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Haute-Corse – 2nde circonscription : Jean-Félix Acquaviva réélu de justesse


Nicole Mari le Dimanche 19 Juin 2022 à 18:09

Le député nationaliste sortant Jean-Félix Acquaviva est réélu dans la 2ème circonscription de Haute Corse avec seulement 156 voix d’avance. Il totalise 50,23% des suffrages, soit 16 777 voix, gagnant plus de 6000 voix entre les deux tours. Une très courte avance sur son challenger de droite, François-Xavier Ceccoli, qui réussit une très belle élection avec 49,77% des voix, soit 16 621 voix. Le taux de participation a grimpé de presque trois points. Il faut s’attendre, sur un score aussi serré, à une contestation du scrutin.



Haute-Corse – 2nde circonscription : Jean-Félix Acquaviva réélu de justesse
Pas de tremblement de terre politique, mais un scrutin sur le fil du rasoir dans la 2ème circonscription de Haute-Corse où le député nationaliste sortant, Jean-Félix Acquaviva, conserve son siège avec 156 voix d’avance sur son adversaire le libéral, François-Xavier Ceccoli. Le député est réélu avec 50,23% des suffrages et 16 777 voix. S’il engrange près de 6000 voix supplémentaires par rapport au 1er tour, il en perd 4525 par rapport à 2017 où il avait remporté la bataille avec 63,16% des suffrages, soit près de 13 points de moins. Mais s’il avait à l’époque, en tandem avec Corsica Libera, bénéficié de tout l’appui du mouvement national, il arrache aujourd’hui la victoire dans une guerre intra-nationaliste où ces ex-alliés lui ont refusé son soutien de manière officielle pour Corsica Libera, ou plus ambigüe pour le PNC. Si des militants de ces deux partis lui ont accordé leurs aides localement, si d’autres se sont abstenus, certains n’ont pas hésité à mettre dans l’urne le bulletin de leurs adversaires. C’est dire le degré de rancœur et de haine de ceux qui ont perdu, à la fois, les dernières élections territoriales et un pouvoir auquel ils venaient juste de s’habituer, rancœur dans laquelle a sombré, sans états d’âme, l’enjeu historique de l’ouverture possible de négociations sur le processus d’autonomie. Seul Core in Fronte a joué le jeu avec intelligence, ne se trompant finement, sur ce coup-là, ni de combat, ni d’ennemi, mais il fut, il est vrai, l’un des vainqueurs dudit scrutin.
 
Un combat épique
A Corti, dimanche soir, Jean-Félix Acquaviva ne s’y est pas trompé, remerciant les Nationalistes qui ont fait le choix « d'un vote patriotique » et Core in Fronte pour « son esprit de responsabilité ». Quand aux autres, le constat est sans appel : « Certaines forces politiques se sont liguées alors qu'elles ont très peu de points communs en termes de projets de société pour la Corse, et de propositions pour l'avenir. Le seul qu’elles avaient, c'était d'essayer de faire chuter, à l'occasion de cette élection, Jean-Félix Acquaviva et Gilles Simeoni ». Malgré un lourd moment de stupeur et de tension, personne ne pouvait croire à la défaite, et la clameur de joie, qui a retenti dans la permanence à la proclamation des résultats, a été à la hauteur du soulagement. Porté en triomphe sur le cours Paoli, le député réélu ne mégote pas sa joie : « C’est une belle victoire après un combat épique ». Si la désunion de la famille nationaliste a frôlé le désastre, paradoxalement le résultat de ses législatives a effectivement confirmé la solidité du socle électoral de Femu a Corsica. Et l’on peut raisonnablement imaginer que l’élection, qui risque fort d’être attaquée par le perdant, ne fera, au moment des debriefings et de l’analyse des résultats, qu’envenimer les tensions chez les frères désormais ennemis.
 
Des scores scrutés
En ligne de mire aussi les 5736 voix du Nationaliste Lionel Mortini, qui avait récolté 17,99 % des suffrages au 1er tour après avoir déclaré « une guerre totale » et frontale contre Jean-Félix Acquaviva. Le maire de Belgodère, président de la Communauté de communes Lisula Balagna, s’était, dès sa défaite, déclaré prêt à discuter avec le président de l’Exécutif, Gilles Simeoni. Si la discussion a bien eu lieu, elle n’a, de toute évidence, pas totalement satisfait l’ex-conseiller exécutif qui, dans un communiqué posté sur Twitter, avait annoncé son intention de s’abstenir, ne donnant aucune consigne de vote, renvoyant au lendemain de l’élection des explications potentielles. Le score de Belgodère, qui fut l’un des plus scrutés de la circonscription, est apparu remarquable d’équité. Jean-Félix Acquaviva et François-Xavier Ceccoli, qui n’avait, au 1er tour, récolté respectivement que 7 et 4 voix, se sont partagés les 482 voix du maire, avec un petit bonus de 4 voix pour le député sortant. A Lisula, où Lionel Mortini était arrivé largement en tête, c’est Jean-Félix Acquaviva qui domine avec une centaine de voix d’avance et 250 voix de plus qu’au 1er tour. A Monticellu, où le maire était sur la liste de Jean-Christophe Angelini aux territoriales et où Lionel Mortini avait raflé plus de la moitié des suffrages et 414 voix au 1er tour, c’est le candidat de Femu qui décroche la timbale et passe de 174 à 534 voix et de 21,59% des suffrages à 72,55%.
 
Un devoir accompli
A droite où l’on y a cru, la déception est manifeste. Pourtant, François-Xavier Ceccoli, parti tard et de loin, a créé une vraie surprise avec un score de 16 621 voix, soit 49,77% des votants. Le maire de San Giuliano et président de la fédération LR de Haute-Corse, qui s’est présenté sous l’étiquette Divers droite, n’était pas favori dans cette élection, et pourtant il a raté la première marche du podium de 156 voix. C’est une véritable gageure qui est née et a prospéré sur le lit de la désunion nationaliste tout en agglomérant sous sa bannière, les bastions de la droite unie, la vieille garde giaccobiste, la gauche castelliste, notamment en Casinca et en Plaine Orientale, où les mêmes communes qui ont massivement appuyé le nationaliste Jean-Christophe Angelini, maire de Portivechju et leader du PNC, aux dernières territoriales ont fait voter, de la même manière et sans sourciller, le candidat libéral, l’un étant aux antipodes de l’autre ! C’est désormais au tour de François-Xavier Ceccoli d’aligner, par exemple, le score soviétique de 92,09% à Venzolasca, de caracoler largement en tête à Penta-di-Casinca, à Vescovato, Sorbo-Ocagnano… pour ne citer que ces communes. De quoi conforter la thèse : « Tout, sauf Acquaviva ! », lancé par le député réélu. Néanmoins, stricto sensu, François-Xavier Ceccoli réalise un score remarquable pour sa première participation à ce type d’élection en fédérant, de son propre aveu, les déçus en tous genre de la majorité territoriale avec, dit-il « le sentiment du devoir accompli et beaucoup de fierté pour les gens qui ont travaillé sur cette élection et à ceux qui nous ont fait confiance ».  
 
Un scrutin mis en doute
Vu la petitesse de l’écart qui a décidé de la victoire du député sortant, il ne fallait pas être très devin pour comprendre que son adversaire, en toute logique, allait tenter d’attaquer le scrutin au tribunal administratif, c’est de bonne guerre. Par contre, les accusations du perdant ont causé une grande perplexité, pas seulement chez les Nationalistes. François-Xavier Ceccoli a dénoncé « un système et un fonctionnement » dans lequel « l’Exécutif, et notamment son Président, aurait beaucoup joué et se serait mobilisés pour sauver le soldat Acquaviva », mais surtout « dans quelques communes - dont une - il y a eu des violences, d’autres où on a des doutes. Les assesseurs qui ont été molestés porteront plainte. Nous sommes en train de nous poser la question d’un éventuel recours devant le tribunal administratif. Il y a vraiment matière à le faire ». Une fois sa stupeur passée, Jean-Félix Acquaviva a vertement répliqué : « Je ne recevrai pas, ni moi-même, ni l'ensemble de la force politique militante, des leçons d'éthique, de démocratie et de transparence de la part de forces qui elles, quand on regarde le passé de leur gestion de la majorité territoriale, ne sont pas en mesure de le faire. Je crois qu’il faut être responsable, sérieux car on ne peut pas considérer que la démocratie, c'est uniquement lorsque on gagne, c'est aussi lorsqu'on perd ». Concernant les accusations de violence, il contre-attaque, estimant que son adversaire avait préparé le terrain en amont par « une stratégie de la tension qui a été orchestrée à travers un communiqué qui annonçait par avance de possibles irrégularités lors du scrutin, alors que rien ne se passait ». François-Xavier Ceccoli a annoncé qu’il ferait connaître sa décision d’un recours ou non devant le tribunal administratif. En attendant, le député réélu regagne le Palais Bourbon.
 
N.M.