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Elisabeth Poggi-Fratacci : « L’enjeu, pour Bastia IV, est la modernité, loin des archaïsmes et du clientélisme »


Nicole Mari le Vendredi 20 Mars 2015 à 19:24

Bastia IV, Montesoro-Furiani, est, pour la majorité municipale bastiaise, le canton le plus problématique, ses candidats étant notamment opposés au maire de Furiani, Michel Simonpietri, donné arithmétiquement favori. Pourtant, l’élection, où s’opposent pas moins de six binômes, est bien loin d’être jouée. Et le Quadrinôme, comme il se dénomme lui-même, composé de Pierre Pieri et de son suppléant, le Dr Antoine Mattei, proches d’Emmanuelle de Gentili, alliés à Elisabeth Poggi-Fratacci et Pascale Antonetti, candidates du maire de Bastia, a bien l’intention de remporter la mise. Il explique, à Corse Net Infos, par les voix croisées d’Elisabeth Poggi-Fratacci et du Dr Antoine Mattei, que l’enjeu de la campagne est le progrès contre l’immobilisme, l’émancipation contre le clanisme, la démocratie contre le clientélisme.



Les candidats de la majorité municipale bastiaise dans le canton de Bastia IV : Dr Antoine Mattei, Elisabeth Poggi-Fratacci, Pierre Pieri et Pascale Antonetti.
Les candidats de la majorité municipale bastiaise dans le canton de Bastia IV : Dr Antoine Mattei, Elisabeth Poggi-Fratacci, Pierre Pieri et Pascale Antonetti.
-- Qu’est-ce qui vous a poussé à vous présenter à cette élection ?
- Dr Antoine Mattei : Je suis de gauche et progressiste. Je suis, aujourd’hui, le suppléant de Pierre Pieri, qui est le candidat d’Emmanuelle De Gentili. Je me suis, déjà, présenté à deux reprises sur une liste municipale à Bastia, la liste d’ouverture de Pierre Chiarelli qui s’opposait à celle d’Emile Zuccarelli. Même si Emile Zuccarelli représentait une certaine gauche, nous n’étions pas d’accord avec ce genre de fonctionnement.
 
- Elisabeth Poggi-Fratacci : Je suis militante nationaliste depuis toujours. J’ai eu un engagement politique, l’an dernier, aux élections municipales 2014 sur la liste, Uniti per Furiani. J’ai été élue avec deux autres de mes colistiers et nous siégeons dans l’opposition. Nous nous sommes demandés si nous présentions ou pas un candidat aux Cantonales. Etant donné la configuration particulière de cette élection, nous avons décidé qu’il était utile que nous soyons présents politiquement.
 
- Pourquoi, le scrutin cantonal n’étant pas particulièrement prisé par les Nationalistes ?
- Elisabeth Poggi-Fratacci : C’est complètement vrai ! Nous avons, d’ailleurs, hésité à y aller. La loi NOTRe, qui prévoit la collectivité unique dans 28 mois, ne réfléchit pas à son fonctionnement. Politiquement, il est indispensable que nous soyons présents pour accompagner, en toute transparence, cette marche en avant vers la collectivité unique et tout ce qui va en découler. Une collectivité qui reste, pour l’instant, une coquille vide ! Ensuite, nous devons être présents pour que, par exemple, dans les logements sociaux, toute transparence soit faite dans la procédure d’attribution. Il en est de même pour les marchés publics du département.
 
- Qu’est-ce qui a motivé le choix de votre binôme et des suppléants ?
- Elisabeth Poggi-Fratacci : Comme nous avons un binôme vertical, ma suppléante est nationaliste. Nous avons décidé d’unir nos forces avec Pierre Pieri et le Dr Antoine Mattei sur un socle de valeurs communes puisque nous transposons, aux Cantonales, la démarche entreprise aux élections municipales bastiaises. Nos maître-mots sont : l’intégrité, la transparence, la démocratie et l’émancipation. Notre point commun, à tous les quatre, c’est, aussi, de n’être pas des parachutés. Nous sommes issus de ce territoire. J’ai vécu à Montesoro, j’y ai fait toute ma scolarité, ma mère étant enseignante au collège. Le Dr Antoine Mattei est médecin à Lupinu et Pierre Pieri vit à Montesoro.
 
- Quel est, pour vous, l’enjeu sur le canton Bastia IV Furiani-Montesoro ?
- Elisabeth Poggi-Fratacci : La particularité du canton de Furiani-Montesoro, c’est, peut-être, le brassage de population qui est une force. Pour nous, l’idée est de projeter le canton dans la modernité, loin des archaïsmes et du clientélisme. En tant que Nationalistes, nous avons toujours dit et nous continuons à dire que le canton est un bastion du clientélisme. C’est un système, qui est en train de mourir, mais qui n’en finit pas de mourir ! Nous nous présentons, aussi, pour en couper définitivement les circuits. Nous espérons pouvoir aller vers plus de transparence, plus de démocratie et, surtout, plus d’émancipation.
 
- Dr Antoine Mattei : Nous partageons les mêmes raisons. C’est vraiment le socle commun de la gauche telle que nous la ressentons. Nous sommes tout à fait sur la même longueur d’ondes concernant la suppression des Conseils généraux, la création de la collectivité unique et la lutte contre le clientélisme. Nous voulons apporter une émancipation aux gens et plus de clarté dans la vie politique. Ces points communs nous permettent de nous retrouver.
 
- Ce canton a-t-il, selon vous, des besoins ou des problèmes particuliers ?
- Elisabeth Poggi-Fratacci : Le problème des logements sociaux. Il faut une politique adaptée aux populations qui habitent ce territoire. Il faut faire adhérer la population au projet quel qu’il soit. Les logements sont faits pour elle, ils doivent être faits avec elle ! La cohésion sociale ne peut exister que s’il y la concertation et le dialogue, s’il y a une implication véritable. On parle beaucoup de démocratie participative, nous pensons que le mot « démocratie implicative » est plus fort. Si Furiani est condamné aujourd’hui à payer une amende pour ne pas avoir atteint le quota, c’est que la municipalité aurait du, depuis longtemps, faire une réserve foncière. Elle ne l’a pas fait ! C’est difficile de croire ça d’une municipalité de gauche ! Le département pourrait, aussi, mettre en place une politique sociale globale. Pour être solidaire, il faudra, désormais, être inventif ! L’argent public se raréfiant, les solidarités devront passer par d’autres circuits. Les projets devront vraiment être structurants et répondre à l’intérêt général.
 
- Dr Antoine Mattei : Sur Montesoro et Lupinu, on se rend bien compte qu’au niveau des logements, notamment des logements sociaux, de gros problèmes existent. Des problèmes d’entretien, de vétusté… tout le monde se plaint. Et, aussi, des gros problèmes sur les attributions de logements par l’Office HLM. Nous sommes très surpris de voir que des gens ont d’énormes difficultés à trouver des logements sociaux alors que lorsqu’on fait le tour des immeubles, on se rend compte que de nombreux appartements neufs sont vides ! Je suis médecin, je fais des certificats médicaux à des gens, qui ont des problèmes de santé et sont en difficulté, pour qu’ils aient un appartement ! Ça ne sert à rien ! J’ai, à chaque fois, l’impression de donner un coup d’épée dans l’eau ! Un gros travail est, aussi, à faire au niveau de la jeunesse qui vit dans des cités où rien n’est fait pour elle ! Il faut, là-dessus, nouer un partenariat entre la ville et le canton.
 
- A l’inverse des autres binômes représentant la majorité municipale bastiaise, votre situation n’est-elle pas plus difficile face à un adversaire qui est le maire de Furiani ?
- Dr Antoine Mattei : C’est, en effet, notre différence avec les autres cantons bastiais. Mais ce n’est pas seulement une question de communes ! A l’inverse de Bastia I où Ville-di-Pietrabugno est allié avec nous, Bastia IV englobe deux communes qui n’appartiennent pas à la même majorité. Avec le maire de Furiani, nous ne sommes pas du tout sur la même longueur d’ondes ! Nous avons, tout à la fois, une différence politique et une différence fondamentale d’appréciation sur la façon de voir l’avenir. Nous nous inscrivons dans la continuité de la majorité municipale bastiaise alors que le maire de Furiani est plutôt dans la suite de la gestion de Mr Vendasi, dans sa façon de gérer la commune et le canton.
 
- N’êtes-vous pas également les moins bien placés pour remporter l’élection ?
- Elisabeth Poggi-Fratacci : Même si le maire de Furiani est notre adversaire politique, comme les autres candidats d’ailleurs, je ne crois pas que nous soyons si mal placés, notamment à Montesoro. Pierre Pieri est le roi de Montesoro ! Le Dr Antoine Mattei est très connu, également. A Furiani, avec ma liste, nous avons recueilli 775 voix aux Municipales, ce score nous avait, d’abord, paru faible, mais nous l’avons réalisé contre une grosse machine électorale. Tous nos militants étaient mobilisés sur Bastia tellement l’enjeu était grand et la victoire, historique ! Nous avions travaillé de façon un peu artisanale. Aujourd’hui, nous avons plus d’expérience. C’est différent !
 
- Dr Antoine Mattei : C’est vrai que, si nous nous comparons aux autres cantons de Bastia, la lutte n’est pas la même ! Il faut l’avouer. A la base, il est vrai que nous ne sommes pas favoris, mais le combat vaut le coup d’être mené. Il y a, quand même, beaucoup d’espoir. Nous avons toutes nos chances d’être présents au 2nd tour. Et là, tout peut arriver. Les cantonales ne sont pas les Municipales, les données changent, les enjeux ne sont pas les mêmes, les électeurs réfléchissent différemment et sont plus libérés.
 
- Etes-vous sûr d’être présents au 2nd tour ?
- Elisabeth Poggi-Fratacci : Oui ! Bien sûr ! C’est évident pour nous ! C’est même une certitude !
 
- Ne craignez-vous pas l’abstention qui est un risque fort sur ce type de scrutin ?
- Dr Antoine Mattei : Oui ! L’abstention est toujours beaucoup plus importante sur les Cantonales que sur d’autres scrutins. Nous savons qu’il y en aura beaucoup. Nous essayons justement d’être très présents sur le terrain pour inciter les gens à aller voter. La plupart ne s’y intéressent absolument pas, ils ne savent même pas qu’il y a une élection. Nous les contactons en espérant que cela suffira pour qu’ils se déplacent.
 
- Quels reports de voix, espérez-vous ?
- Elisabeth Poggi-Fratacci : Nous n’en savons rien ! Nous verrons dimanche soir. Il faudra que les gens fassent des choix pour ou contre le clientélisme, pour ou contre le progrès, pour ou contre travailler autrement pour les générations futures. Les enjeux sont là. Les gens voteront, soit pour l’immobilisme, soit pour le progrès. Il y a vraiment deux façons de voir la Corse de demain : soit figée dans les archaïsmes, soit en marche. C’est ce second choix qui nous porte.
 
- Dr Antoine Mattei : Exactement ! Nous verrons bien les prises de positions des candidats qui ne seront pas au 2nd tour. Mais au-delà, nous verrons aussi la prise de position de leurs électeurs. A partir du moment où il n’y aura plus que de deux listes, il y aura une chance de changement. Les électeurs devront se décider par eux-mêmes. Les consignes de vote ne vont pas forcément marcher ! Il faut insuffler, au niveau des électeurs, l’idée d’une possibilité de changement. Une fois que cette idée sera insufflée, elle peut faire boule de neige.
 
- Cette volonté de changement, la ressentez-vous sur le terrain ?
- Elisabeth Poggi-Fratacci : Nous restons prudents, mais il y a des signes encourageants. Jamais personne, pendant la campagne des municipales ne m’a téléphoné sur mon téléphone fixe à la maison, n’ayant pas mon numéro de portable, pour me demander de passer les voir ! C’est le cas pour les Cantonales et j’en suis très étonnée. Je me dis que, lorsque des gens en arrivent à vouloir voir un candidat, à vouloir l’entendre, à avoir envie de débattre avec lui, c’est positif. Bien sûr, à Furiani, tout se fait discrètement ! C’est la particularité de cet électorat ! Je pense qu’une certaine émancipation est en train de naître. Je la souhaite et j’y crois, sinon je ne serais pas partie à ces Cantonales.
 
- Dr Antoine Mattei : Oui ! C’est tout à fait ça ! Nous la ressentons beaucoup ! Nous sommes même surpris, il y a quelque chose qui se passe ! Ce qui nous donne de l’espoir et du courage, c’est que nous sommes des gens de terrain, bien implantés sur le territoire. Cela fait 25 ans que je travaille à Montesoro. C’est la même chose pour Pierre Pieri et pour Elisabeth. Les gens reconnaissent en nous des personnes qui peuvent les représenter et non, de simples candidats politiques. Nous verrons ce que cela donnera dans les urnes.
 
- Etes-vous confiants ?
- Dr Antoine Mattei : Bien sûr ! Très confiants ! Nous avons toutes nos chances au 2ème tour. Une victoire sur ce canton serait très importante, elle permettrait de faire un pas de plus après celui des Municipales à Bastia. Encore un pas vers plus de justice au niveau politique ! Si les gens ont conscience de cet enjeu, ils peuvent se mobiliser et nous faire gagner.
 
- Elisabeth Poggi-Fratacci : Nous sommes très confiants ! Nous allons gagner !
 
Propos recueillis par Nicole MARI.
 

Dans le canton de Bastia IV, six binômes sont en lice :
- Majorité municipale bastiaise : Pierre Pieri (PS) et Elisabeth Poggi-Fratacci (A Chjama).
- Majorité municipale DVG de Furiani : Michel Simonpietri et Coralie Pruneta Leca.
- PCF-Front de Gauche : Louis Tomei et Dominique Torre.
- PRG : François-Jacques Bozzano et Marie-Paule Houdemer
- Corsica Libera : Joseph Bonavita et Claudine Alfano.
- Avvene Corsu-Front national : Michel Bruschini et Marie-Jeanne Neimari.
 
Les candidats de la majorité municipale bastiaise :
- Pierre Pieri, soutien PS.
- Elisabeth Poggi-Fratacci, Inseme per Furiani.
- Dr Antoine Mattei, Gauche progressiste.
- Pascale Antonetti, Inseme per Bastia.