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Marcel Rufo aux lycéens de Montesoro : "Je vais revenir"


le Vendredi 8 Février 2013 à 20:54

Marcel Rufo s'est rendu, Vendredi, aux Lycées Paul-Vincensini et Fred-Scamaroni de Bastia pour rencontrer les élèves de la classe ULIS (unité localisée pour l'inclusion scolaire) puis deux classes de ces établissements pour, en compagnie de leurs professeurs et les professeurs documentalistes, débattre sur l'importance du lien et de la transmission entre grands-parents et petits-enfants à partir de son dernier livre « Grands-Parents : à vous de jouer ». Un débat au cours duquel interrogé sans discontinuer une heure durant, le pédo-psychiatre a fait sourire et réfléchir. L'interview de Marcel Rufo par les élèves.



Marcel Rufo aux lycéens de Montesoro : "Je vais revenir"
- Souhaiteriez, si vous êtes grand-père, que votre petit-fils se prénomme Marcel ?
- Ce serait un handicap pour lui. Je dois ce prénom à des amis Juifs de Toulon que mon père a "planqué" pendant que d'autres Juifs connaissaient les affres de la déportation. Marcelle est devenue ma marraine. Un jour que l'on demandait à mon père pourquoi il n'a pas prétendu au titre de 'Juste" il a répondu : Je n'ai pas planqué les Amar parce qu'ils sont Juifs mais parce qu'ils sont des amis. Mais si ma fille donnait ce prénom à son enfant elle serait deshéritée…
- Aimez-vous encore votre métier ?
- Avant sa mort, j'ai fait sortir Michel Soulé, qui m'a inspiré ce livre, de l'hôpital où il était, pour aller déguster un Brouilly et partager une viande que je lui ai coupée. Il avait 90 ans et il m'a affirmé qu'à cet âge là aussi, quand faisait ce métier, on changeait d'avis. C'est pour ça que j'aime mon métier. Je crois même que l'on naît pédo-psychiatre.
- Quels genres d'enfants rencontrez vous ?
- Des normaux dont j'essaie de ne pas aggraver le cas. Des attaqués par l'estime de soi. Ou par des parents qui les déçoivent par rapport à ce qu'ils attendent d'eux. Des enfants qui battent leurs parents. D'autres qui souffrent de troubles alimentaires. Ou en double perdition à cause de la séparation des parents.
- Avez-vous été un bon père pour votre fille ?
-
Lors d'un déjeuner commun avec Pierre Moscovici je me suis entendu dire : " Les enfants de psy devraient être pensionnés". Il est vrai que l'on ne se rend pas compte que l'on est psy même à la maison. Mais Alice a beaucoup plus bénéficié de sa mère que moi. J'ai été un père moyen.
- Quelles relations aurez-vous avec vos petits-enfants ?
- Eugénie, ma grand-mère, c'était la force tranquille. Elle avait confiance en ses petits enfants . J'espère la même avec les miens. En tout cas un petit-fils ou une petite-fille me transformera en grand-père.
- Comment vivez-vous votre notoriété au quotidien ?
- Il ne faut pas croire à l'image que l'on est. Surtout en cas de succès. Mais à la télé je préfère la radio. On est presque dans la confidence lorsque le message vous atteint dans une voiture. Mais mon rêve était de faire mon métier sans la notoriété qu'il entraîne.
- Pourquoi ce livre ?
- Quand on a votre âge on pense toujours à l'enfant imaginaire que l'on aura. Mais pas au petit-enfant. Pourtant ça vous arrivera même si cela paraît tellement loin. 

Avec le RCT, un petit-enfant du rugby ?

Marcel Rufo aux lycéens de Montesoro : "Je vais revenir"
On m'appelait "épuisette" parce que je ratais tous les ballons. Je suis de la génération de Daniel Herrero. Le RCT Mayol. Mon père me les a fait connaître tout petit en tribune populaire. Le rugby, c'est un jeu compliqué qu'il comprenait. Un jour, après un "tampon" de l'un des géants Spanghero qui n'avait pas apprécié que je me sois joué de lui, j'ai toujours fais en sorte de me débarasser du ballon au plus tôt. C'est ce jour là que mon père m'a dit : "Petit fais des études, laisse tomber le rugby "
En 87, l'année du titre de champion de France, j'étais le médecin du club. A notre retour, juchés sur un camion, 40 000 personnes nous attendaient dans les rues de Toulon. Mon père qui m'avait demandé de ramener "le bout de bois à Toulon" m'en a voulu de ne pas l'avoir  vu et… regardé dans la foule ! Aujourd'hui Toulon, c'est Chelsea…

Marcel Rufo aux lycéens de Montesoro : "Je vais revenir"
- Avez-vous été touché par certains de vos patients ?
- Je me souviens de Michel qui avait 8 ans. Il était atteint d'un cancer et trouvait toujours le moyen de dérider les gens qui étaient autour de lui. Il est mort il y a 25 ans, mais  c'était comme si c'était hier. Il y aussi le cas des deux premiers anorexiques que j'ai soigné. Ils se sont pendus. Ils sont toujours dans ma tête.



Les grands-parents : Un socle

"Les grands-parents sont un socle sur lequel on peut s'appuyer. Ils sont là. Au même endroit. Ne déménagent pas. Ils nous construisent pour l'avenir. Et on se confie à eux bien plus que l'on ne le fait avec ses parents."