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Ils ont réalisé le tour de l'ile en kayak pour rendre hommage aux 6 Corses du commando Kieffer


La rédaction le Jeudi 7 Juillet 2022 à 11:31

Partis le 14 juin d' Ajaccio, Fabien Pott et Kévin Veau, des militaires rattachés à la base navale d'Aspretto, ont réalisé un tour de Corse en kayak en 14 jours. Contraints de s’arrêter quelques heures pour conditions météo défavorables, les deux hommes ont été accueillis à chaque des 16 étape par les brigades de gendarmerie qui leur ont apporté logistique et logement ainsi que les sémaphores de Bonifacio et d’Ersa.
Ils ont souhaité par ce défi sportif, rendre un hommage aux Corses du Commando Kieffer afin que leurs noms ne tombent jamais dans l’oubli.

Un de deux sportifs, Maitre Principal Fabien Pott, a répondu aux questions de CNI



Photo Facebook
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- Pourquoi avoir décidé de faire le tour de Corse en kayak ? 
Après avoir fait deux fois le GR20 et vue la Corse depuis ces sommets, il m’est venu l’idée de voir la Corse par sa façade maritime et découvrir son littoral. Mon choix se porta naturellement en tant que marin vers la mer. J’avais envie de me mesurer avec humilité à celle-ci et de me lancer un défi sportif. Ma spécialité de fusilier marin m’a permis de préparer cette aventure, pour le dépassement de soi et de garder la tête froide quand la météo était défavorable. Rester aux ports par 3 fois, car trop dangereux (savoir écouter les bons conseils des pêcheurs locaux du cap corse et d’avoir eu l’assistance de nos amis plongeurs à Galeria quand nous étions face à un vent d’Est qui nous poussait vers le large).  

- Pourquoi le commando Kieffer vous a-t-il intéressé ? 
Fusilier marin de métier, ma formation à Lorient à l’école des fusiliers marins commandos m’a permis de connaître et de savoir qui étaient ces hommes qui ont rejoint le général De Gaulle en Angleterre. Sous l’impulsion de leur chef : Philippe Kieffer, une rude formation commando en Écosse à Achnacarry, va faire de ces 177 hommes le CDO KIEFFER. Les britanniques donnèrent l’honneur à ces soldats français de débarquer les premiers sous la mitraille allemande. Ils sautèrent des barges et ils montèrent à l’assaut, prêts à donner leurs vies sur cette plage de Normandie. La plage de Sword à Ouistreham à l’aube du 6 juin 1944 se souviendra à jamais de ces hommes aux bérets verts. Affecté à la base navale d’Asprettoanimateur JDC j’ai voulu faire partager à de jeunes Corses ma connaissance de l’histoire militaire et de faire également savoir que 6 Corses ont participé au débarquement de Normandie le 6 juin 1944. N’oublions pas ces noms de ces héros : Nicolas Poli – Noël Ballaro Paul Mariaccia  Laurent Casalonga – Jean Pinelli – Pierre Giudicelli, ils étaient corses et aujourd’hui nous nous devons de rendre un hommage à ces hommes, alors quoi de plunormal pour moi que de demander à ce qu’une stèle s’élève aujourd’hui sur un monument pour rappeler l’abnégation de ces commandos marine quand il a fallu mettre sa vie en danger pour sauver la France et chasser l’ennemi. 

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Ce défi a aussi été réalisé pour le bleuet de France...
J’ai choisi le Bleuet de France pour le devoir de mémoire, œuvre national, il représente le monument des Invalides, ce qui évoque pour un militaire : sa cour d’honneur pour les cérémonies militaires, son musée de l’armée et le tombeau de Napoléon I. Mais aussi les gueules cassées depuis 14-18 et l’aide à nos blessés en opération extérieure, sans oublier les veuves, les orphelins et les victimes du terrorisme. Originaire de Lorraine, je suis profondément marqué par le poids de l’histoire quand je foule le champ de bataille de Verdun et toutes ces croix devant l’ossuaire de Douaumont. Je n’oublie pas le sacrifice de tous jeunes Corses qui montèrent aux fronts, car nous avons tous dans nos familles des hommes et des femmes qui ont pris les armes dans la Résistance et dans l’armée pour chasser l’occupant et pris part à des guerres. Notre devoir maintenant est de ne pas oublier l’histoire de nos anciens, mais aussi de nos frères d’armes d’aujourd’hui.  

Comment avez-vous vécu les 16 jours en mer ? 
« Homme libre toujours tu chériras la mer », pour un marin c’est un plaisir de prendre la mer, de naviguer sur l’eau et de partir à l’aventure. Qui n’a pas rêver un jour de savoir ce qu’il y a derrière la ligne d’horizon, de prendre le large et de découvrir le monde ? On ne part pas comme ça en mer, il faut un minimum de sécurité : en cas de problème faire le 196 sur votre téléphone - CROSS en Corse qui lancera une alerte à tous les bateaux dans la zone afin de vous venir en aide le plus rapidement possible. Avoir une VHF sur canal 16. Informer les 7 sémaphores de Corse de votre passage (œil bienveillant qui veille sur vous et cela vous rassure). Être équipé de feux de détresse, corne de brume, lampe à éclats et cyalumes fluorescents qui marqueront votre position sur l’eau dans l’obscurité. La tenue est un élément essentiel, chapeau de brousse, lunettes de soleil, haut en lycra, bas de néoprènes, ou bas de kimono blanc, chaussons néoprène. Le gilet de sauvetage très léger est à percussion gaz si besoin, mais une pipette permet de le gonfler à la bouche (dans sa poche de côté, j’ai glissé un opinel, une lampe à éclat, un sifflet, un miroir de secours, cyalumes et ballons de couleurs pour signaler ma position. Je suis relié au kayak par une sangle, et ma pagaie elle aussi est sécurisée au kayak par une dragonne. Dans mon coffre avant j’ai disposé mes affaires dans des sacs étanches puis dans des sacs poubelles pour assurer une bonne étanchéité. Sur l’arrière du kayak, un grosbidon pour de la nourriture.  

- Racontez-nous une journée type en mer
- Voilà le programme d’une journée type : réveil vers 05h00, mise à l’eau des kayaks vers 05h30, 2 heures de pagaie puis une pause casse-croûte de 30 minutes, et on poursuit jusqu’à 12h00. Il faut boire régulièrement la pipette du camelbak et grignoter quelques noix de cajou ou amendes, barres de céréales pour donner du tonus. Vers 12h00, pause déjeuner sur une plage ou crique (point de situation sur la progression, il ne reste que quelques kilomètres, mais le plus gros de l’étape est fait dans la matinée, car la motivation est présente dans nos têtes. A 13h00, reprise de la navigation pour finir l’étape du jour. Vers 15h30, arrivée sur la plage ou rampe de mise à l’eau, direction le camping de plage et installation du bivouac pour la nuit. 

Quel est votre ressenti et vos souhaits aujourd’hui, après ce défi ? 
- Il n’y avait qu’un objectif : finir ce tour au-delà de la fatigue et des doutes. Il ne pouvait en être autrement. Ces hommes qui débarquèrent ce 6 juin 1944 n’avaient qu’un objectif : coûte que coûte se battre pour la Patrie. Leur rendre honneur en finissant ce parcours n’était que juste hommage. Il ne faut jamais oublier notre Histoire, il ne faut jamais oublier que ces jeunes hommes sont allés au combat et il faut l’expliquer aux jeunes générations. Notre dernière doléance est que pour entretenir ce devoir de mémoire soit érigée une stèle face à la mer.

La dernière étape du 2 juillet
La dernière étape du 2 juillet