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Justice : Paul Giacobbi de nouveau en procès pour deux affaires de détournement de fonds publics


Nicole Mari le Mardi 27 Octobre 2020 à 21:25

L’ex-président du Conseil exécutif de la Collectivité de Corse, Paul Giacobbi comparait mardi et mercredi au tribunal correctionnel de Bastia pour « détournement de fonds publics » dans deux affaires distinctes qui se sont déroulées entre 2010 et 2015 : celle de l’affrètement du navire Le Pélican par la Méridionale et celle de l’aide au transport de fourrage. A ses côtés, trois autres prévenus : son ex-DGS, Thierry Gamba-Martini, l’ex-directeur de l’Office des transports de la Corse (OTC), Francis Pian, et le PDG de la Méridionale ; Marc Verchon.



Paul Giacobbi, ex-député, ex-président du feu Conseil général de Haute-Corse et ex-président du Conseil exécutif de l'ancienne Collectivité territoriale de Corse. Photo d'archive CNI.
Paul Giacobbi, ex-député, ex-président du feu Conseil général de Haute-Corse et ex-président du Conseil exécutif de l'ancienne Collectivité territoriale de Corse. Photo d'archive CNI.
C’est au tribunal de Bastia qu’avait eu lieu la dernière apparition publique de Paul Giacobbi en 2018 lors de sa condamnation en appel dans l’affaire des gîtes ruraux à trois ans de prison avec sursis, cinq ans d'inéligibilité et 25 000 euros d'amende pour détournement de fonds publics au préjudice du département de Haute-Corse qu'il avait présidé de 1998 à 2010. C’est dans ce même tribunal que mardi matin, l’ex-président du Conseil exécutif de la Collectivité de Corse refait, bien malgré lui, son retour sur la scène médiatique avec deux nouvelles affaires de « tentative de détournement de fonds publics » et de « détournement de fonds publics » datant, cette fois, de sa présidence du Conseil exécutif de la Collectivité de Corse pendant la mandature 2010 - 2015. Paul Giacobbi, qui vit désormais à Paris et reste, en tant qu’ancien député de la Haute-Corse, membre honoraire de l’Assemblée nationale, n’était, depuis sa disparition de la scène politique corse, audible que sur son compte Twitter où il avait, depuis quelques mois, repris son habitude de commenter l’actualité nationale. 
 
Une gestion mise en cause
Les deux affaires, révélées à l’époque par le site LeMarin.fr, font suite à deux enquêtes du pôle économique et financier du parquet de Bastia, engagées après la publication le 22 mars 2018 d'un audit de la Chambre régionale des comptes sur la gestion de l'Office des transports de la Corse (OTC), présidé à l’époque par Paul-Marie Bartoli et dirigé par Francis Pian. Ce dernier explique, mardi, pendant l’audience, que le maire de Propriano, qui n’est pas poursuivi dans ces affaires, « était très peu investi dans sa présidence, j'ai du le voir en tout et pour tout vingt fois dans les locaux de l'office ». Cet audit pointait notamment qu'à « deux reprises, en 2014 et 2015, l'OTC avait… engagé des dépenses sans disposer pour ce faire d'un mandat de la CTC ou d'une habilitation de son conseil d'administration ». Le 9 octobre 2018, Paul Giacobbi est mis en garde à vue, ainsi que son directeur général des services (DGS), Thierry Gamba-Martini. Dès le début du procès mardi matin, leurs deux avocats - Me Emmanuel Mercinier-Pantalacci pour Paul Giacobbi et Me Jean-Sebastien de Casalta pour Thierry Gamba-Martini - requièrent la nullité de la procédure en invoquant l'article 77-2 du code de procédure pénale. L’un des arguments avancés est qu'en 2019, le procureur de la République d’Ajaccio n'a pas fait droit à la demande de consultation de la procédure Pélican. Le Parquet rétorque que la demande n'a pas été renouvelée après transfert du dossier à Bastia. Le tribunal délibère sur les requêtes en nullité et décide de poursuivre l’audience.
 
Pas de contrat, ni de contrôle
La première affaire abordée concerne l’aide accordée en 2015 par la Collectivité de Corse au transport de fourrage importé du continent. « 228 000 € ont été payés à la CMN pour permettre l'entrée sur l'île de fourrage destiné aux animaux, sans aucun contrôle par l'OTC de la réalité de ces importations et des quantités concernées » dénonce la Chambre régionale des comptes. Emboitant le pas à la Chambre, la justice reproche à ce dispositif d’avoir été mis en place en dehors de tout cadre légal. Paul Giacobbi, Thierry Gamba-Martini et Francis Pian comparaissaient, donc, pour « tentative de détournement de fonds publics » car la facture n’a pas été réglée à la Méridionale (CMN). Il apparaît, pendant l’audience, que les diverses factures envoyées par la compagnie maritime ont été délibérément « mises de coté en attendant de voir, sur un radiateur ».
La deuxième affaire concerne l’affrètement du navire roulier MN Pélican par la Méridionale en 2014, à la demande de l’OTC qui, suite à une énième grève de l’ex-SNCM, craint une rupture de l’acheminement du fret entre la Corse et le continent. L’OTC, cette fois-ci, règle la facture qui s’élève à 1,8 million € pour un navire qui est resté à quai au port de Toulon et n’a jamais été utilisé. La justice reproche, là aussi, l’absence de convention passée entre les protagonistes, l’affrètement s’est fait en dehors de tout cadre réglementaire. Paul Giacobbi, Thierry Gamba-Martini et Francis Pian sont ainsi jugés pour « détournement de fonds publics ». La Méridionale est poursuivie, en tant que personne morale, pour « recel de biens publics ».  Le procès se poursuit ce mercredi.