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Gilles Simeoni : « Un message très fort envoyé à l’Etat »


Nicole Mari le Lundi 30 Septembre 2013 à 23:48

Le rapport sur la réforme institutionnelle a été adopté, vendredi dernier, à l’Assemblée de Corse (CTC), à une écrasante majorité. Pour les Nationalistes, c’est un vote historique et la validation des idées qu’ils défendent depuis 40 ans. Femu a Corsica n’a pas déposé d’amendements. Son co-leader, Gilles Simeoni, explique, à Corse Net Infos, les enjeux et les acquis de ce vote et le message envoyé à l’Etat.



Gilles Simeoni, co-leader du groupe Femu a Corsica pendant le débat à la CTC.
Gilles Simeoni, co-leader du groupe Femu a Corsica pendant le débat à la CTC.
- Quelle est votre réaction après ce vote ?
- Une réaction de satisfaction et de grande joie. C’est un vote très important, même si nous avons conscience qu’il est, à la fois, un point d’aboutissement par rapport à tout le travail qui a été fait et un point de départ pour tout le travail qui reste à faire. D’ores et déjà, il permet d’obtenir des acquis politiques essentiels.
 
- Lesquels ?
- D’abord, ce vote à une majorité écrasante, 46 voix contre 5, signifie que, dans tous les groupes politiques, de façon unanime, majoritaire ou significative, des élus se sont clairement prononcés en faveur de la réforme. Ensuite, cette capacité à construire un socle politique commun est aussi, nous nous en réjouissons, la validation de notre stratégie et de notre analyse que nous avons initiées dès 2010. Sur cette base, nous avions, alors, sollicité les suffrages des Corses. Ces idées, défendues hier par les seuls Nationalistes, sont partagées, aujourd’hui, par une grande partie des Corses. Il faut, donc, chaque fois que c’est possible, construire, autour d’elles, des majorités bien au-delà du mouvement national.
 
- Que pensez-vous de la décision des deux députés, également élus de la CTC, Paul Giacobbi et Camille de Rocca-Serra, d’œuvrer ensemble ?
- C’est un autre acquis essentiel. Les deux députés se sont engagés, en termes forts et solennels, à travailler ensemble au sein de l’Assemblée nationale et auprès des députés français de leur famille politique respective pour les convaincre de la nécessité d’une révision constitutionnelle. Si les élus de la Corse font ce qu’ils ont à faire, nous serons capables d’obtenir, demain, une majorité des 3/5ème auprès du Congrès pour mettre en œuvre la révision demandée. Dans l’article 1er de la délibération, la CTC attire, en des termes, là aussi, forts et solennels, l’attention du gouvernement et de l’Etat sur la nécessité de prendre en compte la Corse à travers un article spécifique afin de répondre aux problèmes que nous connaissons. Cet article résume toute la philosophie de notre engagement.
 
- Ce vote n’est-il pas, d’abord, un message envoyé à l’Etat ?
- C’est un message très fort envoyé à l’Etat. Celui de changer l’attitude qu’il a eu jusqu’à aujourd’hui, entre le silence total et les prises de position médiatiques, excessives et caricaturales. La question corse ne se résume pas à un problème de développement économique ou de maintien de l’ordre. C’est une question fondamentalement politique. Manifestement, aujourd’hui, une fenêtre s’ouvre vers un présent et un avenir de paix, d’apaisement, de développement économique et d’espoir collectif. Il faut impérativement que l’Etat s’engage de façon très dynamique dans la recherche de cette solution.
 
- Pourquoi n’avez-vous déposé aucun amendement ?
- Par choix. Nous avons travaillé de façon très soutenue au sein de la Commission législative et règlementaire pour essayer de construire un point d’équilibre raisonnable. Ce point, en privilégiant un article 72-5 spécifique pour la Corse, a permis de construire une majorité écrasante. Déposer des amendements, c’était prendre le risque d’ouvrir une porte aux opposants initiaux. Ils auraient pu utiliser ce prétexte pour multiplier les amendements, dénaturer le texte et nous entrainer dans une bataille parlementaire qui nous aurait détournés de l’objectif principal. Par contre, nous avons réaffirmé qu’à notre sens, la solution la plus logique était de consacrer un article spécifique à la Corse. Ensuite, nous avons fait les concessions nécessaires pour obtenir le vote d’un certain nombre d’élus de droite et de gauche qui, au départ, craignaient d’être entrainés dans une aventure ou une escalade. Une crainte, à notre avis, inexistante.
 
- Le rapport, tel qu’il est, vous satisfait-il ?
- Non. Le vote obtenu et la délibération adoptée au terme de ce vote écrasant sont, effectivement, pour nous, d’un point de vue politique, fondamentaux. La délibération fait référence aux intérêts du peuple corse et dit que la défense des intérêts de la Corse et de son peuple doit se concrétiser par l’inscription au sein de la Constitution française d’un article spécifique.
 
- Cet article, ne faudra-t-il pas, ensuite, en définir le contenu ?
- Tout à fait. C’est un choix méthodologique que nous avons fait en Commission. Nous avons évoqué la possibilité de soumettre un article ou un projet d’article aux législateurs et aux constituants français. Puis, nous avons décidé qu’il n’était pas opportun de le faire, qu’il fallait mieux ne pas enfermer par avance la discussion. Chemin faisant, si l’Etat est un partenaire de bonne fois, d’autres possibilités d’articles s’ouvriront peut-être. Nous serons, à ce moment-là, en mesure de définir le choix qui, sur le plan technique, sera le mieux adapté à nos objectifs.
 
- Des élus de gauche et des syndicats opposent, à la révision constitutionnelle, l’urgence sociale. Qu’en pensez-vous ?
- Si nous demandons une révision constitutionnelle, ce n’est pas pour des raisons idéologiques ou de postures politiques, c’est tout simplement parce que nous en avons besoin pour mettre en œuvre les outils juridiques et financiers nécessaires en matière de foncier, de fiscalité, de langue, mais aussi de définition et d’adoption du PADDUC. Ce vote très majoritaire envoie un message d’espoir au peuple corse tout entier. Il est porteur et annonciateur de lendemains qui doivent sourire.
 
Propos recueillis par Nicole MARI