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Pierre Mattei : « Nos concurrents ont refusé de diviser l’offre, c'est illégal ! »


Nicole Mari le Dimanche 9 Juin 2013 à 23:13

Lors de la dernière session de l'assemblée de Corse, les élus territoriaux ont voté, à l’unanimité, la poursuite des négociations sur la future Délégation de service public (DSP). Celles-ci se feront, en direct, avec les actuels délégataires : SNCM et CMN. La Corsica Ferries, qui a présenté une offre incomplète sur trois lignes, est, de fait, hors jeu. Son Directeur général, Pierre Mattei, explique, à Corse Net infos, que les dés sont jetés en faveur de la SNCM. Pour lui, refuser de diviser l’offre étant illégal, il n’exclut pas d’autres recours en justice.



Pierre Mattei, Directeur général de Corsica Ferries France.
Pierre Mattei, Directeur général de Corsica Ferries France.
- Comment réagissez-vous à la décision de la CTC de poursuivre la négociation avec ses partenaires historiques ?
- C’est une étape de la procédure. Je crois comprendre que la Corsica Ferries ne va pas être retenue. Mais, ça n’étonnera personne ! La procédure, maintenant, va probablement aller à son terme. Nous évaluerons ses résultats et nous en tirerons les enseignements qui seront nécessaires à ce moment-là. 
 
- Selon vous, les dés sont-ils jetés ?
- Ils sont jetés, en tous cas, en ce qui concerne les vainqueurs de l’appel d’offres ! Cela ne fait plus aucun doute. Il a été dit clairement que nous ne serions pas retenus. J’observe que la raison pour laquelle nous ne sommes pas retenus est unique et écrite noir sur blanc dans le rapport. C’est tout simplement parce que nos concurrents ont refusé de diviser l’offre, ce qui est illégal ! Ils ont fait en sorte que nous ne puissions pas être retenus, ne serait-ce que sur une ligne !
 
- Qu’est-ce qui est illégal ?
- En 2007, l’Autorité de la concurrence a jugé que la SNCM abusait de sa position dominante sur ce marché dès lors qu’elle proposait une offre globale et indivisible. Cette décision a été confirmée par la Cour de cassation. Le rapport de l’Exécutif précise que la SNCM a fait une offre globale et indivisible, ce qui rend impossible, pour l’Assemblée de Corse, l’attribution à Corsica Ferries d’une, deux ou trois lignes sur les cinq de la DSP. C’est la seule raison technique pour laquelle nous n’avons pu être retenus. Il y a, aussi, des raisons politiques et sociales. Mais, nous aurions aimé que cela soit dit plus clairement.
 
- Le président Giacobbi a dit en séance que vous avez fait une offre incomplète pour ne pas remporter l’appel d’offres. Est-ce vrai ?
- Si on ne veut pas répondre à un appel d’offres, on ne perd pas son temps à y répondre ! Encore une fois, l’appel d’offres était ligne par ligne. Corsica Ferries n’a jamais prétendu répondre à l’ensemble de la desserte, mais a simplement fait des propositions différentes qui permettaient à l’Assemblée de Corse de choisir au maximum trois lignes pour Corsica Ferries. Visiblement, l’attitude de nos concurrents, qui savaient qu’ils étaient incontournables et en position dominante sur cet appel d’offres, a fait que cette hypothèse d’une, deux ou trois lignes attribuées à Corsica Ferries est totalement tombée dans la mesure où ils refusaient de diviser leur offre.
 
- Aimeriez-vous participer aux nouvelles négociations ?
- A écouter les commentaires du président de l’Office des transports, il est clair que ces négociations ne vont être menées qu’avec la seule SNCM. Nous sommes évidemment à leur disposition s’il devait en être autrement. Nous attendons de leurs nouvelles.
 
- Y-a-t-il, dans cette délibération, des éléments qui vous paraissent positifs ?
- Je retiens, essentiellement, le fait que les élus ont bien clarifié les montants qui seront concernés par la DSP et confirmé le service de base. C’est plutôt positif car ces deux éléments-là sont essentiels. Le montant, qui sera attribué pour la DSP, est strictement défini comme étant le montant qui est nécessaire pour couvrir la vraie définition du service public. Cette définition a été réaffirmée par la récente décision de la Commission européenne, à savoir le service de base au départ de Marseille pour les cargos mixtes.
 
- Envisagez-vous un recours sur l’offre globale ?
- Je ne veux préjuger de rien ! Nous sommes extrêmement favorables à une stabilité juridique de cette DSP. Le droit a été dit en grande partie par les récentes décisions de la Commission européenne. Nous évaluerons ce que nous ferons à la lueur de deux choses : ce qui sera réellement attribué, pour combien et à qui ? Nous devrions, à priori, le savoir, cet été. Et, nous attendons les résultats des procédures en cours, en particulier la procédure auprès de la Commission européenne et celle auprès de la Cour administrative d’appel de Marseille qui devrait rendre sa décision avant la fin de l’année.
 
- On vous accuse d’être procédurier. Que répondez-vous ?
- Contrairement à ce que disent nos détracteurs, nous ne sommes pas des amoureux de la procédure. Un recours doit avoir un sens, une portée économique. Nous ne faisons pas des recours pour faire des recours ! Pour nous, la procédure n’est là que pour une seule chose : défendre les intérêts de la concurrence et éviter que des subventions soient détournées de leur objectif, c’est-à-dire détournées du service public pour faire concurrence à des compagnies comme la nôtre qui n’en bénéficie pas. Les services, que nous assurons sur les lignes de Nice, Toulon ou l’Italie, seront, dorénavant, totalement exempts de subventions.
Propos recueillis par Nicole MARI