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Gilles Simeoni : "Seule la démocratie peut sauver la Corse de cette spirale infernale”


Victoria Leonardi le Dimanche 29 Septembre 2019 à 22:31

Le président du Conseil exécutif de Corse, Gilles Simeoni, au Pays basque pour un rendez-vous fixé depuis plusieurs mois avec le président du Gouvernement, tient à confirmer publiquement, la teneur des engagements pris devant l'Assemblée de Corse le 26 septembre dernier et il réaffirme qu'il ne peut y avoir d'autre chemin, pour la Corse que celui de la démocratie réelle.



Le communiqué

"Je suis absent de Corse car en déplacement au Pays basque pour un rendez-vous fixé depuis plusieurs mois avec le Président du Gouvernement basque, Iñigo Urkullu.  

Je tiens néanmoins, par ces quelques lignes, à confirmer devant vous, publiquement, la teneur de l'analyse et des engagements que j'ai développés lors de mon intervention devant l'Assemblée de Corse le 26 septembre dernier.

D'abord m'incliner à nouveau devant la mémoire de Maxime Susini. Ensuite, redire avec force que toute vie est sacrée. Enfin, réaffirmer qu'il ne peut y avoir d'autre chemin, pour la Corse, notamment dans sa lutte contre les dérives qui la minent, que celui de la démocratie réelle.

C'est celui-là, et celui-là seulement, qui est le seul à pouvoir faire reculer durablement les logiques mortifères ainsi que les dérives mafieuses ou pré-mafieuses. Dans cette œuvre indispensable et salvatrice de la construction d'une Corse réellement émancipée dans ses structures politiques, économiques, sociales et culturelles, le peuple corse, dans la diversité de ses choix et de ses expressions, à un rôle majeur à jouer.

Notre responsabilité d'élus est immense. Notre responsabilité de citoyens est immense. Notre responsabilité de militants engagés depuis des décennies pour le droit de notre peuple à la vie et à la maîtrise de ses choix essentiels est immense. Et particulièrement vis-à-vis de la jeunesse, à laquelle nous devons sans relâche expliquer, y compris à l'aune de notre propre expérience, un enseignement de notre histoire collective récente : chercher à combattre les dérives autrement que par la démocratie conduit à activer des mécanismes qui reproduisent et renforcent les errements que l'on prétend combattre.

Certes, la situation est aujourd'hui extrêmement difficile et inquiétante du point de vue de la réalité quotidienne, et de la multiplication ces derniers mois d'exactions graves : menaces, incendies criminels, mitraillages de commerce, et jusqu'aux faits les plus terribles, avec plusieurs assassinats.

Cette spirale infernale nous renvoie à des années de plomb que la Corse n'a, hé- las, que trop connues. Et elle traduit sans doute les dérives d'une société gangrenée par l'argent facile et la drogue, où le recul de la cohésion sociale et culturelle facilite le pas- sage à l'acte, et où l'organisation du modèle économique global, notamment dominé par la spéculation immobilière et la place importante des marchés publics, fournit un terreau propice aux dérives mafieuses ou pré-mafieuses. Celles-ci, loin de disparaître, semblent aujourd'hui se renforcer.

L'Etat, qui dispose du monopole des pouvoirs régaliens et qui continue de mépriser et de combattre l'aspiration de cette île et de son peuple à l'émancipation, porte une lourde part de responsabilité dans cette situation.

Mais ce constat posé, il faut en faire deux autres, qui doivent nous renforcer dans notre volonté individuelle et collectivité d'engagement. D'abord que c'est par l'action de fond, politique, économique, sociale et culturelle que nous ferons reculer et disparaître les mécanismes qui génèrent les dérives mafieuses et pré-mafieuses.

Ensuite, que le moment est venu, parce que la Corse est à un point de bascule, entre la liberté et la terreur, d'agir ensemble pour construire ce pays démocratique qui a été au cœur de nos rêves et de nos engagements depuis des décennies. Et, malgré la douleur et la colère du deuil et l'angoisse suscitée par la situation, nous devons à cet égard garder foi et optimisme.

Nous avons en effet les moyens démocratiques de combattre efficacement et de faire reculer et disparaître les dérives qui minent notre société. Il appartient à la société civile, aux forces vives politiques, syndicales, associatives, aux élus de la Corse de lister ensemble ces moyens, de les mettre en synergie et en application. Dire avec force et clarté ce que nous voulons pour ce pays, et ce dont nous ne voulons plus. Et agir en ce sens, dans tous les domaines.

Il y aura dans quelques semaines, à l'initiative du Conseil exécutif de Corse et avec l'accord unanime de l'Assemblée de Corse, un grand débat sur ce sujet. Ce débat a vocation à impliquer directement, dans sa préparation, dans sa tenue, et dans les décisions qui en découleront, toutes les forces vives de cette île.

Organisons nous, dotons nous d'une méthode, regardons ce qui s'est fait dans les autres pays ou îles qui ont eu à combattre des dérives de ce type, disons ensemble que nous ne voulons pas d'une société qui soit fondée sur les rapports de force armés, sur les pressions, et sur la peur.

Et agissons démocratiquement pour que les forces de l'espoir et de la vie l'em- portent. Les autres chemins mènent à l'impasse. Celui-là nous conduira à la victoire."

Gilles Simeoni, président du Conseil exécutif de la Collectivité de Corse.
Gilles Simeoni, président du Conseil exécutif de la Collectivité de Corse.