils sont contents. Les musiciens nous congratulent et nous encouragent. Ils nous disent : « Vous avez, vraiment, un son qui vous est propre, qui fait votre identité sonore et musicale. Continuez comme ça, c’est vraiment ce que Sadin attend ! ». Robert Sadin est un alchimiste qui mélange les genres et les musiques. Il a travaillé sur les Beautés de Guillaume de Machaut (poète-musicien du 14ème siècle) avec des artistes complètement inattendus : le brésilien Milton Nascimento, des chanteuses de jazz… (Album Art of love-De Machaut Guillaume). Il a, également, enregistré un album de Sting avec des musiciens de musique baroque jouant sur des instruments anciens. Il joue sur tous les genres dans une transversalité qui décloisonne totalement la musique. Ce qui fait qu’au final, nous ne sommes pas si inattendus, si incongrus que cela !
- Quel arrangement fait-il, finalement, sur Anghjulina ?
- Finalement, le chant reste a capella. Il reste tel que nous l’avons conçu, avec les arrangements vocaux que nous avions imaginés au départ. Placido vient mêler sa voix aux nôtres. Quand nous demandons à Robert Sadin s’il veut simplement faire un duo avec Maxime qui est la voix principale du groupe, la voix de seconde, il répond : « J’ai le sentiment que si je ne vous prends pas tous les quatre, je vais casser une tradition vieille de plusieurs siècles ». Cette réflexion, à la fois, déconcertante et très réconfortante, montre la profondeur du personnage qui comprend que les besoins de l’enregistrement ne sont pas seuls importants, qu’il faut garder les choses dans leur intégrité et leur sincérité pour qu’elles fonctionnent.
- L’album Encanto del Mar rassemble des classiques mondialement connus. Anghjulina est-elle la seule à ne pas l’être ?
- Tout à fait ! Au milieu des grands classiques de la musique méditerranéenne surgit notre chant qui a une portée honorable, mais intimiste par rapport aux autres œuvres. C’est extraordinaire que la Corse fasse partie de cet hommage total que Placido Domingo veut rendre à la Méditerranée qui l’a bercé et porté. Même s’il vit aux Etats-Unis, il reste un Madrilène, un Espagnol, et revendique son identité. Il vient même de participer à une fondation pour les Hispaniques émigrés.
- Avez-vous été surpris qu’Anghjulina ait été préférée à un classique corse ?
- Oui ! On aurait pu s’attendre à un grand classique, dont le titre, lui-même, serait déjà porteur d’une certaine aura. Je pense que notre présence est due à la patte de Robert Sadin qui aime bien confronter les univers. Le fait de choisir une œuvre peu connue prouve qu’il aime se mettre en danger ! Il n’avait aucune certitude sur l’impact qu’aurait ce titre dans l’album. Il n’a pas choisi la facilité. Il présente, d’ailleurs, cet album comme tout à fait inattendu en disant : « Placido Domingo, comme vous ne l’avez jamais entendu ! ». C’est un album particulier dans l’œuvre gigantesque du ténor qui n’est plus employé dans son registre habituel et ose la fantaisie d’aller chanter des œuvres plus populaires.
- Quel souvenir le plus fort gardez-vous de ces trois jours d’enregistrement ?
- La rencontre avec Robert Sadin qui est un gars de Brooklyn, qu’on imagine très bien marchant dans les rues de New York avec ce look américain, un peu négligé, peu préoccupé de sa tenue vestimentaire, la casquette vissé sur la tête et son verbe incroyable. C’est un personnage totalement fantasque qui a l’air d’habiter dans un monde particulier. La rencontre, ensuite, avec Placido Domingo qui porte sur lui tout le poids de sa carrière, de son histoire. La confrontation de ces deux personnages et nous, au milieu, qui sommes comme des enfants admirant une vitrine de Noël, tout en sachant qu’ils n’ont pas les moyens de rentrer dans le magasin. Placido était une étoile tellement inaccessible que même, dans nos rêves les plus fous, nous n’aurions jamais pu imaginer cela ! Aussi ces trois jours ne pouvaient-ils être qu’un grand bonheur !
- Un bonheur ne venant jamais seul, vous avez une autre actualité très importante. Quelle est-elle ?
- Notre groupe Barbara Furtuna s’entoure d’un nouveau partenaire puisque nous venons de signer avec Universal Music. C’est le départ d’une nouvelle aventure. Ce nouveau partenariat nous permettra, peut-être, d’avoir un écho plus large par rapport à ce que nous faisons depuis maintenant 12 ans. Nous n’avons jamais reçu l’appui de grands médias. Nous avons tout fait par nous-mêmes, à la force du poignet, et grâce aussi à des collaborations. L’Arpeggiata nous a fait confiance et ouvert les portes de scènes inaccessibles comme le Carnegie Hall de New-York, le Konzerthaus de Berlin, la Chapelle Royale de Versailles… Le 21 janvier prochain, nous participerons à un concert « Les Nuits de la Voix » au théâtre du Chatelet qui est une des plus grandes scènes parisiennes. Nous la partagerons avec d’autres artistes.
- L’album avec Placido Domingo et la signature chez Universal dans le même temps, n’est-ce pas une double consécration ?
- Ce sont de belles surprises ! Des concrétisations. C’est une reconnaissance. Nous travaillons depuis tellement longtemps qu’il n’y a pas vraiment de place pour le hasard. Quand des professionnels de ce niveau-là vous font confiance, c’est une grande responsabilité puisqu’on sait que tout le travail reste à faire. Nous allons continuer à créer en voyant le monde plus grand, mais en gardant notre couleur, notre âme, nos convictions, notre attachement pour notre île, cette dimension qui fait notre réalité et notre identité. C’est, pour nous, l’essentiel.
Propos recueillis par Nicole MARI
- Placido Domingo est à côté de nous. Robert Sadin est dans la cabine et écoute. Dès les premières prises, on sent bien qu’ils sont contents. Les musiciens nous congratulent et nous encouragent. Ils nous disent : « Vous avez, vraiment, un son qui vous est propre, qui fait votre identité sonore et musicale. Continuez comme ça, c’est vraiment ce que Sadin attend ! ». Robert Sadin est un alchimiste qui mélange les genres et les musiques. Il a travaillé sur les Beautés de Guillaume de Machaut (poète-musicien du 14ème siècle) avec des artistes complètement inattendus : le brésilien Milton Nascimento, des chanteuses de jazz… (Album Art of love-De Machaut Guillaume). Il a, également, enregistré un album de Sting avec des musiciens de musique baroque jouant sur des instruments anciens. Il joue sur tous les genres dans une transversalité qui décloisonne totalement la musique. Ce qui fait qu’au final, nous ne sommes pas si inattendus, si incongrus que cela !
- Quel arrangement fait-il, finalement, sur Anghjulina ?
- Finalement, le chant reste a capella. Il reste tel que nous l’avons conçu, avec les arrangements vocaux que nous avions imaginés au départ. Placido vient mêler sa voix aux nôtres. Quand nous demandons à Robert Sadin s’il veut simplement faire un duo avec Maxime qui est la voix principale du groupe, la voix de seconde, il répond : « J’ai le sentiment que si je ne vous prends pas tous les quatre, je vais casser une tradition vieille de plusieurs siècles ». Cette réflexion, à la fois, déconcertante et très réconfortante, montre la profondeur du personnage qui comprend que les besoins de l’enregistrement ne sont pas seuls importants, qu’il faut garder les choses dans leur intégrité et leur sincérité pour qu’elles fonctionnent.
- L’album Encanto del Mar rassemble des classiques mondialement connus. Anghjulina est-elle la seule à ne pas l’être ?
- Tout à fait ! Au milieu des grands classiques de la musique méditerranéenne surgit notre chant qui a une portée honorable, mais intimiste par rapport aux autres œuvres. C’est extraordinaire que la Corse fasse partie de cet hommage total que Placido Domingo veut rendre à la Méditerranée qui l’a bercé et porté. Même s’il vit aux Etats-Unis, il reste un Madrilène, un Espagnol, et revendique son identité. Il vient même de participer à une fondation pour les Hispaniques émigrés.
- Avez-vous été surpris qu’Anghjulina ait été préférée à un classique corse ?
- Oui ! On aurait pu s’attendre à un grand classique, dont le titre, lui-même, serait déjà porteur d’une certaine aura. Je pense que notre présence est due à la patte de Robert Sadin qui aime bien confronter les univers. Le fait de choisir une œuvre peu connue prouve qu’il aime se mettre en danger ! Il n’avait aucune certitude sur l’impact qu’aurait ce titre dans l’album. Il n’a pas choisi la facilité. Il présente, d’ailleurs, cet album comme tout à fait inattendu en disant : « Placido Domingo, comme vous ne l’avez jamais entendu ! ». C’est un album particulier dans l’œuvre gigantesque du ténor qui n’est plus employé dans son registre habituel et ose la fantaisie d’aller chanter des œuvres plus populaires.
- Quel souvenir le plus fort gardez-vous de ces trois jours d’enregistrement ?
- La rencontre avec Robert Sadin qui est un gars de Brooklyn, qu’on imagine très bien marchant dans les rues de New York avec ce look américain, un peu négligé, peu préoccupé de sa tenue vestimentaire, la casquette vissé sur la tête et son verbe incroyable. C’est un personnage totalement fantasque qui a l’air d’habiter dans un monde particulier. La rencontre, ensuite, avec Placido Domingo qui porte sur lui tout le poids de sa carrière, de son histoire. La confrontation de ces deux personnages et nous, au milieu, qui sommes comme des enfants admirant une vitrine de Noël, tout en sachant qu’ils n’ont pas les moyens de rentrer dans le magasin. Placido était une étoile tellement inaccessible que même, dans nos rêves les plus fous, nous n’aurions jamais pu imaginer cela ! Aussi ces trois jours ne pouvaient-ils être qu’un grand bonheur !
- Un bonheur ne venant jamais seul, vous avez une autre actualité très importante. Quelle est-elle ?
- Notre groupe Barbara Furtuna s’entoure d’un nouveau partenaire puisque nous venons de signer avec Universal Music. C’est le départ d’une nouvelle aventure. Ce nouveau partenariat nous permettra, peut-être, d’avoir un écho plus large par rapport à ce que nous faisons depuis maintenant 12 ans. Nous n’avons jamais reçu l’appui de grands médias. Nous avons tout fait par nous-mêmes, à la force du poignet, et grâce aussi à des collaborations. L’Arpeggiata nous a fait confiance et ouvert les portes de scènes inaccessibles comme le Carnegie Hall de New-York, le Konzerthaus de Berlin, la Chapelle Royale de Versailles… Le 21 janvier prochain, nous participerons à un concert « Les Nuits de la Voix » au théâtre du Chatelet qui est une des plus grandes scènes parisiennes. Nous la partagerons avec d’autres artistes.
- L’album avec Placido Domingo et la signature chez Universal dans le même temps, n’est-ce pas une double consécration ?
- Ce sont de belles surprises ! Des concrétisations. C’est une reconnaissance. Nous travaillons depuis tellement longtemps qu’il n’y a pas vraiment de place pour le hasard. Quand des professionnels de ce niveau-là vous font confiance, c’est une grande responsabilité puisqu’on sait que tout le travail reste à faire. Nous allons continuer à créer en voyant le monde plus grand, mais en gardant notre couleur, notre âme, nos convictions, notre attachement pour notre île, cette dimension qui fait notre réalité et notre identité. C’est, pour nous, l’essentiel.
Propos recueillis par Nicole MARI
L’album Encanto del Mar sort le 7 octobre chez Sony Classical. Il peut être précommandé, dès à présent, sur ITunes et sur toutes les plateformes habituelles.
Pour écouter des extraits de l'album
Pour voir le Teaser de l'Album
barbara-furtuna.fr
https://www.facebook.com/BarbaraFurtunaPageOfficielle?ref=hl
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