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Ajaccio : L’identité corse s’invite dans le débat municipal


Julia Sereni le Mardi 26 Janvier 2021 à 07:51

À l’occasion d’une délibération concernant la festa di a lingua, un débat animé a opposé majorité et opposition lors du conseil municipal ce lundi 25 janvier. En cause, des propos tenus par l’adjoint au maire Christophe Mondoloni dans la presse locale sur la situation de la langue corse et l’intégration des nouveaux arrivants.



Laurent Marcangeli, maire d'Ajaccio (Photo archives CNI - Michel Luccioni)
Laurent Marcangeli, maire d'Ajaccio (Photo archives CNI - Michel Luccioni)
Après deux heures d’un conseil municipal ronronnant, c’est la présentation de l’avant-dernière délibération qui a finalement réveillé le débat. Son sujet semblait pourtant consensuel : l’organisation de la festa di a lingua pour cette année. Mais c’est son rapporteur, l’adjoint au maire Christophe Mondoloni, qui a essuyé les critiques de l’opposition. Car au-delà des conditions du déroulement de la festa, jugées incertaines par Vannina Angelini-Buresi du groupe Pà Aiacciu, c’est un autre point qui préoccupe l’élue : « Comme on a pu le lire ce matin dans la presse, vous trouvez que la langue se porte plutôt bien, que les Ajacciens sont fidèles à leur langue, que les nouveaux habitants qui arrivent en masse s’intègrent assez bien et veulent la parler eux-aussi... Nous avons été très étonnés de cet article et nous vous demandons quels sont vos projets ».
 
Un étonnement partagé par Jean-François Casalta : « Je ne pensais pas que la mairie avait cette vision de l’identité et de la culture ajaccienne. On réduit la culture et le patrimoine de cette ville à quelques personnages. J’ai lu que la langue corse ne se portait pas si mal que ça, mais c’est nier toutes les études sociolinguistiques menées jusqu’à présent, c’est nier que la transmission intergénérationnelle, c’est 2 % ». Et de revenir sur l’aspect éminemment politique de la langue : « C’est une construction, on a imposé le français en tapant sur les doigts de nos grands-parents. Sans cooficialité, la langue va mourir. L’apport des populations allogènes dans de trop grandes proportions bouleverse les équilibres et notre identité y perd. Nous sommes des militants de la langue et de la culture et le discours 'tout va bien', nous pouvons pas l’entendre ». 
 
Face à ces critiques, Christophe Mondoloni égrène les différents dispositifs mis en place par la municipalité en faveur de la langue : certificati di a lingua, bains linguistiques, signalétique, aide aux associations... invitant l’opposition à venir « voir le travail du service, augmenté dans son nombre et sa qualité ». Mais c’est finalement le maire Laurent Marcangeli qui volera au secours de son adjoint, rappelant la tradition d'accueil de la cité impériale. « Simu tutti paisani ! » lance t-il à l'assistance. « Simu tutti paisani ma ùn avemu micca tutti i pedi trosci » répondra du tac au tac Jean-François Casalta.

 « L’intégration se passe plutôt bien chez nous, peut-être mieux qu’ailleurs » poursuit Laurent Marcangeli. « On peut toujours mieux faire, mais Ajaccio a toujours été une ville accueillante. Il ne faut pas nier que nous avons un problème de perte de repères et d’identité et c’est un sujet de société qui ne se résume pas à la Corse ». Sur le devenir de la langue, le maire se fait moins optimiste que son adjoint : « Je pense que la langue est un sujet difficile, je pense qu’elle va mal. Je pense que mon ami a voulu teinter son propos d’un peu d’optimiste, peut-être béat... ».
 
L’intéressé reprend la parole : « Dans cet article, j’ai voulu faire une photo de la société. Vous avez omis de dire que j’ai demandé aux Ajacciens d’être militants et que la langue était extrêmement importante. Peut-être que j’ai voulu aussi piquer les gens, vous, j’ai réussi ! » lance t-il à l’adresse des groupes d’opposition. Sans aucun doute.