
- Le magazine Vanity Fair vous classe parmi les 25 personnalités de moins de 30 ans à suivre en 2025. Une forme de consécration ?
- Cela vient surtout concrétiser le travail mené au cabinet. C’est évidemment agréable, mais l’essentiel reste de satisfaire nos clients, de continuer à exercer avec passion et sérieux, et de fournir un travail rigoureux. Le reste est secondaire.
- Vous avez ouvert votre propre cabinet avec Me Rodolphe Brun d’Arre après une expérience chez Vigo. Pourquoi ce choix affirmé du pénal, alors que le droit des affaires attire tant à Paris ?
- J’ai toujours su que je voulais faire du pénal. À 16 ans, j’ai assisté à des comparutions immédiates au tribunal correctionnel de Bastia. J’y ai vu une justice expéditive, parfois brutale. En sortant de la salle, j’ai appelé mes parents pour leur dire que j’avais trouvé ma voie. Le droit pénal est, à mes yeux, le plus humain, le plus ancré dans le réel. Il implique d’accompagner des personnes dans des moments de vie extrêmement durs, que ce soit en défense ou en partie civile. C’est cette proximité qui m’a guidé tout au long de mon parcours.
- Vous avez déjà plaidé dans de gros dossiers criminels ou financiers. Comment acquiert-on cette expérience si jeune ?
- J’ai eu la chance d’être formé par des avocats de très haut niveau. Chez Pascal Garbarini, puis chez Vigo avec Emmanuel Mercinier-Pantalacci, à qui je dois énormément, et Emmanuel Daoud. Ils m’ont transmis leur exigence. La jeunesse peut parfois susciter des doutes chez les clients, mais cette barrière tombe si l’on maîtrise parfaitement son dossier. Ce qui compte, que l’on soit jeune avocat ou ancien bâtonnier, c’est la rigueur. Et j’ai la chance d’être passionné par ce que je fais.
- La défiance envers la justice grandit, y compris envers les avocats. Quel est votre regard ?
- C’est un sentiment ancien. On parle souvent d’une justice laxiste, mais il suffit d’assister à des audiences pour comprendre le contraire. Aujourd’hui, il y a une forme de tribunal populaire permanent, une volonté de justice immédiate et médiatique. Or, la réponse pénale ne peut être ni hâtive ni brouillonne. Concernant les avocats, la défiance est tenace : on nous admire quand on défend un innocent, mais on nous confond avec nos clients dans tous les autres cas. C’est une confusion regrettable, et malheureusement encore présente, y compris en Corse.
- Certaines des dernières mesures contre le narcotrafic suscitent des inquiétudes chez vos confrères. Les partagez-vous ?
- Oui. On assiste à un vrai recul de l’État de droit. La suspicion systématique envers les avocats est inquiétante. Certains présentent comme malhonnête le fait de soulever une nullité de procédure. Pourtant, ce n’est pas l’avocat qui annule quoi que ce soit, ce sont les juges. Cette stigmatisation est absurde. Vouloir restreindre l’accès à certaines pièces du dossier est tout simplement inacceptable.
- Vous êtes également l’avocat du SC Bastia devant la commission de discipline de la LFP. Le club semble souvent convoqué. Est-ce le cas ?
- Le Sporting est convoqué comme les autres clubs dès qu’un incident survient dans son stade. C’est une procédure automatique liée à l’obligation de sécurité. Il ne s’agit pas d’un traitement particulier.
La commission écoute-t-elle la défense du club ?
Oui. La réouverture du stade pour le match d’Amiens en août, les classements sans suite ou les sanctions réduites le prouvent. La commission suit nos arguments quand ils sont juridiquement et factuellement solides.
- Les sanctions financières, huis clos, tribunes fermées… sont-elles efficaces ?
- Pas vraiment. Il faut privilégier une répression individuelle. Les clubs ne peuvent pas tout anticiper : un propos raciste ou un petit fumigène peuvent difficilement être détectés. Les sanctions collectives pénalisent des milliers de personnes sans traiter le fond du problème.
- La violence touche aussi le football amateur. Vous en traitez ?
- Oui, de plus en plus. On voit des bagarres générales, des violences envers les arbitres. C’est souvent une décision contestée qui dégénère. Il y a un vrai travail de prévention à mener à tous les niveaux.
- Vous êtes aussi réalisateur. Un projet de long-métrage en préparation ?
- C’est ma seconde passion. Même si le métier d’avocat m’absorbe, je n’ai jamais voulu renoncer à l’écriture et à la réalisation. Après plusieurs courts-métrages et une série, je vais tourner un long-métrage cet été avec mon équipe habituelle. C’est une aventure singulière, et un plaisir immense.