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Syndrome de Diogène - Comprendre, agir en famille, protéger sans juger


La rédaction le Mardi 11 Novembre 2025 à 11:12

Dans l’île, où la famille et le voisinage tiennent une place centrale, certaines détresses restent discrètes. Le “syndrome de Diogène” en fait partie. Comment repérer sans stigmatiser, aider sans brusquer, protéger sans rompre le lien ? Éclairage, repères pratiques et contact d’une association d’appui.



(Image d'illustration Freepik)
(Image d'illustration Freepik)

Un sujet sensible… à traiter avec humanité

En Corse, les récits de solidarité sont nombreux : un cousin qui passe voir, un voisin qui frappe à la porte, un membre de la fraterna qui prend des nouvelles. Pourtant, derrière certains volets clos, des habitants se débattent avec une réalité difficile : un logement qui se remplit au point d’étouffer la vie quotidienne, une honte qui empêche d’ouvrir, une solitude qui grandit.
Le terme souvent employé est “syndrome de Diogène”. Il ne s’agit pas d’une étiquette médicale figée, mais d’un tableau de comportements : accumulation envahissante, négligence du lieu de vie, isolement et déni de la gravité de la situation. Ce tableau peut concerner tout âge, même s’il est plus fréquemment observé chez les personnes âgées ou fragilisées par un deuil, une maladie, une dépression.

Ce qui compte, ici, c’est l’approche. Parler de sécurité et de bien-être plutôt que de “désordre”, éviter les jugements, proposer une aide graduée et respectueuse. En Corse plus qu’ailleurs, la famille est souvent le premier rempart, à condition d’être entendue et accompagnée.

“On ne vient pas pour faire du tri, on vient pour faire alliance”

La première clé, c’est le lien de confiance. Le proche qui s’inquiète n’a pas à se transformer en “gendarme du rangement”. Il peut, en revanche, ouvrir la discussion sur un point concret et non culpabilisant : garder un passage libre jusqu’à la porte, sécuriser une plaque de cuisson, laisser un accès à la salle d’eau.
Le deuxième levier, c’est le rythme : une pièce, un coin, un meuble… pas tout, pas tout de suite. Mieux vaut une avancée modeste avec le consentement de la personne que trois sacs poubelles arrachés qui feront naître colère, repli et… ré-accumulation.

Troisième principe, essentiel : ne pas être seul. En Corse, l’entourage a du poids. Mais il ne peut pas tout. L’appui d’un médecin traitant, d’un service social communal, d’une association spécialisée permet de partager la charge et d’éviter les impasses relationnelles.

 

Famille et voisins, des alliés précieux en Corse

Dans l’île, le réseau familial et le voisinage fonctionnent souvent comme un système d’alarme bienveillant.
Concrètement, l’entourage peut :

  • Prendre rendez-vous chez le médecin traitant (avec la personne concernée quand c’est possible) ;

  • Contacter le CCAS (ou la mairie) pour une évaluation à domicile ;

  • Proposer un planning simple : 45 minutes d’accompagnement, deux fois par semaine, sur un objectif précis (dégager le lit, sécuriser la cuisine) ;

  • Appuyer le consentement : expliquer à la personne qu’elle garde la main sur ce qui sort, ce qui reste, ce qui bouge.

Et la sécurité dans tout ça ?

Le risque principal n’est pas de “mal faire”, mais de laisser la situation s’installer jusqu’à l’impasse. Sans dramatiser, un logement saturé peut compliquer l’accès aux soins, aggraver des problèmes cutanés ou respiratoires, isoler davantage et, parfois, mettre en difficulté le voisinage (odeurs, nuisibles, humidité).
L’idée n’est pas de pointer du doigt, mais de réduire les ennuis du quotidien : pouvoir ouvrir, se laver, cuisiner sans danger, se chauffer correctement, accéder aux papiers administratifs. Ce socle de sécurité est le meilleur point d’appui pour la suite.

 

L’association “Survivre à l’insécurité – Diogène Asso”

Qui ? Une association dédiée à l’accompagnement des personnes présentant des caractéristiques du syndrome de Diogène et de leurs familles.
Où ? Partout en France, avec des interventions à distance (écoute, coordination, plan d’action) et, lorsque nécessaire, sur place avec des partenaires locaux. L’association indique être déjà intervenue dans des pays limitrophes pour soutenir des familles françaises ou francophones en difficulté.
Avec quel esprit ? Dignité, consentement, progressivité. L’objectif n’est pas de “vider”, mais de rendre possible une vie quotidienne plus sûre et plus sereine.
Gouvernance. L’association est présidée par Pierre LUDOSKY, fondateur, qui porte un plaidoyer simple : ne jamais réduire la personne à son logement.
Contact et ressources : diogene-asso.org

 

“En Corse, ce que l’on sait”

Les services de secours de l’île interviennent régulièrement pour des difficultés domestiques et des logements encombrés. À ce jour, peu d’affaires sont publiquement rattachées au “syndrome de Diogène” dans les communiqués. Cela ne signifie pas que la réalité n’existe pas : elle est surtout silencieuse. Elle se joue derrière des portes qu’on n’ose plus ouvrir, dans des familles qui s’épuisent et dans des immeubles où l’on s’inquiète sans savoir comment aider.
C’est précisément là que l’approche corse — le sens de la famille, la proximité, la parole directe — peut faire la différence si elle s’appuie sur des relais professionnels.

 

Vrai / Faux

  • “C’est un problème de propreté.” Faux. C’est d’abord une détresse humaine, où l’accumulation sert souvent de rempart contre la peur, le deuil, la solitude.

  • “Il suffit de vider.” Faux. Sans accompagnement (santé, social, famille), la situation revient, parfois plus dure.

  • “On ne peut rien faire si la personne refuse.” Vrai et faux. On ne peut pas imposer brutalement. Mais on peut préparer, sécuriser des points clés, multiplier les petites portes d’entrée (visite médicale, artisan, aide à domicile), maintenir le lien, et coordonner avec des professionnels.

 

Vivre mieux, pas “faire place nette”

La Corse connaît la force du rassemblement. Appliquée à ces situations, elle change tout : on écoute, on respecte, on priorise. On avance ensemble, pas à pas, pour retrouver une vie possible – une porte qui s’ouvre, une table où l’on mange, un lit où l’on se repose, une douche accessible, des papiers rangés.
Le chemin peut être long. Mais il est moins difficile quand on n’est pas seul.

 

Ressource et contact

 Survivre à l’insécurité – Diogène Asso — informations, écoute, coordination d’actions partout en France, appui ponctuel à l’étranger.
Pour une demande d’aide, un témoignage ou un conseil, un formulaire de contact est disponible sur le site.