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Réseau de blanchiment du "Petit Bar": l'heure du jugement au procès "Email Diamant"


CNI avec AFP le Mercredi 28 Mai 2025 à 10:30

Le tribunal correctionnel de Marseille rend son jugement ce mercredi dans l’affaire dite "Email Diamant", du nom donné par les enquêteurs à un vaste dossier de blanchiment visant le clan ajaccien du "Petit Bar". Après trois mois d’audience, 24 prévenus – dont le chef présumé Jacques Santoni – sont jugés pour avoir participé à un système complexe de dissimulation de fonds occultes. Le parquet a requis jusqu’à 14 ans de prison et 17 millions d’euros d’amende. La défense, elle, a plaidé la vacuité du dossier.



Le tribunal correctionnel de Marseille
Le tribunal correctionnel de Marseille
Au procès "Email Diamant", le nom donné par les enquêteurs à ce tentaculaire dossier de blanchiment des fonds occultes de la bande criminelle corse du "Petit Bar", c'est l'heure du jugement mercredi après-midi, à Marseille, pour les 24 prévenus, dont le chef présumé du clan, Jacques Santoni.

Après trois mois d'audiences, devant le tribunal correctionnel, deux visions d'une même réalité se sont affrontées. Dénonçant "l'emprise mafieuse" de cette équipe sur l'économie et la politique de Corse-du-Sud, le parquet a réclamé des condamnations allant jusqu’à 14 ans de prison et un total de 17 millions d'euros d'amende, des peines rarissimes dans un dossier purement financier.

La défense elle a plaidé une relaxe quasi-générale, regrettant la "cécité volontaire" de l'accusation. De fait, seuls un homme connu à Paris pour se livrer habituellement à des transactions d'espèces et un commerçant chinois ont reconnu leur concours à ces transports massifs d’argent.

Chef incontesté du "Petit Bar", selon l'accusation, Jacques Santoni, 47 ans, rendu tétraplégique par un accident de moto en 2003, ne s’est jamais présenté à ce procès ouvert le 24 février. Après avoir vainement réclamé, via son avocate, la disjonction de son cas pour raisons médicales, il n'a plus dépêché de défenseur. C'est contre lui que la plus lourde peine a été demandée, 14 ans de prison, deux millions d'euros d'amende et un mandat d'arrêt.

Même demande contre Michael Ettori, le "bras droit" du chef, en fuite. 12 ans et deux millions d'amende contre Pascal Porri, autre "pièce maîtresse" du clan, le seul à comparaître détenu.

Décrit par l'accusation comme "le cheval de Troie du Petit Bar pour pénétrer l'économie réelle", le chef d'entreprise Antony Perrino serait, aux yeux de son avocat Me Julien Pinelli, visé par "une volonté d'exemplarité" du parquet de Marseille, qui a requis neuf ans de prison contre cet ex-président de la Fédération du BTP de Corse-du-Sud et ancien directeur du quotidien Corse-Matin.

"Dossier creux" 
Manipuler des sommes d’argent, dissimuler des espèces dans des caches, les compter, ne constitue pas du blanchiment, a martelé la défense en réponse à la procureure Isabelle Candau qui avait appelé le tribunal à empêcher ce clan de "bouffer nos institutions avec son argent sale".
"Dossier creux comme un radis à la mauvaise saison", "réquisitions sommitales qui ne craignent pas la démesure",
"sévérité dictée par un souci de communication": les avocats ont dénoncé la dureté du parquet, notamment à l'égard des proches des membres du premier cercle.
"Elle n’est là que parce qu’elle est la compagne de l'absent", a ainsi plaidé Me Bruno Rebstock, défenseur de Saveria Lucchini, la compagne de Michael Ettori, gérante d'un hôtel d'Ajaccio et mère d'un enfant de quatre ans, contre qui six ans de prison avec mandat de dépôt et 500.000 euros d'amende ont été réclamés.

"Délit de recel de mari", a plaidé Me Marc Antonini, avocat de Sonia Susini, ex-épouse de Jacques Santoni, "son égale au féminin", selon la procureure, qui a requis contre elle neuf ans de prison, un mandat de dépôt et 150.000 euros d'amende.
"Délit de parenté", ont aussi évoqué Me Jérôme Susini et Gaëtan Di Marino, estimant que le seul tort de Jean-Laurent Susini, frère de Sonia Susini, "est d’être le beau-frère de Jacques Santoni". Selon ses avocats, aucun "protocole" n'avait été passé pour faire bénéficier sa soeur d'un gain de 4 millions d’euros au Loto en novembre 2018, manœuvre qui selon l'accusation aurait offert deux millions d'argent "propre" au Petit Bar.

Concernant "les financiers" du clan, huit ans de prison et un million d'euros d'amende ont été demandés contre le "marchand d'art" Jean-Marc Peretti, en fuite. Contre François-Xavier Susini, riche commerçant de Courchevel, et Jean-Pierre Valentini, vivant entre Dubaï et la Suisse après avoir construit une fortune colossale dans le trading du pétrole en Afrique, cinq ans d'emprisonnement assorti de deux ans de sursis ont été requis, ainsi qu'une amende de deux millions d'euros pour chacun.