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« Une année atroce » : les oléiculteurs corses frappés de plein fouet par la chaleur et les intempéries


Léana Serve le Lundi 3 Novembre 2025 à 17:54

Après une floraison prometteuse, la récolte d’olives s’annonce presque nulle cette année en Corse. Chaleur précoce, sécheresse, vent et tempête Benjamin ont anéanti la production. Une situation inédite qui fragilise de plus en plus la filière oléicole.



Crédit : Oliu di Corsica
Crédit : Oliu di Corsica

C’est une saison « atroce » pour les oléiculteurs corses. Après une floraison prometteuse au printemps, la production d’olives s’annonce finalement historiquement faible, compromise par la chaleur précoce et les intempéries des dernières semaines. « Jusqu'à la sécheresse de juin, tout allait bien : on avait une belle floraison, tout le monde était content », raconte Fabienne Maestracci, présidente du syndicat Oliu di Corsica. « Mais en juin, la nouaison ne s'est pas faite, il a fait vraiment trop chaud. Même dans des endroits irrigués, il a fait quand même trop chaud, et on s'est rendu compte qu'on était en train de tout perdre. »
 

Une situation qui s’est encore aggravée avec la récente tempête Benjamin, qui a détruit le peu de fruits qui avaient résisté à la chaleur. « Elle nous a mis par terre le peu d’olives qu’il nous restait. On avait déjà perdu les espoirs de fruits au mois de juin, et on avait déjà compris qu'on serait sur une très petite année, alors qu'on s'attendait plutôt à quelque chose de bien parce qu'on a eu une très belle floraison, mais la très petite année s'est transformée en année pratiquement zéro quand il y a eu la tempête de l'autre jour qui nous a mis par terre le peu de fruits qu'on avait. C’est vraiment une année atroce. »
 

À ces difficultés climatiques s’ajoutent le vent et la propagation de maladies qui affaiblissent les arbres. « Il y a une chose dont on parle peu, c’est le vent. On a parfois dix, douze jours de vent d'affilée, et ça esquinte les végétaux, ça les épuise. Je vois des dommages qui arrivent sur les végétaux qu'on n'avait pas avant. Les arbres sont habitués au vent, mais pas à être desséchés comme ça, d’autant plus qu’il fait chaud. Par exemple, ils sont habitués à la chaleur, mais pas au mois de juin, si tôt dans l’année, ce n’est pas normal, et c’est pour ça que la fructification ne s'est pas faite. Et quand vous avez plusieurs jours de vent, avec la chaleur qu'il fait, le sol se transforme en véritable poussière, et ça appauvrit l'arbre. Et comme les arbres souffrent, les maladies en profitent pour se développer, et les arbres produisent de moins en moins », déplore Fabienne Maestracci.
 

Des pertes économiques lourdes pour la filière oléicole
 

La chute de la production se traduit directement par une perte de revenus pour les oléiculteurs. « Cette année, on va être à 15 % de ce qu'on a fait l'an dernier, et c’est partout pareil : les conséquences, c'est surtout une baisse des salaires », souligne la présidente du syndicat Oliu di Corsica. « Une exploitation agricole, même si elle ne produit pas, coûte quand même de l'argent. Vous êtes obligés d'entretenir les arbres, le sol, vous êtes obligés de travailler. Mais si elle ne produit pas d'argent et qu'on est quand même obligés d’y mettre des frais, il y a des gens qui vont mettre la clé sous la porte à un moment donné. »

Face à cette situation, certains producteurs envisagent de diversifier leur activité. Le syndicat travaille actuellement sur la construction d’une unité de production d’olives de table afin de préserver les exploitations et maintenir la filière en vie. « Le coefficient de rentabilité est beaucoup plus important sur l'olive de table que sur l'huile. Ça nous permettrait de continuer à faire face et de ne pas abandonner la filière, de ne pas abandonner la production et les arbres. » Car au-delà de l’impact économique, la saison difficile menace également le patrimoine culturel et humain de l’île. « Le problème, c'est que les oliviers de Corse, c'est un patrimoine humain, matériel et culturel pour la Corse. S'il n'y a plus d'oléiculteurs, il n'y a plus personne pour s'occuper des arbres, et on ne perd pas uniquement d'un point de vue économique, on perd aussi énormément d'un point de vue culturel. »