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Carburant et crédit d’impôt : Les parlementaires de Femu a Corsica tapent du poing avant la réunion de Paris


Nicole Mari le Jeudi 15 Septembre 2022 à 21:10

La veille du deuxième Comité stratégique sur l’avenir de la Corse qui se tiendra vendredi à Paris, les quatre parlementaires de Femu a Corsica – les députés de Haute-Corse, Jean-Félix Acquaviva et Michel Castellani, le sénateur de Haute-Corse, Paulu Santu Parigi, et le député européen, François Alfonsi - tapent du poing sur deux sujets « urgents et graves » qu’ils comptent mettre sur la table : le prix des carburants avec le cas du groupe Ferrandi et le non-remboursement du crédit d'impôt investissement Corse (CIIC) qui plombent les hôteliers. Ils dénoncent une divergence entre les paroles et les actes du gouvernement.



Gérald Darmanin, ministre de l'Intérieur en Corse en août dernier (Photo Michel Luccioni)
Gérald Darmanin, ministre de l'Intérieur en Corse en août dernier (Photo Michel Luccioni)
C’est ce qu’on appelle un coup de pression. A quelques heures de la deuxième réunion du Comité stratégique sur l’avenir de la Corse, qui se tiendra vendredi matin à partir de 10 heures à l’Hôtel Beauvau avec le ministre de l’Intérieurs, Gérald Darmanin, les quatre parlementaires de Femu a Corsica publient un communiqué dénonçant les incohérences du gouvernement sur deux sujets urgents qui plombent des entrepreneurs insulaires : les ristournes sur le carburant et le non-remboursement du crédit d'impôt investissement Corse (CIIC) pour les hôteliers. « Alors que nous entrons en phase concrète de discussions sur le modèle économique et social souhaitable pour la Corse dans le cadre du processus politique enclenché avec le Ministre de l'intérieur Gérald Darmanin, deux dossiers de portée économique relatent un fossé important entre les discours et la volonté affichée d'une part, et les actes de portée législative et règlementaire d'autre part », dénoncent les députés de Haute-Corse, Jean-Félix Acquaviva et Michel Castellani, le sénateur de Haute-Corse, Paulu Santu Parigi, et le député européen, François Alfonsi.
 
Une fausse bonne remise
Concernant les carburants, les parlementaires nationalistes constatent qu’en séance publique au Palais Bourbon, le gouvernement n'a pas suivi les propositions d'amendements des députés insulaires visant, dans le cadre de la loi sur le pouvoir d’achat, à consolider une prime carburant au bénéfice des travailleurs corses. Et ce, en complément de la première remise conjoncturelle de l'Etat de 30 centimes € afin de réduire jusqu'à la fin d'année le différentiel de prix entre l'île et le continent français. « Malgré nos avertissements réitérés, le gouvernement a préféré choisir une mesure conjoncturelle générale, inadaptée à la Corse, celle d'une remise complémentaire de 20 centimes € d'abord, puis de 10 centimes € au 1er novembre, négociée de gré à gré avec le groupe Total à l'échelle française. Or, cette négociation de gré à gré avec un seul groupe en capacité économique de réaliser ce petit effort, suivi ensuite par le groupe VITO lui-même en capacité de le faire, constitue une grave distorsion de concurrence, contribuant à mettre à genoux des groupes indépendants de petite ou taille moyenne dans les territoires, dont le groupe Ferrandi en Corse, avec le risque encouru de suppression des 150 emplois. Si l'effet prix à la baisse conjoncturelle permet aux Corses de faire face à l’inflation de manière temporaire, jusqu'à la fin d'année, on peut craindre que cette mesure renforce la situation d'oligopole dans la distribution des carburants dès le début d'année 2023 par la disparition programmée du plus petit groupe, insulaire de surcroît ». Pas question d’accepter cette situation qui conduirait, selon eux, à terme, à « un redémarrage à la hausse des prix du carburant sans l’apport d’aucune solution structurelle pour les réguler, telle que demandée, pourtant, par la Collectivité de Corse et les parlementaires que nous sommes ainsi que recommandé par l’Autorité de la concurrence : transfert de la compétence de régulation des prix à la collectivité de Corse, en l’absence de l’activation par l’Etat de l’article L. 410-2 du code de commerce lui permettant pourtant de réglementer les prix des carburants. Un tel transfert doit être accompagné d'une fiscalité incitative pour annihiler les surcoûts objectifs liés à l'insularité ».
 
Des restrictions injustes
Concernant le sujet plus sectoriel de l'application du crédit d'impôt investissement Corse (CIIC), les parlementaires nationalistes rappellent que c’est « grâce à notre action au Parlement » qu’il a été prolongé jusqu’en 2023. Ils fustigent les nouvelles dispositions concernant les dépenses de travaux de rénovation des hôtels insulaires éligibles au CIIC : « l'Etat a réduit sensiblement la possibilité d'obtenir le crédit d’impôt dans le cadre des dépenses engagées à partir de 2021 à cause d’une interprétation très restrictive de la notion d’« investissement initial », issue du droit communautaire et intégrée dans le BOFIP (Bulletin Officiel des Finances Publiques) du 25 août 2021. Cette restriction apparait d’autant plus surprenante et injuste qu’une adaptation plus souple était admise depuis 20 ans ». Selon eux, cette nouvelle lecture « frappe de plein fouet l'hôtellerie insulaire, essentiellement de dimension familiale, favorisant indirectement le rachat des établissements dans la mesure où le crédit d'impôt sur les travaux de rénovation serait octroyé, en cas de cession de l'établissement. De facto, un grand groupe rachetant un hôtel familial en Corse se verrait octroyer une prime de rentabilité. Le risque d’effet d’aubaine est grand ». Ils s'interrogent « sur le changement de fusil d'épaule sans transition annoncée aux opérateurs d'une année sur l'autre. Cette situation démontre que la seule façon d'admettre pour la Commission européenne des crédits d'impôts d'investissement dans la durée est la reconnaissance constitutionnelle d'un statut d'autonomie pour la Corse afin de garantir une adaptation des aides d'Etat au territoire, conformément à l'arrêt de la cour de justice européenne de 2006 relatif à la situation des Açores par rapport au Portugal ».
 
Des décalages à résoudre
Les parlementaires de Femu tiennet à préciser que s’ils ont œuvré « pour mettre un terme au détournement du crédit d'impôt investissement utilisé pour l’acquisition de meublés de tourisme vers des opérations de spéculation immobilière et de résidentialisation - les meublés de tourisme réellement professionnels assimilables à des résidences hôtelières restent bien entendu éligibles -, nous combattons politiquement toute opération visant à altérer les actions d'investissement de l'hôtellerie familiale insulaire professionnelle, porteuse de retombées économiques et d'emplois, pouvant les amener à l'obligation de vente à des grands groupes ». Et demandent que « ces décalages entre la situation vécue et l'entame du dialogue doivent être rapidement résolus. Nous poserons ces questions urgentes de manière prioritaire sur la table demain à Beauvau. En espérant que des réponses opérationnelles seront apportées, on ne peut raisonnablement penser que l'on puisse aller plus loin sur la question de la fiscalité, notamment du statut fiscal et social pour la Corse, si, au pied du mur, l'Etat n'apporte pas de perspectives immédiates sur ces sujets sensibles ». Par ailleurs, ils annoncent avoir pris contact avec les socioprofessionnels et acteurs concernés, en relation avec la Collectivité de Corse, son assemblée et le Conseil exécutif, « pour envisager les modalités d'initiatives communes face à ce constat, s'il venait à perdurer ».