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La police municipale d'Ajaccio sera bientôt armée


Julia Sereni le Vendredi 6 Novembre 2020 à 16:27

Dès le mois de janvier 2021, la police municipale ajaccienne sera armée. Une décision prise de longue date par la municipalité, mais qui résonne tout particulièrement dans un contexte national de multiplication des attentats terroristes. Si l’opposition se révèle plutôt opposée à la mesure, jugée démagogique pour les uns, insuffisante pour les autres, au sein de la population, les avis restent mesurés, entre conscience de la nécessaire protection des citoyens et peur des dérives.



Photo Michel Luccioni
Photo Michel Luccioni
Le projet avait déjà été acté en février 2016, par une convention de coordination entre le maire d’Ajaccio, le préfet et le procureur de la République. Mais aujourd’hui, il se concrétise : la police municipale ajaccienne sera, dès janvier 2021, armée.
« La protection des Ajacciens est une priorité. Nous souhaitons aussi que nos agents travaillent dans les meilleures conditions possibles et c’était une attente forte de leur part. Ils sont de plus en plus sollicités dans de nombreuses missions, comme la sécurisation des écoles. Il est important de leur témoigner notre considération et de les protéger » indique le premier adjoint au maire d’Ajaccio Stéphane Sbraggia.


24 agent opérationnels 
Dans un premier temps,  24 agent seront opérationnels. La Ville a reçu pour cela gracieusement du matériel d’armement de la part du Secrétariat Général pour l'Administration du Ministère de L'intérieur (SGAMI) de Marseille. Au total, 40 revolvers. Elle prévoit également l’acquisition de 6 pistolets à impulsion électrique de type « Taser ».

Coût d’une telle opération ? « Ce renfort d’équipement ne coûtera finalement que le prix de la formation des agents, estimé entre 20 000 € et 30 000 € en plus de la remise aux normes des locaux», poursuit Stéphane Sbraggia. Une formation obligatoire, assurée par le Centre National de la Fonction Publique Territoriale (CNFPT) et programmée pour la fin de l’année.
 
Les oppositions contraires à cette mesure 
Du côté de l’opposition, on émet des réserves sur le projet. Pour la gauche ajaccienne, « le problème principal de la Ville d’Ajaccio n’est pas l’armement, ou le réarmement, de sa police, c’est le renforcement de ses effectifs : « une trentaine » de fonctionnaires à Ajaccio alors qu’il en faudrait 70 ! Le ratio national est de 1 pour 1000 habitants… » déplore Etienne Bastelica, qui rappelle que la police municipale « n’a ni la vocation ni les moyens de se substituer à la police d’Etat ».
 
Jean-François Casalta, du groupe Pà Aiaicciu, s’oppose quant à lui plus frontalement à cette mesure, qu'il juge démagogique. « Nous considérons que c’est l’exercice du pouvoir régalien de protéger les citoyens. Les maires et agents municipaux ne doivent pas être en première ligne pour lutter contre le terrorisme islamiste » estime t-il. L'élu regrette également le manque de concertation : « Nous aurions été prêts à réfléchir à la question dans le cadre de formations très spécifiques, mais la majorité municipale a réactivé ce dossier sans même nous consulter, comme à son habitude ».
 
L'avis des ajacciens
Sur le cours Napoléon, les avis se font globalement mesurés. À l’instar de Martine, prothésiste capillaire : « C’est une sécurité pour la population. Je suis contre les armes, mais dans la crise actuelle, avec les besoins de sécurité que l’on a… Quand on entend qu’un homme est arrêté avec un sabre, on se dit : protégeons-nous ! ».

Un point de vue partagé par Marie-Hélène, retraitée : « Vu le contexte, pour notre sécurité on se dit que ça peut être bien, mais ce n’est pas dans notre culture » souligne t-elle. « Je trouve qu’une arme c’est dangereux, donc ça fait toujours un peu peur. Mais les policiers sont assermentés, donc je pense qu’ils respecteront les règles ».
 Certains se font plus circonspects, comme Félix, peintre en bâtiment : « C’est une bonne chose pour la protection de la population, avec tout ce qu’il se passe aujourd’hui, mais il faut qu’ils sachent s’en servir. Le problème c’est la formation… » soulève t-il. Avant d’ajouter «  Et puis qui va payer tout ça ! ».

D’autres doutent du bienfondé de la mesure :Dans le contexte actuel, c’est d’autant plus anxiogène. « Est-ce vraiment la solution ? » s’interroge une passante : « . « Il faudrait directement demander aux policiers municipaux ce qu’ils en pensent ! » conclut-elle.
 
Les policiers
Et justement, du côté des principaux intéressés, on se dit plutôt satisfait : « C’est une très bonne chose. Étant porteur d’un uniforme, on représente la sécurité, l’application de la loi et par là même, on est assimilés à des cibles, dans le sens où la population ne fait pas forcément de distinction entre les polices. En cas d’intervention grave ou urgente, c’est essentiel ». Se sentent-ils particulièrement menacés ? La réponse ne se fait pas attendre : « Le risque zéro n’existe pas, même ici ».