Corse Net Infos - Pure player corse

Nanette Maupertuis : « La centralisation croissante du futur budget européen menace la démocratie »


Nicole Mari le Vendredi 17 Octobre 2025 à 08:17

Lors de sa session plénière qui s’est tenue du 13 au 15 octobre à Bruxelles, le Comité européen des régions (CdR) s’est opposé à la réforme de la politique de cohésion et à sa fusion avec la politique agricole commune dans le cadre du budget 2028-2034 de l’Union européenne. La présidente de l’Assemblée de Corse, Nanette Maupertuis, présidente du groupe politique Alliance Européenne (EA) au CdR explique que cette réforme, qui conduirait à une plus grande centralisation entre les mains de la Commission et des Etats, menace la démocratie et ignore les besoins spécifiques des territoires. Vidéos de TotalUE Productions.



Nanette Maupertuis, présidente de l’Assemblée de Corse, présidente du groupe politique Alliance Européenne (EA) au Comité européen des Régions, entourée de ses collègues, proteste contre la réforme de la politique de cohésion. Crédit photo @European Union/Octavian Carare
Nanette Maupertuis, présidente de l’Assemblée de Corse, présidente du groupe politique Alliance Européenne (EA) au Comité européen des Régions, entourée de ses collègues, proteste contre la réforme de la politique de cohésion. Crédit photo @European Union/Octavian Carare
La politique de cohésion et la politique agricole commune (PAC) fusionnées dans un seul et même grand fonds, c’est l’une des propositions de la Commission européenne pour le budget 2028-2034. Elle suscite la vive opposition des dirigeants locaux et régionaux de l’Union européenne (UE), notamment celle du Comité européen des régions (CdR) et de nombreux parlementaires. Lors de sa session plénière qui s’est tenue du 13 au 15 octobre à Bruxelles, le CdR a adopté à l’unanimité une résolution pour protester contre le regroupement de ces fonds. « La politique de cohésion intéresse tous les territoires, qu’ils soient développés, en transition ou moins développés. La proposition, qui a été faite par la Commission durant la période estivale, interpelle les élus régionaux et locaux parce qu’elle propose que soient montés des plans nationaux et régionaux. Les élus régionaux locaux et régionaux sont inquiets parce qu’ils ont le sentiment qu’il va y avoir une recentralisation de la politique de cohésion », commente la présidente de l’Assemblée de Corse, Nanette Maupertuis, présidente du groupe politique Alliance Européenne (EA) au Comité européen des Régions et présidente de la Commission des îles de la CRPM.
 
Une nationalisation des fonds
Cette réforme, si elle était adoptée, pourrait donc conduire à une plus grande centralisation entre les mains de la Commission européenne et à une nationalisation de la politique de cohésion, de la politique de la pêche et de la politique agricole, les mettant ainsi en concurrence. « La politique de cohésion vise à équiper sur le plan infrastructurel et à accompagner des populations locales dans leurs projets économiques, culturels, mais aussi dans leurs disparités sociales. On attend qu’une politique de cohésion soit coconstruite entre les autorités nationales et les autorités locales et régionales. Or, ce qui semble se préfigurer, c'est une recentralisation sous couvert de simplification. En réalité, les politiques centralisées ne fonctionnent pas », prévient Nanette Maupertuis. Comme elle l’explique en vidéo :

« Les politiques centralisées ne fonctionnent pas »

Une nécessité pour la Corse
Dans sa résolution, le CdR précise qu’une politique de cohésion territorialisée est le principal moteur à long terme de l’UE en matière de compétitivité régionale, de développement durable et d’inclusion sociale. C'est pourquoi elle devrait continuer à être accessible à tous les territoires de l'UE, avec des dotations financières pour toutes les catégories de régions, des moins développées aux plus développées. C’est une nécessité pour une île comme la Corse, rappelle la présidente Maupertuis : « Pour la Corse, la politique de cohésion, ce sont des années d’investissement dans les infrastructures de transport, la gestion de l’eau, le domaine culturel, les projets Interreg de coopération transfrontalière avec l’Italie en particulier. Ce sont aussi des recherches sur les énergies renouvelables, la gestion des risques majeurs, l’université avec le capital humain... C’est véritablement une politique essentielle dont nous avons encore besoin parce que nos indicateurs de PIB (Produit intérieur brut) ne sont pas encore très performants. La Corse a besoin de se transformer et d’être arrimée au continent européen ». Comme elle l’explique en vidéo :

« La Corse a besoin des fonds européens pour la gestion de l'eau et la coopération transfrontalière »

Une menace pour la démocratie
Cet instrument de la solidarité européenne, qui permet aux régions et territoires de travailler ensemble et surtout d’avoir des niveaux d’infrastructures et de développement au plus proche de la moyenne européenne, est depuis longtemps menacé par des coupes sombres ou par un risque de centralisation des fonds. Le risque actuel est d’autant plus grand qu’aucun contrôle sur les investissements régionaux n'est prévu par le Parlement européen et les parlements nationaux ou régionaux. Il n'y a pas non plus de garantie que toutes les régions aient accès à la politique de cohésion. En outre, la fusion des fonds de cohésion et de l’agriculture dans une enveloppe nationalisée unique sans critères d’allocation clairs mettrait les agriculteurs en concurrence avec les communautés locales et déconnecterait l’UE de ses régions et villes. « La centralisation croissante au sein du nouveau cadre financier pluriannuel menace la démocratie. Elle ignore les besoins spécifiques des territoires, fragilise leur autonomie et limite leur capacité à agir localement. Décider depuis le sommet au lieu de laisser les régions choisir va à l’encontre des principes mêmes de l’Union européenne : la subsidiarité et la voix des peuples », estime Nanette Maupertuis. Le CdR appelle le Parlement européen et le Conseil « à prendre la responsabilité de mettre un terme à ces plans et d’éviter une aggravation des conflits institutionnels et du chaos ». Affaire à suivre…
 
N.M.