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Les ministres de l'inutile


Jacques RENUCCI le Vendredi 18 Mai 2018 à 22:00

Tout un gouvernement dispersé à travers le pays pour expliquer la politique de l'Etat. Triste anniversaire sur fond d'un dialogue depuis longtemps rompu.



Les ministres de l'inutile
En voiture, en train ou en avion, les ministres, à l'initiative dit-on du porte-parole du gouvernement Benjamin Grivaux, ont quitté le cocon du pouvoir et sont partis à la rencontre des Français – largués à l'aube sur l'inconnu comme en mission commando.
Une manière inédite de fêter leur année aux responsabilités auprès d'Emmanuel Macron, le président que l'opinion publique accuse de négliger le pays profond, une opinion peu clémente qui se venge en conséquence dans les sondages. Cette audacieuse innovation, ponctuée de réunions publiques simultanées en près d'une trentaine de points de l'hexagone, laissait présager un échec, ce qui fut le cas.
Le paradoxe est que, tels des oisillons livrés à eux mêmes, se sont dispersés à travers le territoire des individus, sans doute méritants, mais qui ont du mal à sortir de l'anonymat. Près d'un Français sur deux ne saurait pas nommer la majorité de ceux qui composent l'équipe gouvernementale. Le Président de la République capte tellement la lumière qu'autour de lui on joue Mon nom est Personne... Soyons objectifs : qui chez nous connaîtrait le nom de Jacqueline Gourault si elle n'avait été intronisée Mamma Corsica ? Ce sont ces personnalités parfois sans relief (ce qui ne met pas en cause leur compétence), munies de quelques éléments de langage à sortir en cas d'attaque, que l'Etat a chargées de ranimer une flamme bien vacillante : celle de la proximité entre le pouvoir central et les citoyens.
Emmanuel Macron, il l'a affirmé, a investi la fonction présidentielle en prenant de la hauteur – et de la distance ; il y a un moment où c'est trop. A ceux qui l'ont accompagné dans les honneurs et les responsabilités de renvoyer en quelque sorte l'ascenseur. Il s'agissait pour eux de combler l'écart qui s'est creusé, en renouant le dialogue, en tendant des passerelles, en expliquant les décisions, ou plutôt en acceptant de se trouver en position d'accusés entre autres sur la CSG et les retraites, la nouvelle limitation de vitesse, la crise dans les transports, la sécurité...
Ceux qui, issus de la société civile ou d'une nouvelle classe politique, n'assumaient qu'avec peine l'identité que leur conférait leur portefeuille se retrouvaient du jour au lendemain assumant la facture de la gestion générale. Mission impossible. Mais l'exercice sera répété, et on jugera de son efficacité au bout de plusieurs rencontres de ce genre, et tant pis pour le vague-à-l'âme des missionnés de la dernière heure.
Macron est-il le président des riches ? Les ministres regardent leurs fiches, lèvent leurs yeux d'apôtres fraîchement convertis et disent au menu peuple massé sous l''estrade : « S'il est le ministre des riches, il est le vôtre, vous qui êtes riches d'espérances. » Et on quitte le froid printanier des campagnes insalubres pour retrouver les ors rassurants de la République, en se persuadant qu'on a participé à la diffusion d'un nouvel Evangile.

Les ministres de l'inutile