Quels problèmes poserait le vieillissement de la population corse dans les années à venir ?

L'importance du phénomène de vieillissement sur l'île pourrait se décupler. Ce ne sont pas des prévisions mais bien une projection de population qu'a réalisé l'INSEE au travers d'une étude pour voir vers quoi tend la Corse, dans l'hypothèse où les récentes évolutions démographiques se poursuivaient pour les cinquante prochaines années. Le rapport, co-écrit par deux statisticiens, fait état d'une population aux âges de plus en plus élevés, passant de 110 à 240 seniors (65 ans et plus) pour 100 jeunes (moins de 20 ans) entre 2018 et 2070.

"Maintenir un équilibre entre les différentes tranches d'âge est une problématique qui concerne toutes les populations du monde, tempère Michel Castellani, député de la première circonscription de Haute-Corse. On a des populations très jeunes où la natalité est explosive et d'autres très mures. Sur le plan strictement démographique, cette tendance au vieillissement pose la question du renouvellement des générations puisque plus une population est âgée, plus le taux de natalité tend à baisser."

C'est effectivement ce que projette l'INSEE, expliquant que l'on passerait de 2800 naissances en 2018 à 2200 dans cinquante ans. Et parmi les impacts forts de cette chute, l'économie française et insulaire - déjà en difficultés - en ferait obligatoirement les frais. "Aujourd'hui, la démographie est soutenue avec toute une armature : les aides aux familles, les impôts dégressifs, les aides de rentrée scolaire, détaille le docteur en sciences économiques. On pourrait imaginer d'autres aides plus directes mais ça poserait là un autre problème : celui de l'équilibre budgétaire, car la France est en déséquilibre majeur dans ses finances publiques. Les moyens sont très limités, pour ne pas dire inexistants."

Avec un âge moyen passant de 44 à 52 ans, la Corse perdrait nettement en dynamisme et le nombre de personnes en capacité de travailler diminuerait de manière exponentielle. Dans un contexte actuel où l'île, proche du plein emploi avec un taux de chômage de 6%, figure comme la deuxième région de France au taux le plus faible, le monde du travail serait fortement touché. "C'est une question qui pose problème à tous les niveaux et notamment, celui du déséquilibre du rapport entre actif et non actifs pour les caisses de retraite, poursuit Michel Castellani. Il y aura aussi la problématique de la vitalité de ces personnes."

En 2070, plus d'un tiers des habitants de l'île devraient avoir au moins 65 ans. Une énorme proportion induisant forcément la prise en compte du facteur sanitaire, indissociable d'un âge avancé. Le système de santé, déjà en pleine transformation à l'échelle nationale, pourrait nécessiter une refonte majeure sur l'île. 

"La question de la solitude se pose, car il y aurait vraiment un problème d'équilibre dans les familles, parce qu'on a énormément de familles d'une personne qui sont souvent des veuves ou veufs, et la précarité qui va souvent avec, appuie l'élu nationaliste. Et puis, la culture insulaire serait aussi impactée. La démographie est indissociable de la vie culturelle : quand il y a une vitalité, il y a une transmission naturelle d'un certain nombre de valeurs au travers des générations. Mais ce système, troublé par un mouvement migratoire intense, fonctionne mal."

Cette étude a pour but de mettre en lumière ce qui arriverait si la situation évoluait de manière identique pour les cinquante prochaines années. Mais les facteurs extérieurs et les diverses évolutions impacteront forcément ces projections, qui ne sont en aucun cas des prévisions.