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Le Grand site de la Conca d’Oru veut rénover les pagliaghji pour entretenir le patrimoine


Thibaud KEREBEL le Mardi 10 Janvier 2023 à 17:02

Disséminés un peu partout dans les plaines et les vallées corses, les pagliaghji - constructions en pierre sèche - sont souvent laissés à l’abandon. Un nouveau projet, mené par le Grand site de la Conca d’Oru, du vignoble de Patrimonio et du golfe de Saint Florent, vise à encourager leur réfection.



Des pagliaghji flambant neufs, rénovés avec les techniques d’antan. Voilà le dernier chantier mis en place par le site classé de la Conca d’Oru, du vignoble de Patrimonio et du golfe de Saint Florent, dans le cadre du plan de gestion de son territoire, labellisé Grand Site de France en 2017. Un tampon synonyme de reconnaissance comme l’une des plus belles merveilles de l’Hexagone. « Ce plan de gestion comprend notamment la restauration et la valorisation du patrimoine bâti », explique Antoine Orsini, directeur du syndicat mixte du Grand Site de la Conca d’Oru. « Parmi ce patrimoine bâti, il y a les édifices que l’on connaît tous, comme les églises, mais il y a aussi un bâti agricole. Et c’est pour ça que nous avons lancé une telle opération. »

Dans un premier temps, une étude a donc été réalisée par quatre étudiants de l’école d’architecture de Montpellier, qui ont entrepris sur place un véritable inventaire. Au total, plus de 200 éléments de bâti agricole ont été recensés dans la seule zone du Grand Site de la Conca d’Oru. « La deuxième étape consistait à mettre en place un chantier d’insertion sur deux pagliaghji (petite construction de pierre sèche, NDLR), dans une visée à la fois expérimentale et démonstrative », reprend Antoine Orsini. « Notre but, c’est d’une part d’inciter les propriétaires de ces paillers à les restaurer, et d’autre part, de leur donner les éléments techniques pour les restaurer sans les dénaturer. » En clair, créer un modèle, qui pourra faire figure de référence.

« Quand on a commencé, on ne voyait presque pas le pagliaghju »

Après un premier chantier réussi sur Saint-Florent, une équipe s’est donc attelée, en décembre dernier, à la réfection d’un second pagliaghju, situé sur un terrain privé de la commune de Poggio d’Oletta. Installés au milieu des vignes, l’encadrant technique Houssain El Farraji et ses hommes ont bien avancé, et touchent maintenant au but, un peu plus d’un mois après avoir débuté les travaux. « Quand on a commencé, on ne voyait presque pas le pailler, il a fallu faire une grosse opération de démaquisage. Et après ça, on a pu entamer la réfection du bâti. » La difficulté de l’ouvrage reposait justement sur ces travaux de toiture, qui demandent une certaine expertise. « À l’intérieur, il y avait une pierre assez importante qui était fissurée. Et comme c’est un système de voûte, si une pierre présente un défaut, par effet domino, ça déséquilibre l’ensemble. »

Pour éviter que le toit s’effondre, la petite équipe s’est donc affairée à remplacer une partie du monticule de pierres. Le tout, en respectant l’architecture d’antan, comprenant une légère inclinaison (pour éviter que l’eau stagne), et une disposition en arrondi. Au-dessus, une couche de terre a enfin été disposée, puis tassée. « C’est justement ça qui fait l’étanchéité du pailler », complète Houssain El Farraji. « Cela demande de l’entretien. Il faut régulièrement désherber et changer la terre. » Mais à l’arrivée, en résulte un modèle neuf de pagliaghju, témoin multicentenaire du patrimoine agropastoral de la Corse.

Un chantier peu coûteux

Sur le plan financier, ce projet « n’est pas très coûteux », assure Antoine Orsini. « Ce que l’on paie, c’est uniquement de la main-d’œuvre et le savoir-faire, puisque les matériaux sont presque tous réutilisés, que ce soit au niveau de la pierre et de la terre. » Mais les propriétaires franchiront-ils le pas ? Vont-ils effectuer les démarches et payer le prix qu'implique tout de même une telle réfection ? « L’objectif, c’est en tout cas de leur faciliter la tâche. Nous allons bientôt éditer une brochure, que nous mettrons à disposition des maires et des propriétaires privés, pour qu’ils puissent s’approprier les techniques de restauration. »
Antoine Orsini a également entamé des discussions avec l’office de l’environnement de la Corse, dans le but d’obtenir une aide financière pour les privés.
Le reste dépendra de la motivation de chacun à entretenir le patrimoine.