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​La mémoire d’Aleria célébrée par une fresque militante dessinée par l’artiste Piombu


Patrice Paquier Lorenzi le Dimanche 31 Août 2025 à 19:15

Dévoilée lors des 50 ans des commémorations des évènements d’Aleria 1975, la fresque peinte sur un mur de l’ancienne cave Depeille, a été réalisée par l’artiste bastiais, Piombu. Depuis plusieurs années, cet ancien militant s’illustre en dressant son regard de la situation politique insulaire à travers des œuvres particulièrement appréciées.



L'artiste Piombu a dessiné la fresque des évènements d'Aleria 1975 sur l'ancienne cave Depeille (photo Piombu 1976)
L'artiste Piombu a dessiné la fresque des évènements d'Aleria 1975 sur l'ancienne cave Depeille (photo Piombu 1976)
C’est sous les applaudissements nourris, l’émotion mais également l’émerveillement de plusieurs centaines de personnes qu’a été dévoilée la fresque des évènements d’Aleria 1975 sur le site du mémorial. Derrière cette réalisation se cache le talent d’un artiste insulaire particulièrement suivi et connu pour ses réalisations engagées et militantes, celui de Piombu. « J’ai été contacté par l’association Aleria 1975, dans ce cadre des festivités des 50 ans de ces évènements, et je n’ai évidemment pas hésité à répondre à cette sollicitation » avant d’ajouter « Aleria est dans la mémoire collective de tout le monde. Nous avons eu des échanges réguliers, ce qui a permis d’avancer rapidement sur une esquisse du projet, qui n’était que mon interprétation et mon regard ».
 
« Ce qui était important, c’était de mettre en avant les hommes qui ont participé à ces évènements »
Pour garder le secret et l’effet de surprise le plus longtemps possible, une bâche a ainsi été installée jour et nuit, pour une réalisation effectuée en seulement deux jours et demi afin de peindre les 25 m2 de l’œuvre : « Ce qui était important pour moi c’était de mettre en avant les hommes qui ont participé à ces évènements. Alors, on reconnaît bien évidemment Edmond Simeoni avec son t-shirt orange de l’ARC et la symbolique des hommes debout les armes à la main. Ce qui était important c’était de représenter ses militants qui se sont levés contre les injustices du monde agricole et qui ont défié l’État colonial ». Pour réaliser l’esquisse, l’artiste bastiais avoue s’être beaucoup documenté et avoir été aidé par l’asso Aleria 1975 pour permettre de coller le plus possible à la réalité : « J’ai eu beaucoup d’échanges avec Sampieru Mari et Bernard Pantalacci pour finaliser cette fresque. On a voulu aussi représenter les hélicoptères, car cela avait beaucoup marqué les gens, cela a fait partie des moyens disproportionnés évoqués à l’époque et c’était important de les représenter également. Ce qui m’a réellement fait plaisir c’est les gens qui m’ont dit que, malgré le caractère tragique de l’œuvre, il ressortait également quelque chose de beau et de poétique ».

Un artiste militant avant tout
Âgé de 40 ans, complètement autodidacte, Piombu redonne vie aux murs et aux façades insulaires, et notamment du côté de Bastia depuis plusieurs années maintenant. De la tribune Sud de Furiani pour perpétuer la mémoire de la gloire du club turchinu ou sur les hauteurs de la ville, le militant dresse sa vision de la situation actuelle toujours signée par son emoji rouge noir et blanc si reconnaissable : « Je multiplie les surfaces et les supports, car je suis aussi tatoueur et je peins également sur toile. Je dessine depuis tout petit, mais je suis avant tout un artiste militant. La conjugaison de mon univers artistique et de mon engagement politique ont fait que j’exprime maintenant depuis 8 ans de cette manière sur les murs. J’essaye de parler des problématiques politiques sociales et culturelles et les thématiques, comme la dépossession de la terre, la spéculation, la langue et la culture. C’est un regard artistique et militant ».
 
Plus récemment, Piombu a redonné vie à une fresque d’Yvan Colonna sur les hauteurs de la Citadelle de Bastia : « Vandalisée et dégradée, j’ai voulu lui redonner vie, car il me paraissait important de le faire. À la demande de la famille, j’en ai également fait une, à la suite de celle de Bastia, à Cargese. C’est un honneur de pouvoir lui rendre hommage ». Derrière le grapheur de talent et les murs souvent dégradés par le temps, l’âme du militant est, quant à elle, toujours intacte.