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Coup d’éclat des élus de Femu a Corsica devant le Conseil Constitutionnel


Nicole Mari le Vendredi 4 Janvier 2013 à 17:31

Les onze élus nationalistes du groupe Femu a Corsica à l’Assemblée de Corse et le député européen, François Alfonsi, ont organisé, ce vendredi après-midi à Paris, une action symbolique devant les locaux du Conseil Constitutionnel en présence des médias insulaires et nationaux. Leurs deux leaders, Gilles Simeoni et Jean Christophe Angelini, ont été reçus par la Secrétaire générale adjointe de cette institution. Le but était, d’abord, de dénoncer la décision brutale et inacceptable de supprimer le régime fiscal dérogatoire des Arrêtés Miot dont bénéficie la Corse depuis deux siècles.
 Au delà de ce coup d’éclat qui entend prouver leur détermination, les nationalistes modérés ont appelé à une mobilisation générale, à la fois, des élus et de la population insulaires, transcendant les clivages politiques et les intérêts partisans.



Coup d’éclat des élus de Femu a Corsica devant le Conseil Constitutionnel
C’est devant un des plus forts symboles de la République française que se sont rassemblés les élus territoriaux du groupe Femu a Corsica et leurs militants, auxquels s’était joint le député européen, François Alfonsi. Déployant une large banderole « Le peuple corse doit vivre » et le drapeau corse, les nationalistes modérés ont voulu donner le coup d’envoi d’une action et d’une mobilisation qu’ils espèrent générales.
 
Une égalité variable
Les deux leaders, Gilles Simeoni et Jean Christophe Angelini, vont, d’abord, exposer à un parterre médiatique national, « le véritable cataclysme économique et social » qu’entraine, à court terme, la suppression des Arrêtés Miot. « De très nombreux Corses, quelles que soient leur situation de fortune et leur origine sociale, et, avant tout, les plus modestes, seront contraints de vendre une partie de leurs biens familiaux pour payer leurs droits de succession. Les spécificités insulaires, notamment l’indivision et la déprise des terres agricoles, feront que les biens immobiliers les plus directement touchés seront les maisons de village et les terrains agricoles  ». Ils vont expliquer « le profond sentiment d'injustice », ressenti par la population corse « face à une conception de l’égalité à géométrie variable ».
 
L’émir du Qatar exonéré d’impôt
Pour appuyer leur thèse, ils vont évoquer deux cas d’inégalités flagrantes devant l’impôt sur le territoire français, entérinées et légalisées par des décisions gouvernementales. Et ils ont beau jeu de s’étonner que les 9 sages du Conseil constitutionnel ne trouvent « rien à redire sur les zones franches urbaines, dont les résidents sont totalement exonérés d’impôt sur le revenu ou de cotisations sociales et patronales » ou encore sur « la convention fiscale conclue entre la France et le Qatar qui, pour attirer les investisseurs Qatari, exonère d’impôt sur les plus-values les investissement immobiliers réalisés dans l’hexagone par l’Etat du Qatar ou ses entités publiques, y compris la famille de l’Emir ! ».
Rappelant que les Corses ne sont « ni des nantis, ni des privilégiés », ils assènent que la décision du Conseil Constitutionnel, « infondée en droit », va entériner la dépossession des insulaires et, au-delà de la seule question fiscale, ferme la porte à « des avancées vitales pour la Corse » sur lesquelles travaille la CTC depuis le début de l’actuelle mandature.
 
Appel à la mobilisation générale
Puis, les deux leaders de Femu a Corsica ont lancé un appel à la mobilisation générale, à la conscience et à la responsabilité de chacun. « Cette action devant le Conseil Constitutionnel est une action symbolique qui se veut le point de départ d’une mobilisation beaucoup plus large. Nous voulions réagir de manière forte, y compris à Paris, mais nous pensons que la mobilisation doit transcender les clivages politiques. Nous appelons à une montée crescendo de la mobilisation populaire, au delà de tous les intérêts partisans », plaide Gilles Simeoni. Il insiste sur l’importance de l’enjeu : « Il faut que la mobilisation soit la plus large possible pour que notre action réussisse. Les Arrêtés Miot ne sont pas le problème seulement des Nationalistes, mais concernent tous les Corses ».
 
Mobilisation sur tous les terrains
L’élu nationaliste annonce une mobilisation à trois niveaux : régional, communal et populaire. 
« Nous avons l’intention de demander, dans les prochains jours, à l’Assemblée de Corse d’interpeller solennellement le gouvernement. Tous nos élus locaux vont proposer dans les communes, où nous sommes représentés, de faire adopter des motions identiques demandant le retour au dispositif antérieur. Nous allons organiser, dans les prochaines semaines, des réunions publiques dans toute l’île. Nous renouvelons, dans le cadre de la large plateforme regroupant l'ensemble des forces vives qui est en train de se construire, notre proposition d’une grande manifestation populaire. Notre volonté est de fédérer le plus largement possible ».
Femu a Corsica en profite pour rappeler l’urgence de signer la pétition en ligne (cf par ailleurs) et saluer la création du Collectif de la société civile (cf notre édition d’hier). 
 
Un avertissement à l’Etat
Les nationalistes modérés veulent, enfin, mettre l’Etat face à ses propres choix et ses propres contradictions. « L’Etat est confronté à un choix simple : perpétuer les conditions du conflit ou bien contribuer à créer celles de l’apaisement. Une occasion majeure lui est donnée d’agir très rapidement dans cette dernière direction, en mettant en œuvre les moyens politiques et législatifs de nature à inverser la situation et à ouvrir le dialogue sur l’indispensable réforme constitutionnelle ». Les propos sonnent comme un avertissement. Les modérés n’ont pas l’intention de se laisser balader, encore pendant des mois, entre la Commission Chaubon ou celle de la langue et le Conseil Constitutionnel. Pour eux, la décision sur les Arrêtés Miot en préfigure d’autres. « C’est la démonstration que dans tous les domaines où on a besoin de politique spécifique, on nous opposera toujours l’inconstitutionnalité », s’inquiète Gilles Simeoni.
 
Pas de compromis à minima
Les deux leaders nationalistes ont pu rentrer à l’intérieur du Conseil Constitutionnel où aucun des 9 Sages n’était présent. Ils ont remis à la Secrétaire générale adjointe le texte de la conférence de presse, ainsi que des motions et délibérations de l’Assemblée de Corse, notamment la dernière en date du mois de juin 2012 qui demande la prorogation des Arrêtés Miot jusqu’en 2017 ainsi que celle demandant le transfert de la compétence fiscale. Là encore, un geste plus symbolique qu’efficient puisque, comme l’explique l’avocat bastiais, « Le problème est que cette décision a l’autorité de la chose jugée. Le Conseil Constitutionnel ne va pas se dédire ».
La voie est étroite. Le seul moyen est de réintroduire la prorogation de la spécificité fiscale insulaire dans la loi de finance rectificative, mais pas question pour Femu a Corsica d’accepter un compromis à minima d’1 an ou 2, comme semblent le proposer certaines voix insulaires de gauche. Un délai qui ne résoudrait rien et qui ne serait, en réalité, qu’un « accompagnement thérapeutique vers la mort ». Affaire à suivre.
N.M.