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A l'Université de Corse le Covid fait exploser la précarité étudiante


Pierre-Manuel Pescetti le Vendredi 20 Novembre 2020 à 21:26

A Corte le reconfinement est venu aggraver une situation déjà critique depuis le début de l'épiderme en mars dernier et de nombreux étudiants doivent faire face aux conséquences de la crise.



Difficultés financières, absence de matériel informatique, besoin de soutien psychologique : la précarité étudiante est accentué par la crise sanitaire du Covid-19 à l'université de Corse - Crédit photo @università di Corsica
Difficultés financières, absence de matériel informatique, besoin de soutien psychologique : la précarité étudiante est accentué par la crise sanitaire du Covid-19 à l'université de Corse - Crédit photo @università di Corsica
Les conséquences de la crise du Covid19 ne sont pas que sanitaires et psychologiques à l’Université de Corse. Cette rentrée universitaire 2020, marquée par la crise du Covid-19, a vu basculer un bon nombre d’étudiants dans la pauvreté. Si la précarité étudiante était un phénomène connu à Corte depuis mars dernier la situation s’est dégradée et ils sont de plus en plus nombreux ceux et celles qui font appel aux différentes aides mises en place par l’université, le Centre Régional d’Œuvres Universitaires et Scolaires (CROUS) et l’Aiutu Studientinu et ce malgré un nombre d’inscrits qui reste constant.


Une précarité étudiante accentuée depuis le premier confinement
Comme le constate Marc-Paul Luciani, directeur du CROUS de Corse « il y a une augmentation des dossiers traités chaque année mais le premier confinement et une saison estivale marquée par la crise n’a pas permis de travailler aux étudiants qui prennent des jobs d’été pour financer leur année universitaire. De plus certains emplois étudiants ont dû être supprimés ».

Les chiffres ont explosé en trois ans, passant de 140 000 euros par an d’aides sociales distribuées par le CROUS en 2017 à 340 000 en 2020.

Une évolution remarquée sur le terrain par Saveria Pietri, présidente de l’Aiutu studientinu qui parle de « 87 étudiants différents qui viennent à l’épicerie solidaire de l’association depuis septembre avec une augmentation de 10 étudiants pendant ce deuxième confinement ».
e nombre de bénéficiaires peut paraître modique mais il faut le rapporter au nombre d’inscrits à l’université de Corse qui est de 4 700 étudiants pour cette année universitaire 2020-2021.
Pour répondre à cette demande croissante l’Aiutu studientinu a même dû passer de 2 à 3 distributions de denrées alimentaires par semaine. La cause de cette augmentation est aussi le fait que plus d’étudiants soient restés confinés à Corte qu’au printemps.

Comme l’explique Marc-Paul Luciani « ce sont 121 jeunes qui sont restés à Corte dans les résidences du CROUS auxquels il faut ajouter ceux en résidence privée contre seulement 60 en mars ». Un chiffre qui a donc doublé et qui concerne surtout des étudiants étrangers et continentaux qui ne peuvent pas forcément retourner auprès de leur famille selon Saveria Pietri.


De nouvelles aides viennent s’ajouter à celles déjà existantes
Pour faire face à cette précarité grandissante, l’université, le CROUS et l’Aiutu studientinu ont débloqué de nouvelles aides et cela ne se fait pas qu’au niveau financier. L’ensemble des cours étant assuré de manière dématérialisée, il était essentiel que tous les étudiants puissent avoir accès à du matériel informatique et à une connexion internet. Le pôle solidarité et handicap de l’université de Corse a donc mis à disposition de ceux qui en avaient besoin un système de prêt d’ordinateurs portables, une ouverture des salles informatiques et le don de 60 clés 4G offertes par la Collectivité de Corse pour les étudiants qui résident dans des zones blanches comme les villages autour de Corte.
Cette aide matérielle vient s’ajouter aux dispositifs déjà existants de soutien psychologique et à la distribution de bons alimentaires d’une valeur de 40 euros assuré de manière hebdomadaire. Dans ce cas aussi la demande a plus que doublé comme l’explique Nicolas Peretti, adjoint administratif au pôle solidarité et handicap de l’université de Corse : « La semaine dernière nous avons fait une première distribution pour 15 étudiants. Cette semaine cela s’est fait pour 40 d’entre eux ».


La barrière de la pudeur
Cependant tous ces chiffres ne relatent qu’une partie de la réalité. Par peur de la honte d’avouer qu’ils sont en difficulté, « certains jeunes ne viennent pas demander de l’aide » déplore Marc-Paul Luciani. Cette barrière de la pudeur, qui touche surtout les étudiants insulaires ne fait qu’accroître la précarité dans laquelle ils se trouvent comme l’explique Saveria Pietri qui essaye « de faire évoluer les mentalités » tout en comprenant que cela est difficile dans notre petite société insulaire de montrer qu’on a besoin d’aide.
Pour lutter contre cela le CROUS a pourtant mis en œuvre l’anonymat des demandeurs d’aide lors des commissions sociales qui visent à attribuer un soutien psychologique et financier aux étudiants dans le besoin comme l’explique Marc-Paul Luciani : « les noms sont masqués et tout est fait de manière anonyme pour que les étudiants prennent l’initiative de venir demander de l’aide sans se sentir jugés ».

Cette précarité, autant au niveau financier que matériel, ne cesse de croître pour les étudiants de l’université de Corse, mais les acteurs de la solidarité universitaire restent mobilisés et font face à une situation préoccupante accentuée par les deux confinements et dont certains aspects restent encore cachés par une peur d’être jugé encore trop présente.