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Affaire Colonna : Le Premier ministre Jean Castex a appelé Gilles Simeoni pour désamorcer la crise


Nicole Mari le Jeudi 10 Mars 2022 à 17:24

Selon nos informations, le Premier Ministre Jean Castex a téléphoné au président du Conseil exécutif de la Collectivité de Corse, Gilles Simeoni, ce jeudi 10 mars, en fin de matinée, pour prendre le pouls de la situation en Corse après six jours de mobilisation de la jeunesse. Gilles Simeoni aurait réaffirmé la demande de vérité pour Yvan Colonna, la levée immédiate du statut de DPS des autres prisonniers, et un engagement public au plus niveau de l’Etat sur le rapprochement et la question Corse. Il aurait reçu, dans la foulée, un appel du ministre de l’Intérieur, Gérard Darmanin, auquel le dossier des prisonniers a été refilé. Un entretien confirmé dans la soirée par Gilles Simeoni dans un communiqué.



Gilles Simeoni, président du Conseil exécutif de la Collectivité de Corse. Photo Michel Luccioni.
Gilles Simeoni, président du Conseil exécutif de la Collectivité de Corse. Photo Michel Luccioni.
Il aura fallu cinq jours de mobilisation tous azimuts après la tentative d’assassinat d’Yvan Colonna, de colère de la jeunesse, de manifestations qui dégénèrent de plus en plus violemment, des scènes d’affrontements dans les rues de Bastia et d’Aiacciu, une sous-préfecture visée à Calvi, un tribunal incendié à Aiacciu pour que le gouvernement français sorte enfin de son sidérant silence envers les autorités corses et que le Premier Ministre, Jean Castex, appelle, enfin, le président de l’Exécutif corse, Gilles Simeoni. Ce matin, sur une chaine nationale, le président de l’Assemblée nationale, Richard Ferrand, avait joué l’apaisement et annoncé l’ouverture d’un dialogue : « Il faut trouver des voies d’apaisement et ne pas laisser ceux qui voudraient en découdre prendre le pas sur ceux qui voudraient discuter et trouver des solutions. C’est la nécessité. Le gouvernement doit prendre sa part. le Premier Ministre est à la tâche et je sais que les élus de Corse le sont aussi ». L’appel du Premier ministre serait intervenu, selon nos sources, en fin de matinée et aurait durer un petit quart d’heure. On suppose qu’il ne fut pas facile à donner par celui qui n’a jamais fait montre d’aucune ouverture envers l’Exécutif nationaliste, pour ne pas dire plus, et qui, pendant chaque entrevue – diligentée par l’Elysée - avec Gilles Simeoni a toujours fait preuve d’un silence glaçant ! Sans compter son honteux communiqué annonçant - toujours sur ordre de l’Elysée - la levée de DPS d’un homme qui se débat entre la vie et la mort et qui a soulevé une vague unanime et forte d’indignation et de colère dans toute la société corse.
 
Des actes, pas de promesses
Le but du coup de fil – toujours aussi téléguidé par le président de la République – était, donc, de prendre le pouls de la situation et de connaître les demandes de l’Exécutif corse pour désamorcer la crise. Gilles Simeoni aurait, assez froidement, expliqué qu’elles étaient au nombre de trois : la vérité totale sur la tentative d’assassinat d’Yvan Colonna. L’ancien avocat a certainement redit son absolue défiance sur l’enquête en cours et la volonté de la représentation élue corse au moins de suivre les auditions qui devraient commencer la semaine prochaine à l’Assemblée nationale pour essayer d’y voir plus clair sur ce qui s’est passé, il y a une semaine, à la centrale d’Arles. Les nationalistes veulent savoir exactement ce qui se dit pendant les auditions. Le président de l’Exécutif corse a, ensuite, exigé la levée immédiate, dans la journée, du statut de DPS d’Alain Ferrandi et de Pierre Alessandri, et un engagement public du gouvernement sur leur rapprochement, pas une promesse officieuse. Le ministre de l’Intérieur, Gérard Darmanin, qui a hérité du dossier, aurait, toujours selon nos sources, appelé Gilles Simeoni dans la foulée pour en discuter. Enfin, le président de l’Exécutif corse a demandé un engagement public au plus haut niveau de l’Etat, c’est-à-dire du Président de la République, sur la mise en œuvre d’une solution politique pour la Corse et l’annonce publique de l’ouverture d’un nouveau cycle de négociations entre la Corse et l’Etat pour une autonomie de plein droit et de plein exercice.  Jean Castex aurait pris note et promis un retour global ou partiel sur ces trois points au plus tard dans la soirée. Contacté par nos soins, le président de l'Exécutif s'est refusé à tout commentaire. Il faudra beaucoup plus que deux coups de fil et des promesses pour calmer la colère de la jeunesse, des actes clairs et surtout le respect de la démocratie et des élus issus du suffrage universel.
 
N.M.

Gilles Simeoni : « Nous avons convenu avec Jean Castex qu’il est urgent de sortir de la logique de tension qui va en s’aggravant »

Dans un communiqué, publié jeudi dans la soirée, le président du Conseil exécutif de la Collectivité de Corse, Gilles Simeoni, confirme l’information que CNI a donné en primeur de son entretien téléphonique avec le Premier Ministre, Jean Castex, et avec le ministre de l’Intérieur, Gérard Darmanin. Dans le communiqué, intitulé « Situation en Corse : les trois signes publics demandés au Premier ministre lors de notre entretien téléphonique de ce jour », il réaffirme qu’il ne peut y avoir d’autre chemin pour la Corse que celui de la paix et de la démocratie, mais que la paix ne peut se construire que sur la justice.

Voici le communiqué :

« La Corse vit depuis plusieurs jours dans un climat d’extrême tension qui peut déboucher, à chaque instant, sur des faits d’une gravité irréversible.
Les évènements survenus ces derniers jours trouvent leur origine dans la conjonction d’une situation de blocage politique qui perdure depuis de longues années, et de l’indignation générale suscitée par la tentative d’assassinat perpétrée contre Yvan Colonna le 2 mars dernier à l’intérieur de la centrale d’Arles.
Cette indignation générale a notamment été portée avec force par les syndicats étudiants de l’Université de Corse et l’ensemble de la jeunesse corse, à l’origine entre autres mobilisations d’une manifestation d’une ampleur sans précédent à Corti, le dimanche 6 mars.

J’ai eu un échange téléphonique ce jour avec le Premier ministre Jean Castex, ainsi qu’avec le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin.
Nous avons convenu qu’il est urgent de sortir de la logique de tension qui va en s’aggravant.
J’ai rappelé que le Conseil exécutif de Corse, la majorité territoriale, et au-delà l’ensemble des forces politiques nationalistes ont à cet égard démontré depuis 2015 leur volonté constante de dialogue et d’apaisement.
J’en reste, pour ma part, plus que jamais convaincu : il ne peut y avoir d’autre chemin pour la Corse que celui de la paix et de la démocratie.
Mais la paix ne peut se construire que sur la justice.
Et la démocratie implique le respect de la volonté des Corses, telle qu’elle s’est exprimée massivement à travers le suffrage universel.

J’ai donc exposé au Premier ministre et au ministre de l’Intérieur qu’il est indispensable que le Gouvernement et l’Etat donnent des signes publics, forts, et immédiats autour de trois points :
1) Faire toute la lumière sur les circonstances de la tentative d’assassinat perpétrée contre Yvan Colonna, notamment en soutenant les initiatives parlementaires garantissant un regard indépendant et impartial sur la genèse et les circonstances des faits ;
2) Appliquer à Pierre Alessandri et Alain Ferrandi leur droit au rapprochement, à travers la levée immédiate du statut de DPS et leur transfèrement à Borgu, comme demandé à l’unanimité par l’Assemblée de Corse, par de très nombreux maires de Corses, et des parlementaires de tous les groupes ;
3) Ouvrir un cycle politique nouveau dans les rapports entre l’Etat et la Corse. Basé sur le respect du suffrage universel et de la légitimité démocratique, ce cycle nouveau doit permettre d’ouvrir un dialogue entre l’Etat et la Collectivité de Corse, et plus largement l’ensemble des forces politiques et forces vives de l’île. Il doit permettre la définition et la mise en œuvre d’une solution politique globale de la question corse.

Le Premier ministre m’a en réponse indiqué que la position du Gouvernement et de l’Etat par rapport à ces trois demandes serait rendue publique rapidement ».