Obtenir un avis médical sans se rendre en cabinet ? C’est possible. Depuis trois ans, plusieurs pharmacies de Corse ont installé un dispositif permettant de réaliser une téléconsultation avec un médecin généraliste. Un service qui attire en moyenne « une à deux personnes par semaine », selon un pharmacien du centre-ville de Bastia. Ici, les profils sont variés : touristes de passage, habitants sans médecin traitant ou patients cherchant simplement une réponse rapide à un problème de santé. « On a eu de bons dépannages grâce à ce dispositif, surtout l’été, mais j’avoue que c’est moins sollicité en hiver. »
Sans rendez-vous, les téléconsultations prennent en charge des situations simples du quotidien, comme un rhume, une angine ou même un renouvellement d’ordonnance. La pharmacie met à disposition un espace confidentiel équipé d’un ordinateur avec une caméra, mais aussi de différents appareils nécessaires à la consultation. « Elle est reliée à un tensiomètre, un oxymètre, un stéthoscope, un dermatoscope et un thermomètre. On aide les gens à se connecter et on les guide, parce que tout le monde n'est pas capable de le faire, surtout en fonction des âges », souligne le pharmacien.
Selon lui, le dispositif se révèle pratique pour des situations ponctuelles. « C’est utile pour des petites urgences ou pour des renouvellements d’ordonnances. Ça dénoue pas mal de problèmes, parce qu’on peut attendre parfois longtemps avant d’avoir une consultation. » Un avis partagé par Sandrine Leandri, présidente de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO) de Corse, qui appelle néanmoins à la prudence. « Ça peut être bien dans les déserts médicaux, à condition d'être accompagné par le pharmacien et d’avoir une vraie plateforme en qui on peut avoir confiance : le médecin peut répondre entièrement à votre demande, alors que le pharmacien reste limité dans ce qu'il peut faire. Par contre, rien de tel que de voir un médecin traitant qui vous suit et qui connaît vos antécédents, surtout que les ordonnances qui ne viennent pas de l’Union européenne ne sont plus remboursées, ce qui pose problème avec certaines plateformes où les médecins sont en Angleterre. »
La télé-expertise pour examiner ses grains de beauté
Au-delà de la médecine générale, la pharmacie commence également à proposer de la télé-expertise, notamment en dermatologie. Ce dispositif permet d’envoyer des photos de grains de beauté ou de plaques suspectes à un dermatologue, qui évalue ensuite le problème à distance. « La télé-expertise, c’est presque du dépistage, mais on ne peut pas examiner toutes les zones du corps, comme les zones intimes ou la poitrine », précise le pharmacien. « C’est le patient qui choisit quelles zones montrer, et le dermatologue fait l’évaluation comme s’il était en cabinet. Par contre, une fois qu'on fait la photo d'un grain de beauté, on a la totale responsabilité du résultat. Admettons que ce soit un mélanome, il y a même un suivi derrière où les gens sont rappelés pour être sûr qu'ils ont pris un rendez-vous pour se le faire enlever au plus tôt parce que sinon, c'est catastrophique. »
Selon les professionnels, la télé-expertise en pharmacie permet donc de gagner du temps et de lever rapidement les inquiétudes des patients. « Ça permet supprimer le doute dès qu’il s’installe. Tout le monde sait qu'il ne faut pas laisser traîner les suspicions sur les grains de beauté, et c'est vraiment une très bonne solution. Au lieu de prendre rendez-vous, où on attend parfois six mois pour en avoir un, là, en trois jours maximum, c'est fait. Et ça aide les médecins généralistes qui envoient directement les patients ici pour la télé-expertise. »
Depuis que la pharmacie a mis en place la télé-expertise il y a un mois, « entre 15 et 20 personnes » sont venues bénéficier de ce dispositif. Le coût à la charge du patient est de 15 € par consultation. « Il faudrait développer l’accès aux spécialistes parce qu'on est dans un territoire où les gens ont parfois des soucis pour se déplacer », explique Sandrine Leandri. « Quand vous cherchez un spécialiste, à part Ajaccio et Bastia, c'est compliqué. » Elle insiste toutefois sur les précautions à respecter. « Il faut faire attention, il faut aller dans des endroits sécurisés, où on est sûr d’être bien pris en charge et accompagnés, et où le matériel est suffisant. La télémédecine a son intérêt, mais elle doit être un plus pour le patient, et non pas un intérêt commercial. »










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