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Avec la démolition du "Mara Beach" à Calvi c'est toute une page d'histoire qui se tourne


Jean-Paul-Lottier le Lundi 14 Janvier 2019 à 15:05

Comme prévu, à l'initiative de son propriétaire Franck Maraninchi une pelle mécanique de l'entreprise Suzzoni a procédé à la démolition de l'établissement de plage "Mara beach", mettant un terme à 21 années d'activité et à une longue série de procédures judiciaires



Avec la démolition du "Mara Beach" à Calvi c'est toute une page d'histoire qui se tourne

Les yeux rougis par les larmes difficilement contenues, le regard perdu, réconforté par son avocate Me Joelle Acquaviva, présente sur les lieux  et des amis proches, Franck Maraninchi a vu aux premiers coups de la pelle mécanique, 21 années de sa vie, de labeur, s'effondrer comme un château de carte. Il aura fallu moins de 30 minutes à l'entreprise Suzzoni pour faire disparaître cet établissement de plage devenu au fil des années un endroit incontournable de la célèbre station touristique de Calvi.
Le festival de musique "Calvi on the rock" perd la aussi l'un des ses principaux ambassadeurs.
"C'est triste de voir cet établissement disparaître. C'était un  endroit ouvert à tous. On pouvait faire notre promenade et s'arrêter pour se désaltérer ou manger un morceau" dira avec nostalgie mais aussi beaucoup de peine un témoin qui a assisté à cette démolition.


La boule au ventre, Franck Maraninchi se refusera à parler. Simplement, il n'aura de cesse que de répéter : " Ce sont 21 années de ma vie qui s'écroulent".
Les médias nationaux et régionaux sont là pour assister à la scène.
Le 11 décembre dernier, en exclusivité pour Franck Maraninchi annonçait:
"Je suis fatigué de ce combat que je mène depuis des années pour tenter de garder mon terrain et de travailler sur ma terre. Oui, aujourd'hui, même si ce n'est pas de gaieté de cœur, je vous annonce que je jette l'éponge. Je n'ai plus ni la force physique ni morale de poursuivre ce combat et j'ai encore moins les moyens de faire face d'un point de vue financier. A ce jour, l'astreinte qui m'est infligée dépasse les 180 000€.
Je n'ai pas d'autre choix que de m'incliner.
Avec cette décision, ce sont 21 années de ma vie qui s'écroulent et j'avoue que je suis anéanti et triste"
devait il dire avant de poursuivre:
Dans l'immédiat j'ai des contrats de travail à honorer mais tout devrait rapidement rentrer dans l'ordre et, aussitôt après, une entreprise du BTP viendra tout raser. Ce sera la fin de Mara Beach".


Le 30 décembre dernier, pour une des toutes dernières fois, ils étaient plus de 150 à profiter d'une belle journée ensoleillée pour faire la fête et rendre hommage à ce personnage qu'est Franck Maraninchi.
Par sa gentillesse, son professionnalisme, son sens de l'accueil et de l'hospitalité, Franck s'est forgé une belle réputation. "Mara Beach" était connu à travers le monde.
On se souvient aussi qu'en juillet 2016,une équipe de Entourage Prod dirigée par Christophe Pietri et Karine Aday a posé ses caméras durant trois semaines dans la station touristique pour réaliser un grand format de 66 minutes sur ce lieu classé en 4e position  du Top 10 des stations balnéaires incontournables. Sujet diffusé le mois suivant dans un grand format de 66 mn sur M6 et dans lequel "Mara Beach" et son patron vedette occupaient une large place.
Aujourd'hui, tout ça est du passé, une page de l'histoire se tourne mais les souvenirs resteront. à jamais gravés.

Tous les recours juridiques ont été épuisés
Aujourd'hui que l'établissement est démoli et que l'ordre d'expropriation a été exécuté, on ne va pas refaire tout l'historique de cette affaire à plusieurs tiroirs.
On retiendra simplement que le Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres a engagé et poursuivi sa procédure concernant l'expropriation du site de la Revellata, sur le territoire de la commune de Calvi, afin d'assurer la maîtrise foncière de cette presqu'île et des espaces voisins  cédés en 2008 par la commune de Calvi.
Le 7 décembre 2012,  la déclaration d'utilité publique et de cessibilité a été prononcée par le préfet de Haute-Corse.
Le 8 janvier 2013, le juge de l'expropriation du TGI de Bastia a rendu une ordonnance prononçant au profit du Conservatoire du littoral l'expropriation pour cause d'utilité publique des immeubles, portions d'immeubles et droits réels immobiliers en vue de l'acquisition foncière de la presqu'île de la Revellata, notamment les parcelles cadastrées AD 10 à 19, AD 43 et AD 57 d'une superficie totale de  124 660 m2 appartenant en indivision à Franck Maraninchi.
Franck Maraninchi a alors entamé une longue procédure pour contester cette expropriation, en vain.
On retiendra au final que par  jugement du 8 septembre 2016, le juge de l'expropriation du TGI de Bastia a fixé à la somme de 69 563€ l'indemnité de dépossession due par le Conservatoire du Littoral.
Franck Maraninchi et consorts ont interjeté appel de cette décision .
En raison de ce refus, le conservatoire a consigné cette somme le 2 mars 2017 à la caisse des dépôts et consignation de Poitiers.
Par acte d'huissier en date du  21 mars 2018, le conservatoire  a fait assigner Franck Maraninchi et consorts devant le juge de l'expropriation auprès du TGI de Bastia.
L'affaire a été appelée à l'audience du 17 avril 2018 et mise en délibérée au 15 mai 2018.

Expropriation confirmée avec au besoin  le concours  de la force publique et une astreinte de 1 000€ par jour de retard
Au final, le TGI a ordonné en appel l'expulsion de Franck Maraninchi et consorts avec au besoin le concours de la force publique, souis astreinte de 1000€ par jour de retard à compter du délai d'un mois à partir de la signification de cette décision de justice, ultime recours.
Entre temps, on le sait une manifestation de soutien a réuni au mois de Mai 2018 près de 5 000 personnes devant la sous-préfecture de Calvi alors qu'un collectif se constituait et qu'une audience était demandée au représentant de l'Etat.
Une demande d'arrangement pour que le conservatoire rétrocède à la commune de Calvi une petite parcelle de terrain pour que Franck Maraninchi puisse poursuivre une activité a également échoué.
Acculé, Franck Maraninchi n'avait d'autres ressources que de "jeter l'éponge".


C'est donc une institution qui disparaît de la station touristique de Calvi.
Contrairement à ce que certains ont pu évoquer, cette démolition est bien liée à une décision d'expropriation rendue par le TGI de Bastia au profit du conservatoire du littoral et non à une procédure liée au décret plage de 2006 qui est une autre affaire, concernant notamment les établissements de plage de Calvi et de l'Ile-Rousse.
Comme cela a été dit sur CNI, la "Mayakoba" à Calvi et le "Marinella" à l'Ile-Rousse ont pour l'heure respecté le protocole d'accord signé avec l'Etat pour une démolition qui était prévue au 31 décembre 2018.
Franck Maraninchi retrouvera t-il une possibilité de poursuivre son activité ailleurs?
Pour l'heure, l'intéressé se refuse à tout commentaire sur cette démolition et sur l'éventualité d'un nouveau départ.
Affaire à suivre.